Souvent invisibles, mais toujours indispensables, ils accompagnent au quotidien un proche en situation de handicap ou de maladie. Pour Soluble(s), Simon de Gardelle, directeur de l’Association Française des Aidants, décrypte les défis de l’accompagnement et présente les solutions concrètes pour ces millions de Français méconnus.
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>> Lire l’article complet : Comment soutenir 9 millions de proches aidants en France
– Simon Icard : Bienvenue dans un nouvel épisode de Soluble(s).
Aujourd’hui, je souhaite médiatiser des solutions à une situation qui touche entre huit et onze millions de Français.
On les appelle les proches aidants.
Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce ne sont pas uniquement des retraités qui s’occupent de leurs parents âgés.
Bonjour Simon de Gardelle !
– Simon de Gardelle : Bonjour Simon, enchanté d’être avec vous.
– Simon Icard : Enchanté et bienvenue dans ce podcast.
Tu es le directeur de l’Association française des aidants.
C’est une structure qui milite pour la reconnaissance du rôle et de la place des aidants dans la société.
Elle vient de bénéficier d’une visibilité exceptionnelle grâce au Z Event 2025, un événement caritatif qui a rassemblé trois cents streamers français pendant trois jours dans le but de récolter des fonds pour des associations, dont la tienne.
Une édition record avec plus de seize millions d’euros de dons qui s’est achevée le 7 septembre, au terme d’une retransmission marathon sur la plateforme en ligne Twitch.
Alors on va voir ensemble dans cet épisode comment ce coup de pouce va bénéficier à l’Association française des aidants.
Mais on va être aussi très concrets sur la problématique, le sujet.
Tu vas nous expliquer qui sont vraiment ces aidants, pourquoi leur place est essentielle dans la société, justement, comment ton association les accompagne concrètement depuis vingt et un ans ?
Car des solutions existent pour soutenir les gens qui aident un proche qui a besoin d’aide.
Et on parlera aussi des nouvelles mesures qui entrent en vigueur cette année en France.
Mais d’abord, comme vous le savez, je suis toujours curieux du parcours de mes invités en début d’épisode.
Le parcours de Simon de Gardelle
Simon, comment es-tu arrivé à t’investir, à t’engager sur le sujet des aidants ?
– – Simon de Gardelle : Écoute, c’est, moi quand je lis les récits des gens qui ont pris connaissance du sujet des proches aidants, c’est souvent un petit peu par hasard et ça montre, c’est assez révélateur, en fait, que ça, ça intervient parfois un peu tard et que le sujet mérite encore d’être, d’être connu et reconnu.
Il y a encore un Français sur deux qui ignore ou qui ne sait pas exactement à quoi correspondent le terme aidant.
Et d’ailleurs, c’est assez intéressant.
Au Z Event, c’était plutôt le cas, donc ça nous a permis de faire de la pédagogie.
Et donc moi, c’est en 2020, en fait.
En 2020, à l’époque, j’étais enseignant en sciences économiques et sociales au lycée.
Et puis j’avais envie d’avoir une expérience associative et je rejoins une association jeunesse et là, dans cette association jeunesse, je lance un programme qui s’appelle « Solidarité Aidants », justement dans des familles avec des situations de handicap ou de perte d’autonomie.
Et c’est vraiment à cette occasion-là que je découvre le sujet de la proche aidance et, je tombe un peu de ma chaise parce que…
Parce que déjà, en fait, en tant qu’ancien prof, j’en avais dans ma classe des jeunes aidants et je me dis que ça aurait pu me permettre de peut-être accompagner les élèves un peu différemment et aussi d’être parfois plus indulgent ou en tout cas d’avoir une autre, une autre posture d’enseignement.
Je tombe de ma chaise parce que dans mes, dans ma famille, il y a des proches aidants, des proches aidantes notamment.
Et je me dis ben voilà, en fait c’est là, mais je ne l’avais jamais nommé.
Et puis je tombe aussi un peu de ma chaise en tant que professeur de sciences sociales.
Je veux dire, j’ai fait des études en socio, en éco et c’est un terme que je n’ai pas croisé dans mes études.
Donc ben voilà, à triple titre, je suis vraiment très étonné et assez vite je me passionne pour cette nouvelle question sociale en fait, qui, qui a vraiment émergé, on va dire, dans les années 2000, 2000-2010 et c’est le temps de la reconnaissance.
