[TRANSCRIPTION] NewsTruck, vidéos, ateliers : Lumières sur l’info engage les jeunes contre la désinformation
Depuis 2017, l’association Lumières sur l’info se mobilise pour aider les jeunes à distinguer le vrai du faux dans un monde où l’information circule rapidement et sans filtres. Présidée par Damien Fleurot, journaliste politique et rédacteur en chef adjoint à TF1 et LCI, cette association rassemble des journalistes de divers horizons, tous engagés dans l’éducation aux médias.
Écouter plus tardTranscription (automatisée)
Post original : NewsTruck, vidéos, ateliers : Lumières sur l’info engage les jeunes contre la désinformation
[Musique]
Bienvenue dans un nouvel épisode Soluble(s) !
Aujourd’hui, je m’intéresse à des réponses pour contrer la désinformation et vous allez l’entendre, elles sont tout à fait en phase avec ce qui intéresse les jeunes.
Bonjour. Damien Fleurot.
– Bonjour, Simon.
– Tu es journaliste depuis une vingtaine d’années. Tu suis les sujets politiques pour les antennes des chaînes de télévision françaises, TF1 et LCI où tu es rédacteur en chef adjoint. Je te reçois pour parler de ton engagement dans Lumières sur l’info, Lumières au pluriel. Je te reçois pour parler de ton engagement dans Lumières sur l’info, Lumières au pluriel. Lumières sur l’info, c’est une association de journalistes créée justement pour lutter contre la désinformation. Avec toi, nous allons voir comment vous vous y prenez pour aider les jeunes à mieux discerner le vrai du faux en matière d’infos. Comment mieux s’outiller pour utiliser son esprit critique. Tu livreras aussi des conseils concrets aux jeunes, j’en doute pas. Mais d’abord, on va savoir un peu plus sur toi, sur ton parcours. Sais-tu ce qui est à donner envie d’exercer le métier de journaliste.
– C’est une question qui m’est venue assez tardivement, je dirais. C’est pas d’abord le métier de journalistes qui m’a attiré, mais c’est plus le goût pour l’actualité. C’est vrai que depuis très tôt, quand j’étais adolescent au collège, j’avais une petite radio dans ma chambre. Et je la branchais assez régulièrement sur une chaîne d’information qui s’appelle France Info, qui existe toujours. Et j’aimais bien être connecté comme ça, un petit peu avec le monde en mouvement. C’est vrai que chez moi, on écoutait beaucoup la radio. On lisait des journaux aussi. Donc, j’ai toujours eu ce rapport avec l’actualité et avec ce souci de savoir un peu ce qui se passe au moment que l’on vit à la fois dans son quartier, dans sa ville, dans son pays et dans le monde. Et puis, j’ai finalement fait des études après le bac, plutôt de commerce, donc assez éloignées des métiers du journalisme. Mais c’est en faisant ces études que je me suis dit que vraiment, c’était peut-être plutôt vers les métiers de l’information que je souhaitais me tourner. Et donc, petit à petit, je me suis quelque part orienté, vers ces métiers-là, avec la formation que j’ai pu faire au Centre de formation des journalistes qui est une école reconnue de la profession. Et puis, d’ailleurs, au départ, j’ai d’abord mêlé un peu ma formation initiale, l’économie, le commerce et la pratique du journalisme. Parce que j’ai, par exemple, fait mon stage de fin d’études au service économie de TF1. Donc, voilà, c’était un peu une façon de boucler la boucle. Et puis, après, assez vite, je me suis spécialisé sur le sujet politique parce que, ça occupe une grande place dans les médias, la politique. Les Français aiment la politique, ils en parlent beaucoup. Donc, dans les journaux d’information, la presse écrite, la radio ou même la télé, eh bien, on y consacre une large de place. Et donc, j’ai pu m’épanouir sur ce sujet-là, dans ce secteur, jusqu’à aujourd’hui.