Et peu de temps après, j’ai eu l’occasion de rejoindre l’Association Française des aidants.
Après cette première expérience et du coup, j’étais assez assez passionné par le sujet.
Le Z Event 2025 et la visibilité des aidants
– Et, un engagement qui ne te quitte pas.
Donc parlons d’abord du Z Event 2025 qui vient donc de s’achever.
Alors pour ceux qui ne connaissent pas vraiment, c’est un grand marathon caritatif en ligne.
Près de trois cents streamers, je le disais, qui se sont mobilisés pendant pendant plusieurs jours pour collecter des fonds.
Et le résultat est historique : plus de 16,1 millions d’euros récoltés.
Un record absolu.
Alors, votre association fait donc partie des huit bénéficiaires.
Chaque édition est suivie par 500 000 à 1 million d’utilisateurs.
Comment as-tu vécu cette visibilité soudaine pour ce sujet, celui des aidants de ton association qui reste donc, comme tu le disais assez méconnu du grand public ?
Cette visibilité est d’autant plus précieuse qu’on estime qu’un tiers des aidants s’ignorent l’être.
Quels retours tu peux nous faire de cette exposition importante sur Internet ?
– On va dire que, effectivement, c’est une chance assez, assez inouïe d’avoir pu participer à cet événement.
Je le rappelle, c’est le premier événement caritatif en ligne, en France, et même au monde en fait.
Donc sur ce coup-là, en France, on est vraiment à la pointe.
C’est le Téléthon de demain en fait.
Et donc c’est une chance incroyable.
C’était une découverte pour, pour moi et globalement et pour l’association.
Voilà, je connaissais à peine Twitch, donc ça a été l’occasion de télécharger et puis de voir l’envers du décor.
Donc c’est un marathon qui effectivement dure 48 heures, qui a permis une générosité assez incroyable en fait, et une générosité populaire, une générosité aussi vers, vers une des populations, une population assez jeune et, comme comme tu l’as dit aussi, une exposition.
En fait, on a été interviewé par le créateur de Z event qui s’appelle Zerator, alias Adrien Nougaret, donc qui a pris le temps, en fait avec chaque association pendant une heure, d’expliquer ce que ce qu’on faisait tous.
Et donc ça, c’est c’est effectivement assez.
Enfin, c’est une chance.
Il y a aussi Samuel Etienne qui est plus connu, entre guillemets, de l’ancien monde, qui vient du monde de la télé, qui aussi nous a interviewé pendant une heure.
Et voilà, c’était vraiment l’occasion pour nous d’expliquer ce que c’est que justement ce terme de proche aidant.
Et petit clin d’œil à Zerator qui quand il a annoncé effectivement le Z Event, il parlait des professionnels quand il parlait des aidants.
Or, c’est effectivement une confusion assez commune.
Les aidants sont des proches, les aidants sont des aimants et donc ce ne sont pas des professionnels, ce sont bien des parents, des enfants, voilà qui, des conjoints, qui accompagnent ou des amis qui accompagnent leurs proches dans la maladie, dans le handicap ou dans la perte d’autonomie.
Définition et invisibilité des proches aidants
– Simon Icard : Des proches, des proches aidants. Et tu dis aimants !
En effet, c’est un engagement qui dépasse le simple lien de filiation.
On va voir tout au long de cet épisode que les personnes qui aident un proche, donc les aidants, ont aussi besoin de visibilité.
Pour bien comprendre leur rôle et leur place auprès de leurs proches, bien sûr, mais aussi dans la société.
Alors d’abord, je le disais, on estime qu’un tiers des aidants ne savent pas qu’ils le sont.
Comment on peut ne pas savoir qu’on est un aidant ?
– – Simon de Gardelle : J’ai envie de dire même le chiffre.
Il peut même être un petit peu plus, plus important.
En fait, c’est quasiment un sur deux parce qu’un tiers l’ignore et environ vingt pour cent ne sait pas exactement à quoi cela correspond.
Donc, on voit qu’il y a encore un travail de prise de conscience qui est assez important en soi finalement, dans notre conception, c’est assez naturel en fait.