-Notre époque est reine en matière d’information pour le meilleur et parfois pour le pire. Alors, pour bien comprendre la suite de cet épisode, parlons d’abord du problème que Lumières sur l’info, a décidé de combattre, à savoir la désinformation. Alors, il y a une formule en anglais que l’on entend de plus en plus, c’est celle de fake news. Peux-tu nous dire pourquoi est-il important pour les citoyens de savoir faire le tri entre une information juste et une fausse nouvelle ?
– En fait, c’est finalement, pour quelle raison c’est pertinent de bien s’informer sur tous les sujets de l’actualité, sur tous les sujets de son quotidien, c’est pour pas se retrouver dans des situations désagréables, où on pense savoir, en fait, on ne sait pas, bien s’informer par exemple sur un sujet très pratique. Les horaires d’un train, c’est éviter d’arriver trop tard à la gare et de manquer son train, manquer son rendez-vous, bien s’informer sur les résultats de son équipe de football, que l’on suit, que l’on aime, que l’on supporte et sur les performances des joueurs, bien, c’est mieux que d’avoir des informations qui sont erronées, parce qu’en fait, on en parle, on vit de façon plus pertinente les choses. Donc en fait, c’est important personnellement pour pas être ridicule, pour pas rater de rendez-vous, et puis, après, plus globalement, et bien savoir démêler le vrai du faux, eh bien, c’est très important en démocratie, pour avoir un débat de qualité, pour vivre en société et échanger argument contre argument, et se faire son opinion. Donc se mettre d’accord sur des faits et puis ensuite être capable de débattre de ses faits, avancer eh bien son point de vue, mais de façon consolidée, je dirais, c’est ça le plus important, et ce qui fait en fait, société, ce qui permet aux démocraties de s’épanouir, parce que, quand on n’a plus cette capacité à démêler le vrai du faux, on reçoit des informations qui peuvent être manipulées, qui peuvent être tronquées et dans ces cas-là, on vit dans une société qui dérive, qui peut avoir des penchants autoritaires, totalitaires, et voilà, on le voit dans certains pays aujourd’hui, par exemple dans des dictatures, quand on touche à l’extrême, la main mise sur l’information, qui n’est plus une information, mais on parle alors de propagande, en quelque sorte, de désinformation, et on voit les effets que cela peut avoir à la fois sur la vie d’un pays, sur les droits humains ensuite.
– Partager une même réalité, alors je reprends ça ce que tu disais, lorsque tu étais jeune dans ta chambre à écouter la radio qui te reliait au monde, le fait d’écouter la radio et donc de l’info produite par des journalistes professionnels te relier à la réalité du monde, j’essaye de reformuler ce que tu nous disais parce que partager une même réalité, c’est pouvoir faire des choix démocratiques. Alors, on va parler dans un instant des solutions concrètes mises en œuvre par ton association, une association d’éducation aux médias, celle que tu présides. Mais j’aimerais m’attarder aussi un instant sur la différence qu’on peut faire entre une information et une opinion. Comment les distinguer là aussi sur internet ou dans une émission de débats à la télévision, par exemple ?