On « naturalise » le fait d’aider son proche, et notamment chez les parents qui ont des enfants en situation de handicap.
Ils n’aiment d’ailleurs pas toujours très bien qu’on les nomme comme des aidants.
Et parfois même, ils peuvent pendant un certain temps résister à ce terme-là.
Voilà, c’est l’idée que le proche, bien, c’est son rôle, c’est normal.
J’aide ma mère, j’aide mon, mon frère.
Et Or, en fait, et bien, c’est aussi une dimension culturelle importante, c’est aussi une dimension sociale.
C’est quelque part le résultat d’un pacte de solidarité très, très lié à nos enjeux de Sécurité sociale.
Et donc les évolutions politiques, les évolutions culturelles ont un impact fort sur ce rôle-là.
Ce rôle-là aujourd’hui, il n’est pas le même qu’il y a vingt ou trente ans et il ne sera pas le même encore dans dix ans.
Et la pression, elle, a plutôt tendance à s’accentuer.
Et du coup à faire que certains, même s’ils sont très, considèrent que c’est normal.
Ils peuvent aussi très mal le vivre ou avec beaucoup de difficultés et de souffrance.
Les risques d’épuisement et de burn-out
– Je le dis pour qu’il n’y ait pas de perception, de jugement.
Chacun fait comme il veut et comme il peut.
Il y a en France une obligation alimentaire envers ses parents, par exemple lorsqu’ils vieillissent ou ses enfants, mais il n’y a pas une obligation à ce point de soin.
Donc, c’est pour ça que je dis, j’entends la dimension culturelle, mais il y a aussi donc quelque chose qui relève peut-être du choix ou de l’impression qu’on n’a pas le choix selon ça.
Chacun jugera.
Alors commençons par le…
– Peut-être juste pour te.
– Oui.
– Sur cette dimension de choix, c’est vraiment un, je me permets de te couper parce que c’est un point de plaidoyer très important de l’association.
En fait, on milite pour justement que ce soit un choix.
Le fait d’aider son proche. On a une place de ça, c’est sûr, ça nous est, de, on est l’enfant deux, on est le parent de. Ça, c’est notre place.
Et quelque part, on n’a pas le choix. Mais par contre, on voudrait qu’on puisse choisir de l’accompagner dans une relation d’aidance ou choisir la manière aussi. Il y a plein de manières d’aider, et pas que ce choix-là soit contraint pour qu’il puisse être en fait le mieux vécu. C’est.
Je suis persuadé que, aider, étymologiquement, ça voulait dire ça veut dire, selon le linguiste Alain Rey, apporter de la joie. Et donc ça peut être tout à fait épanouissant et c’est même, je pense, une expérience à vivre avec ses proches. Et ça change des fois les relations, mais ça peut être aussi source de souffrance et c’est ça qui peut être très compliqué quand même.
– Oui voilà, c’est, entre les lignes, ce que je laissais entendre. Car en effet, c’est actuellement, même s’il y a eu des progrès. Ce sont les circonstances parfois qui guident ou un accident de la vie, qui guident, le fait de devenir parfois soudainement un aidant, un proche aidant.
Alors, je le disais dans l’introduction, on a tendance à penser aux enfants de parents vieillissants, mais la réalité est plus large.
Ton association a été créée en 2003. Avant de parler des solutions concrètes, on entend ou on lit qu’il y a un risque majeur que connaissent les, les associations et que peuvent peut-être connaître beaucoup d’aidants.
C’est un certain risque d’épuisement à force de « crouler » sous la charge parfois. Est-ce que c’est un risque qui est important pour le rôle d’aidant ?
– Globalement, les aidants et les proches aidants peuvent osciller entre deux deux mouvements en fait, qui parfois se combinent, celui de l’épuisement et du burn-out. En fait, on n’est pas dans une situation professionnelle, mais en tout cas une notion d’épuisement, de fatigue psychologique très importante qui peut s’installer avec une fatigue physique et puis aussi de la culpabilité. Et on peut aussi s’épuiser et culpabiliser, même si on en fait énormément.
On peut culpabiliser, culpabiliser de ne pas faire assez, notamment en fonction du lien affectif.
Le lien affectif, c’est important, notamment quand on a fait une promesse, comme par exemple je ne te laisserai jamais tomber, je t’accompagnerai jusqu’à tes derniers jours. Et donc, ou alors, il y a des proches aidants qui font le choix de pas aider, mais qui le vivent mal, cette situation où on ne peut aider et qui vont mal le vivre.
Donc voilà, ce sont ces deux dynamiques qui sont à prendre en compte et c’est pour ça qu’on en revient à la question du choix. En fait, quand la situation est choisie dans un univers contraint, on n’est pas non plus angéliques.
Bien sûr qu’il y a des contraintes, bien sûr que les contraintes systémiques et il y a des contraintes relationnelles, mais quand on peut justement, dans la mesure du possible, faire des choix, les assumer, ces choix, eh bien, on peut justement prévenir aussi les situations d’épuisement et toutes ces les limites, les bonnes limites pour se préserver, parce que c’est quelque part aussi quelque chose qui peut durer très longtemps et dont l’intensité peut varier. En fait.
Les Cafés des aidants et l’accompagnement
– Faire des choix.
Je trouve que c’est intéressant qu’on ait commencé à travers ce fil rouge du choix, parce que ça suppose aussi de prendre conscience de sa situation, j’allais dire de son degré d’implication d’aidance ou de difficultés auxquelles font face à la fois le proche et soi-même dans cette aventure humaine. Parmi vos actions les plus visibles, on peut citer le Café des aidants. Vous avez un peu plus de trois cents cafés des aidants à travers la France.
Concrètement, qu’est-ce qui se passe dans un café des aidants ?
On comprend qu’il y a une notion de rencontre et d’accompagnement.
– Oui, vous l’avez bien résumé.
Je crois que c’est ça en fait.
Je rajouterai une troisième dimension, c’est celle de la convivialité qui va avec, avec l’accompagnement et la rencontre.
Un café, c’est la principale vertu, c’est la rencontre, la rencontre de proches aidants qui ne sont pas forcément dans la même situation, mais dans une situation qui a pas mal de points communs. Et donc c’est déjà sortir de son isolement, prendre conscience que ce que vivent ce que je vis est une situation qui est vécue par énormément de Français.
Vous le rappeliez en introduction, 9,3 millions de Français sont des proches aidants. Donc statistiquement, c’est quelque chose d’assez normal. Ça va tous nous concerner. Si on prend cinq minutes pour y réfléchir, on se dit qu’on n’en a pas été si loin ou qu’on a des proches qui sont impliqués. Donc c’est déjà ça.
En fait, c’est sortir d’un isolement et partager des situations et donc du coup partager de la solidarité. Partager des informations qui vont m’aider dans mon parcours. Partager de la prise de distance. Partager aussi des émotions.
En fait, il y a beaucoup de proches aidants qui quelque part retiennent beaucoup. Et ces moments de convivialité, justement, vont être des moments où ils vont pouvoir quelque part décharger, laisser les émotions s’exprimer dans un univers justement dans un contexte très, très bienveillant et très sécurisant puisqu’ils sont entre pairs, en fait, entre gens qui vivent cette situation d’aidant qui est quand même invisibilisée.
Donc du coup, dans une famille, vous pouvez être celle qui aide, mais personne ne s’en aperçoit. Un peu comme pour le travail domestique, vous êtes celle qui fait les courses de la maman, de l’ensemble des frères et sœurs, celle qui fait des soins, les soins, la toilette.
Mais pourtant personne ne s’en aperçoit.
Ça vous pèse, ça vous pèse sur votre travail, ça vous pèse pour vous occuper de vos enfants. Parce que voilà, vous avez aussi des enfants à vous occuper.
Mais voilà, donc c’est vraiment un espace de parole et d’accompagnement puisqu’il est encadré par des professionnels. Des professionnels formés par l’association, je vous le rappelle, un psychologue, une psychologue et un travailleur social pour justement aussi orienter la personne vers les droits et du proche aidant ou de la personne aidée.
Les formations pour aidants et professionnels
– Et tu disais, il ne faut pas confondre les aidants avec des professionnels. Cela veut dire que cela ne s’apprend pas.
On n’apprend pas à devenir aidant. Par contre, on peut se former. Si j’utilise les mots de l’Association française des aidants, il y a aussi des formations qui sont proposées avec même un centre de formation, une plateforme en ligne, des formations pour deux types de publics.