– Oui, c’est vrai que c’est une très bonne question et c’est un sujet qu’on pose systématiquement en dans les moments d’échange, de débats, d’ateliers, de conférences que l’on peut faire. Quel que soit le public, je dirais, du plus jeune, aux plus seniors de nos auditeurs, de nos… eh bien, des personnes que l’on rencontre pour ces séances. Un fait et une opinion, c’est pas la même chose, il faut d’abord partir du fait pour se faire une opinion. On montre généralement, par exemple, un mur, un mur qui est dans un jardin, un mur en pierres qui est fissuré. Et on voit très nettement sur la photo de ce mur, et bien qu’il s’agit d’un mur plutôt ancien, en raison des pierres qui sont posées, on voit la fissure qui est très nette. Ensuite, on va, eh bien, se poser la question. Voilà, en quelle matière est faite le mur, et que voyons sur ce mur cette fissure, l’état du mur ? Après, on pourra s’interroger et on sera tous d’accord pour dire que ce mur est fissuré, que ce mur est en pierre et voilà, compte tenu de l’épaisseur du mur, il semble malgré tout assez solide, mais il y a cette fissure. Ce sont des faits. Après, est-ce qu’on va dire que ce mur est bien, on le trouve plutôt joli, plutôt dans vintage, est-ce qu’on trouve que ce mur, il fait peur, parce qu’il renvoie, eh bien, l’image d’un mur, comme un mur dans un de prison, etc. Ça, ce sont des impressions, ce sont des opinions qu’on va avoir. Et on n’aura pas forcément la même perception. Voilà, on peut être un amateur de vieilles pierres, aimer les murs en pierre et souhaiter, par exemple, dans son jardin de faire une clôture avec un joli mur en pierre ancienne. D’autres vont trouver que c’est démodé, que c’est passé, que c’est austère, et vont préférer clôturer un espace en jardin avec une aide, par exemple, qui est la même de la biodiversité, etc. Donc, ce sujet-là, il paraît un peu anodin parce qu’on parle d’un mur, mais malgré tout, quand on pose la question, est-ce que vous trouvez beau ce mur à des collégiens, on va avoir des opinions différentes qui vont s’exprimer et là, il y a un débat et on va demander une argumentation. Et ce sujet-là, ensuite, on peut le repositionner sur d’autres thématiques. Par exemple, on va montrer la photo de Marine Le Pen et on va dire… Qu’en pensez-vous ? “Ah Monsieur, moi j’aime bien ce qu’elle a dit, sur le sujet des retraites, moi, j’aime bien ce qu’elle a dit, sur au contraire, moi, monsieur, j’aime pas du tout ses opinions”. Et donc là, on va voir, et je vais vous écouter. D’abord, dites-moi qui est cette personne ? C’est une ancienne candidate à l’élection présidentielle. Marine Le Pen est aujourd’hui députée de la nation. Marine Le Pen est membre du Rassemblement National. Donc, ça, ce sont des faits. Ensuite, on peut dire, on n’est d’accord ou pas d’accord avec ses propositions. On peut dire que Marine Le Pen fait peur, qu’elle est dangereuse pour la démocratie. Ça, c’est une opinion. Et donc, ensuite, si on avance cette opinion, dans un débat, on avance des arguments, on étaye, on donne des faits, justement. Pourquoi fait-elle peur ? Pourquoi est-elle dangereuse pour la démocratie ? Parce que ces propositions, par exemple, peuvent être de nature à réduire des droits humains, par exemple. Et donc, on va, comme ça, amener cette distinction entre les faits et les opinions. Pour un débat, on se met d’accord sur les faits. Ensuite, on débat des opinions. Je suis un partisan du frottement des idées, du débat. Quand il est argumenté, est étayé par des faits. Et c’est notamment le cas sur le sujet du réchauffement climatique, qui est aussi un sujet qu’on aborde souvent, lors de ces ateliers ou de ces séances.
– Les faits d’abord, les opinions, elles peuvent diverger, les faits, par définition non, alors ils peuvent évoluer, selon la connaissance qu’en ont les journalistes au moment précis. Mais il n’y a pas de lectures différentes des faits, lorsque c’est le cas, c’est donc une opinion. En matière d’information, il y a ce qui est écrit, ce qui est dit et ce qui est montré… On parle souvent du pouvoir de l’image, dans la diffusion de fausses informations… alors, tu travailles en télévision et tu es donc dans cette association en contact de nombreux jeunes, que dis-tu aux jeunes pour les aider à développer un regard critique sur des photos et des vidéos qu’ils croisent en ligne ?