Les professionnels, on va en parler et les aidants eux-mêmes.
Évoquons d’abord les formations pour les aidants. Parle-nous de l’atelier : « Comprendre pour agir ». Alors là aussi, le titre est éloquent. Ce qui nous intéresse, c’est qu’est-ce qu’on apprend pour quelles actions ? En fait, dans ces ateliers, dans ces formations. – En fait une aidante.
– Au tout début de ma mission à l’association, vraiment, j’étais allé dans un café et elle disait vraiment l’atelier Comprendre pour agir, c’est vraiment la formation des aidants en grand quoi, parce que ça ne va pas.
Ce n’est pas un atelier qui va être conçu pour vous apprendre des gestes techniques, pour vous, pour des gestes de soins.
Mais c’est vraiment un atelier qui va vous aider à prendre du recul. En fait, la situation d’aidance, parfois, vous êtes projeté, parfois, elle est non désirée, parfois.
Voilà. Et donc cet atelier va vous permettre de réfléchir sur votre relation à votre proche, quel chemin emprunter, quel chemin demain elle pourrait emprunter. Vos relations aussi et votre lien à l’ensemble de vos proches.
Parce que, en général, vous n’êtes pas seul. Vous avez un entourage qui pourrait aussi s’impliquer et où que vous pourriez impliquer. Et donc ces six ateliers concrets de trois heures et où vous allez cheminer justement sur sur cette notion de choix. Comment justement comprendre, puis après faire un choix, agir auprès de son proche ?
– Parce que agir auprès de son proche, ce n’est pas faire des gestes médicaux, mais c’est le soutenir, surtout toute une série d’actions. Puisqu’on parlait d’actions, des démarches administratives, des prises de rendez-vous médicaux.
– Moi, j’aimais bien, j’aime bien. On a reçu à nos à nos rencontres nationales du réseau, puisqu’on est nous, on est. On est une association qui fédère des adhérents qui sont principalement des structures du médico-social.
On a reçu le philosophe Charles Pépin et lui il disait quelque part être proche, c’est déjà être là. On peut effectivement se faire une liste à la Prévert de tout ce que fait un proche aidant, et il fait énormément de choses.
J’ai une proche aidante qui me disait, on pourrait nous passer le concours Lépine parce qu’il faut, quand la personne est vraiment en perte d’autonomie très importante, il faut parfois un degré d’inventivité très important, mais c’est aussi être là, en fait, être aidant et ça, et aussi très impliquant en fait, et être là, notamment la nuit.
On oublie souvent, en fait, la nuit, pour les aidants, c’est un temps qui peut être très différent, ça peut être des réveils réguliers, ça peut être aussi du temps de veille, en fait, des temps de surveillance, du temps de vigilance et aussi un temps privilégié. C’est le temps aussi où les professionnels ne sont plus là et le temps, on se retrouve avec son proche. Voilà.
Bon, là, je ne sais plus pourquoi je racontais ça, mais…
– Oui, parce que justement, c’était sur les notions, les compétences, mais finalement ça se résume très humainement en étant là, être là, y compris quand d’autres ne sont pas là, et notamment la nuit.
Alors je fais une petite parenthèse au sujet des professionnels et des formations pour les professionnels. Pour que tu nous dises. Qui sont ces professionnels que vous formez ? Et peut-être de savoir si le but est d’identifier des personnes qui sont elles-mêmes en situation d’aidance. Pour que les professionnels puissent les voir, les reconnaître ?
– Tout à fait. Oui, globalement, les professionnels, ils sont quand même. Ils ont, ils sont, ils accompagnent en général en priorité une personne malade, une personne en situation de handicap et.
Et donc, dans un univers où on est parfois un peu pressurisé, on n’a pas toujours le temps de faire attention qu’il y a une famille, il y a, il y a un proche aidant, et que de l’associer à la personne aidée, de comprendre que c’est une relation, de comprendre qu’il y a des savoirs expérientiels. La personne qui connaît le mieux quand même, c’est justement généralement la personne malade, c’est le proche aidant et qui peut être justement un très bon partenaire dans le parcours de soins de la personne. C’est important. C’est pour ça qu’on a notre formation phare. C’est justement une formation qui s’appelle ROSA. C’est repérage et observation des situations d’aidance. Et là, on va accompagner les professionnels, les travailleurs sociaux, les psychologues, tous ceux qui peuvent être au contact des personnes malades, des personnes en situation de handicap et de leur famille et de leurs proches.
Le financement et le plaidoyer
– Et donc, comme vous êtes une association et que vous avez besoin de la solidarité pour fonctionner, c’est le lien avec le Z Event dont je parlais au début. C’est que ce sont ces actions-là en particulier qui vont bénéficier d’un coup de pouce important pour pouvoir en développer plus à travers le pays ?
– Oui, tout à fait. Il y a deux dimensions. Il y a la dimension et puis on a le Z Event, mais aussi, on a des partenaires de longue date, notamment les groupes de protection sociale qui sont à nos côtés. Malakoff Humanis, AG2R depuis un moment pour nous soutenir et qui continuent à nous soutenir sur le Café des Aidants, sur l’atelier Comprendre pour agir, demain à l’atelier santé.
Puisque les aidants ont tendance à s’oublier et y compris leur propre santé, et donc le Z Event va nous va nous donner un coup de pouce ou un gros coup de pouce sur nos dispositifs, mais aussi sur tout ce qui est difficilement finançable dans l’associatif. Ce qui n’est pas évident, notamment les frais, les frais de gestion, les frais de structure.
Voilà, la question du plaidoyer aussi, qui ne touche pas directement les aidants, mais en fait qui permet aussi de faire bouger les lignes. Et donc la chance, c’est que justement ces fonds, ils vont permettre, ils sont fléchés, ils vont permettre aussi de nous structurer et de changer un peu d’échelle, j’ai envie de dire.
Valoriser l’expérience d’aidant
– Tu parles de plaidoyer, car c’est évidemment une association qui a envie de faire changer les choses et peut-être à commencer par les regards sur la situation, d’abord la voir en face et peut-être changer le regard sur les aidants eux-mêmes. C’est toi qui nous le dira.
Je me demande si ce n’est pas le premier enjeu sociétal autour des aidants.
C’est de pouvoir faire évoluer les regards pour mieux accompagner, notamment dans le monde professionnel. Il y a vingt pour cent de salariés qui sont des aidants dans leur sphère privée et qui sont donc salariés et qui sont au travail.
Des personnes qui doivent parfois s’absenter quelques minutes pour répondre au téléphone alors qu’ils travaillent, demander des aménagements à leur employeur. Ces salariés de leur situation.
Est-ce que vous travaillez sur. Sur le changement des regards justement sur des exemples précis comme ça ?
– On lance le quinze octobre prochain un des modules digitaux qui s’appelle « Aidant et compétent » pour justement changer le regard sur les aidants actifs, qu’ils changent déjà de regard sur eux-mêmes en fait, notamment ceux qui sont, qui ont dû cesser une activité professionnelle.
Pour arrêter de considérer que c’est un trou dans un cv, que c’est qu’il faut le masquer. Ils peuvent. Ils ne sont pas obligés de le dire, mais en tout cas, c’est une période riche, remplie et qui peut aussi donner des savoirs qui peuvent se transférer dans le monde professionnel. Donc, il y a vraiment quelque chose de l’ordre du retournement du stigmate.
Voilà. Il n’y en a pas. Il n’y a pas à en avoir honte, bien au contraire. Et ça peut même être une force et dans une vie professionnelle. Et donc, c’est pour ça qu’on sort ces petits modules digitaux qui sont en fait une première clé.
Et je vous invite à aller sur notre site à partir du quinze octobre pour les découvrir. Ils sont tous simples, c’est dix minutes. C’est déjà un sujet vraiment aidant de prendre un peu de recul. Trois Se projeter avec un avec de nouvelles, un projet de reconversion professionnelle et puis quatre Ouvrir un peu le champ des possibles. Donc voilà.
Les droits des aidants et évolutions légales
– Le rendez-vous est pris à partir du quinze octobre sur le site internet de l’association. Avec donc ces modules, on n’a pas le temps de tout détailler, évidemment, mais il y a quand même des certains droits, avec le temps, qui ont été créés au profit des aidants.
La situation évolue.
Tu nous diras si elle évolue assez vite ou pas.