– Une information, un message, je dirais, un message à caractère informatif, il est beaucoup. Il se diffuse beaucoup plus vite, beaucoup plus fort, s’il est accompagné d’une image, d’une image animée par ailleurs. Ce qu’on voit se développer et qu’on a vu se développer récemment, les fameux GIFs, les émojis, voilà, parce qu’en fait, on transfère beaucoup plus facilement une photo qu’un message texte, c’est comme ça. Et on s’en est pas rendu compte, avec l’arrivée des réseaux sociaux, l’utilisation de la photographie dans la presse écrite montre bien que voilà très tôt ce secteur de l’information a compris, le fameux poids des mots, le choc des photos, pour interpeller sur certains sujets. Donc, voilà, l’éducation à l’image, c’est important parce que, en effet, l’œil, c’est normal, est attiré d’abord et avant tout par une image, qu’elle soit figée ou animée. Et donc, dans les ateliers d’éducation aux médias qu’on fait, on montre par exemple un post publié sur le réseau social X (ex-Twitter) où on voit Kylian Mbappé tenir un maillot du Real de Madrid. Et donc, on va laisser un petit peu la conversation se faire autour de cette photo. Parce que vous en pensez, oui, monsieur, c’est vrai, il joue au Real de Madrid, tout ça. Et je dis, cette photo, c’est un fake ! “Non, monsieur, il est au Real de Madrid”. Oui, mais en fait, regardez attentivement cette image de quand elle date, qui l’a postée. Et donc, là, l’œil rentre, je dirais, dans l’image, et va chercher des détails. Et ne s’arrête pas au premier plan, mais va chercher le second plan, le détail qui va, en fait, amener énormément d’informations et remettre en question la première impression que l’on a eue. Oui, en fait, il s’agit d’un fake, parce que cette image a été publiée et on voit la date de publication en 2022, parce que cette image à l’époque, elle a été publiée, non pas parce que Kylian Mbappé avait signé au Real de Madrid, mais parce qu’un supporteur du Real de Madrid souhaitait que le joueur parisien rejoigne le club espagnol… C’était complètement une autre histoire. Et donc, il faut faire cette éducation à l’image, aux images, il faut vivre avec son temps. Les images, c’est un fait, on ne peut plus s’en passer. Aujourd’hui, il se passe quoi que ce soit dans la rue, un accident. Tout le monde va sortir un smartphone, faire des photos et des vidéos, les poster sur ces réseaux. dans un concert avec son chanteur préféré. on sort son téléphone portable pour filmer la scène, capturer ces instants. Et donc, on a besoin, du coup, d’appréhender ça. C’est pour cette raison que Lumières sur l’info a lancé l’an dernier, le concours “Trop Mytho”, qui est un concours de fact-checking, de vérification. Je dirais, mais à partir de publications, postées sur les réseaux. On demande aux adolescents de choisir un post sur YouTube, sur TikTok, sur Instagram. Et puis, d’appliquer une vérification très précise en se posant des questions que les journalistes se posent au quotidien. Qui a posté cette publication pour dire quoi ? Quand est-ce qu’elle a été postée ? Que disent les images, que disent les mots précisément ? Etc., et on demande aux jeunes de faire à leur tour une vidéo pour raconter en vidéo, ou en podcast, d’ailleurs, pour la nouvelle édition de ce concours, pour raconter les faits, tels qu’ils devraient être présentés, remettre les faits à l’endroit.
– Lumières sur l’info, c’est une association qui est née en 2017. Elle est composée donc de professionnels de l’information, des journalistes. Elle s’adresse spécifiquement aux jeunes, on l’a mis un compris, et vous proposez de leur donner des outils pour naviguer dans ce chaos de l’information. Au sens, là, l’information ne veut pas dire, dans notre conversation, que des contenus produis par des journalistes, mais tout ce qu’on trouve, et qui nous parvient comme une information. Pour cela, justement, vous parlez de sujets très concrets et des infos qui intéressent les jeunes. C’est une approche importante pour vous de partir de leurs centres d’intérêts ?