On peut penser au don de jours de congés en faveur d’un collègue aidant, le congé aidant également. Quelques avancées donc, autour de la notion de répit pour que l’aidant puisse un peu souffler. Est-ce que tu peux nous expliquer en quelques mots où se situent les progrès justement dans le droit, quand la notion de répit a été, a été mise en œuvre dans le Code du travail, et notamment la possibilité d’un congé professionnel pour les aidants.
– Alors, on va dire, le tournant, c’est 2015, en fait, avec la loi d’adaptation de la société au vieillissement qui donne pour la première fois une définition du proche aidant. Et ça, c’est une victoire, c’est une victoire incomplète.
Et parce que justement, tous les aidants ne sont pas reconnus dans cette définition-là. Les quand j’accompagne un malade du cancer, je ne suis pas reconnu.
En gros, toutes les personnes qui accompagnent des personnes malades ne sont pas reconnues. Et donc on milite concrètement pour qu’il y ait un changement, une évolution de la définition. Ça, c’est vraiment très important. Et être reconnu aux yeux du droit, c’est être reconnu aux yeux de tout le monde, en fait, y compris de son employeur, on en parlait.
Parce que quand on est cet aidant-là, on ne rentre pas dans une case au travail, au boulot. Et puis ça a été un point de départ assez important qui a effectivement donné naissance au congé de proche aidant, qui a donné naissance à la question du droit au répit.
Ce sont, à mon sens, les deux principaux droits pour les… Pour les proches aidants aujourd’hui qui existent. Ce qu’on peut regretter, c’est que ce sont encore des droits qui sont peu connus, peu usités. Il y a eu 20 000 recours au 31 décembre 2024. Le congé de proche aidant. Donc, si on fait un ratio rapide.
L’urgence démographique et transition sociétale
– Oui par rapport aux 9 millions estimés même si c’est peut-être pas tous dans cette définition. Donc faire connaître ce congé de proche aidant.
Et d’ailleurs, tu parlais de la perspective démographique des solutions d’avenir. Parce que quand même, les chiffres démographiques parlent d’eux-mêmes. Aujourd’hui, on est vingt-deux pour cent de la population française à avoir soixante-cinq ans ou plus, contre seulement seize pour cent en deux mille vingt-cinq.
Les baby-boomers sont près de treize millions en 2025, on compte déjà plus de 1,3 million de personnes âgées dépendantes.
Allez, j’arrête avec les chiffres, mais c’est pour dire qu’on doit s’attendre à coup sûr à une plus grande part de personnes aidantes dans les années à venir.
Dirais-tu que la société a pris la mesure de cette perspective démographique ?
Si on se place du point de vue des aidants, on parle beaucoup des retraites, mais assez peu de l’accompagnement.
– Oui, et je dirais aussi qu’il y a eu par rapport à ce que tu dis, pour compléter, il y a un effet ciseau en fait, peut-être que tout ce que tu dis est très juste, et en plus, il y a une pénurie de main-d’œuvre dans le secteur du soin, il y a une pénurie de main-d’œuvre dans le médico-social, dans l’aide à domicile. Donc en gros, tu as des besoins qui vont exploser. Vieillissement, explosion, augmentation des maladies chroniques et conjuguée à un manque de main-d’œuvre.
Donc concrètement, là, on voit que ça va se répercuter sur nos vies en fait. Et je ne dis pas, je dis volontairement, pas sur les aidants parce qu’en fait c’est sur tout le monde, c’est sur nos vies, que ça va se répercute et c’est maintenant qu’il faut anticiper ça parce que ça va ne faire que s’accentuer.
La transition démographique, je veux dire, c’est quelque chose d’assez mécanique, d’assez prévisible. Il n’y a pas de surprise. Et de la même manière, moi, je le compare souvent avec la transition écologique. Je trouve qu’on a. On a les données, on sait. Et pourtant on va dans le mur. Donc voilà.
– Donc tu appelles un sursaut, au-delà de la prise de conscience, à des actions concrètes qui mobilisent l’ensemble de la société et pas que des compartiments, on entendait la situation du handicap et assez, on va dire, considérée. Mais ça, ça va beaucoup plus loin.
– Oui, tout à fait.
Conseils aux jeunes aidants
– Un dernier chiffre, celui-là concerne les plus jeunes d’entre nous et il frappe aussi.