– Oui, Lumières sur l’info, à la spécificité d’être une association réunissant des journalistes de divers horizons, de la presse écrite, de la radio, de la télé, du web, des journalistes qui travaillent dans des grands médias, j’en fais partie (TF1), mais aussi des journalistes pigistes, des demandeurs d’emploi, des journalistes intermittents et différents métiers. Voilà, un rédacteur, un journaliste reporter d’images, un journaliste, fact checker, vérificateur, des chefs d’édition, des rédacteurs en chef, etc. Pour représenter la diversité de la profession, c’est important pour nous de ne pas être le représentant d’un métier, d’un média. On a la chance de vivre en France et d’avoir ce pluralisme de l’information. On doit l’incarner et Lumières sur l’info, autant que possible l’incarner. Ensuite, quand on intervient auprès de jeunes ou d’adultes dans des ateliers, dans des séances, des rencontres, chacun raconte son expérience et c’est ça aussi qui fait la richesse de l’association, c’est qu’on vient avec notre bagage et on le partage avec les coulisses d’un reportage qu’on a effectué avec la vie de la rédaction dans laquelle on travaille ou dans laquelle on a travaillé. Finalement, les interventions des journalistes ne se ressemblent pas toutes. Elles ont chacune leur spécificité. Ensuite, il y a un tronc commun à Lumières sur l’info. On aime partir d’informations qui nous sont proposées par notre public cible. Et donc, moi, quand j’interviens, par exemple, avec une classe d’adolescents, de collégien ou lycéens, je pose la question : Pour vous, c’est quoi le fait important dans votre actu ? Me dites pas… Voilà, le Hezbollah, le Hamas. Me dites pas à Volodymyr Zelensky, ou même si ça peut vous intéresser. Mais moi, je suis aussi curieux d’une info sur un nouveau clash entre des stars de la télé-réalité. Je suis toujours curieux d’infos sur la sortie d’un jeu vidéo très attendu par une communauté de joueurs. Je suis intéressé éventuellement par une info sur la sortie d’un nouvel album ou d’un groupe de musiciens, etc., etc. Et ensuite, ensemble sur leurs réseaux sociaux, on va leur demander d’aller chercher ces infos dans leurs centres d’intérêts et de faire ce petit travail ensuite de vérification. Donc, partir des infos qui nous sont proposées, ça nous permet de mieux capter leur attention. Et puis, c’est la porte d’entrée. Finalement, la vérification, parce que pour vérifier des faits qui vous concernent au quotidien, pour que vous ne soyez pas trompé sur ce centre d’intérêt, sur les sujets que vous pouvez aborder entre copains, entre copines, dans la cour de récré, etc., ou à la machine à café. Donc, voilà, on sait très bien que voilà, quand on a 12, 13, 14 ans, on ne va pas forcément, ou même quasiment jamais, acheter le journal Libération, Le monde ou le Figaro. On ne va même pas forcément regarder le journal de 20 heures à France 2 ou à TF1. Mais c’est pas grave, ça, c’est pas un sujet pour nous. Peu importe la façon dont on s’informe. On peut très bien s’informer. Uniquement, en ouvrant son réseau social, Instagram ou TikTok. Mais ça va demander sans doute un effort conséquent pour faire le tri. Filtrer les contenus dignes d’intérêt, les contenus vérifiés et c’est cette remise en question, ce questionnement. Voilà, on essaye de partager au public que l’on croise.
– Ton association avance sur 2 jambes. D’un côté, vous allez au-devant des publics, sur les écrans, vous réalisez, on l’entendait, des ateliers avec vos journalistes dans les salles des cours des collèges ou des lycées. Mais vous avez décidé d’aller plus loin ! Lumières sur l’info a décidé de créer un camion Itinérant. C’est le bien-nommé News Truck. Comment cette idée est née ? Dans un premier temps, raconte-nous ce qu’on va y trouver ?