C’est l’âge moyen d’entrée dans l’aidance.
C’est l’âge à partir duquel, en moyenne, on… les aidants le deviennent. Il a tendance à se réduire. On devient aidant de plus en plus jeune avec le temps. Il est passé ces dernières années de l’âge de trente-neuf ans à trente-trois ans. Cela veut dire là aussi qu’il y a des, des évolutions, des mouvements dans la société aussi qui se font au niveau de l’âge de l’entrée dans l’aidance.
Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui, très jeune, devient aidant et non pas, comme je le disais, quelqu’un qui a pu se préparer, peut-être s’organiser au vieillissement d’une personne ? À trente-trois ans, c’est très jeune…
– Oui, je ne sais pas s’il y a vraiment des conseils à donner.
On n’est jamais vraiment préparé ou jamais vraiment prêt parce que souvent, quand on entend les témoignages d’aidants, ça ne se fait pas du jour au lendemain. En fait, c’est souvent quelque chose qui glisse un peu. En fait, c’est petit à petit. On a commencé effectivement à être de plus en plus présent, de plus en plus, d’accompagner de plus en plus la personne qui perd en autonomie.
Donc, il n’y a pas souvent une transition nette en fait, sauf les gens qui sont par exemple, un accident ou une maladie grave. Là, effectivement, il y a un basculement.
Ce que je voulais dire avant de répondre à ta question, c’est qu’on peut rentrer dans la danse très tôt. En fait, on considère les jeunes aidants à partir de l’âge de cinq ans.
Donc, on peut être jeune aidant à partir de cinq ans et accompagner son frère, sa sœur, ses parents. Et donc moi, je dirais le conseil, c’est de ne pas rester seul avec cette situation-là. Et c’est pour ça que nos dispositifs, il y en a d’autres, sont intéressants, sont chouettes. Ils permettent aussi de comprendre et de se mettre en lien avec d’autres, d’autres proches aidants, des professionnels.
Voilà le meilleur moyen, je trouve, de trouver de l’information. Parce que c’est complexe de passer par les autres et d’en parler autour de soi, de sa famille.
Ressources et contacts
– Les aidants qui sont aussi des aimants. Les aidants sont là pour leurs proches et les associations comme la tienne sont là pour les aidants. L’Association française des aidants. Simon de Gardelle, était donc dans Soluble(s) !
On peut retrouver toutes les ressources de l’association, sur le site internet aidants.fr, c’est facile. aidants avec un S, au pluriel. Il y a notamment la carte de France des Cafés des aidants. Les ressources dont tu parlais et celles qui vont arriver à partir du 15 octobre.
On trouve aussi l’association facilement sur les réseaux sociaux aussi ?
– Écoute sur LinkedIn assez facilement et sur Facebook. Voilà, c’est les deux réseaux sur lesquels on est. On est aujourd’hui présents.
– Simon, merci d’avoir mis en lumière ton action et le rôle des aidants. Merci d’être passé dans Soluble(s) !
– Merci beaucoup, à bientôt !
– A bientôt.
– Au revoir.
– Voilà, c’est la fin de cet épisode. Si vous l’avez aimé, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous. Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site internet, csoluble.media. À bientôt !
POUR ALLER PLUS LOIN
- Voir le site Internet de l’Association Française des Aidants : aidants.fr
Réseaux sociaux :
Voir sur YouTube :
- Le Philosophe Charles Pépin aux rencontres nationales de l’AFA
Lire aussi : DREES – Étude sur les 9,3 millions d’aidants
TIMECODES
00:00 Introduction
01:56 Le parcours de Simon de Gardelle
04:15 Le Z Event 2025 et la visibilité des aidants
07:16 Qui sont les aidants ?
09:08 Le choix d’aider
13:39 Les Cafés des aidants
16:06 Les formations pour les aidants
17:57 Les compétences des aidants
19:31 Les formations pour les professionnels
20:57 Le rôle du Z Event et les projets
22:18 Faire changer les regards
23:09 Les modules digitaux pour les aidants actifs
24:29 Les droits des aidants
26:44 La perspective démographique
28:49 Les jeunes aidants
31:17 Merci à Simon de Gardelle !
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Ecouter aussi
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