– Le camion, c’est effectivement un food truck, c’est un camion de marché, avec son auvent qui va s’ouvrir et qui va nous permettre d’aller à la rencontre de publics parfois éloignés de l’actualité. En tous les cas, de publics, qui ne nous attendent pas, ne nous ont pas donné rendez-vous ou ne vont pas forcément aller dans une salle de classe. Là où on a l’habitude de faire des ateliers d’éducation médias ou dans une salle de la mairie. Là, on a parfois l’habitude de faire des conférences. On va garer ce camion, justement, sur une place de marché devant un centre commercial sur une aire d’autoroute, devant une maison de quartier, aux pieds d’un immeuble, d’un centre social. Et ce camion, il est tout jaune, il va attirer l’œil, il va interpeller, en tous les cas, c’est ce qu’on espère, et il va inviter à l’échange, à la rencontre, à la discussion, on va proposer du café, proposer, peut-être, des petits jus, et on va inviter à cet échange autour de sujets d’actualité. On va proposer une revue que presse dans ce camion. On va proposer une petite exposition sur l’histoire de la désinformation. On va proposer des vidéos, qui pourront être regardées sur des tablettes, des vidéos que l’on produit, nous, à “Lumières”, ou que d’autres partenaires produisent. Et ce camion, il va se balader en Île-de-France et dans l’Oise, pendant une vingtaine de jours, une quinzaine d’étapes, au total. Et l’idée, c’est de rendre visible la sensibilisation à la désinformation. Rendre visibles les actions d’éducation en médias, trop souvent quand on intervient dans une salle de classe ou dans une mairie. Personne ne le sait. Là, finalement, un peu à l’image d’une caravane, du Tour de France, ou de la caravane du cirque. Vous savez qui va de village en village et qui s’annonce. Et bien là, on sera visible. Et ça va susciter ce qu’on souhaite et ce qu’on recherche. De l’intérêt, du questionnement, et peut-être amener des publics demain à regarder nos contenus ensuite à la maison, appeler l’association ou une autre association ou le journal d’à côté en disant « Bah tiens » est-ce que je peux organiser une rencontre avec un journaliste. Donc voilà, c’est comme ça que nous est venue cette idée-là.
– Une quinzaine de localités, donc en est Ile-de-France et Oise, entre le 1ᵉʳ et le 19 novembre 2024. Alors quelques noms de lieux parcourus Villiers Le bel, le Kremlin-Bicêtre, Paris, Clichy, Saint-Ouen sur Seine… Comment avez-vous choisi les quartiers, les villes sur lesquels stationner ce camion jaune ?
– Lumières sur l’info, depuis 2017, historiquement agit sur le territoire de la région, Île-de-France, on a, au fil du temps, noué des contacts, des partenariats, un peu privilégiés, avec certaines structures, certaines collectivités. On s’est appuyé sur ce relationnel pour imaginer les étapes, et puis après, on a aussi lancé des appels sur les réseaux à qui souhaitait accueillir, accueillir une étape du News Truck, ça s’est fait un petit peu comme ça. On conçoit cette tournée comme une expérimentation, c’est une opération inédite pour l’association. On va tester des lieux. Devant une gare, devant une mairie, devant un centre commercial. On organisera quand c’est possible, des temps en lien avec des structures, et quand on va garer le camion devant la médiathèque, c’est pour bénéficier du flux, devant cette structure, mais on en profitera pour rentrer aussi à un moment donné dans la médiathèque et organiser un temps d’échange avec des lecteurs, le public de cette médiathèque, ou avec la mairie si on se gare devant le bâtiment, dans une salle municipale. C’est à la fois dehors, mais aussi dedans. L’idée, c’est qu’on puisse reproduire cette tournée si on estime qu’elle est pertinente, si les villes étapes sont satisfaites, si les structures qui nous accueillent trouvent que ça a du sens de recommencer cette tournée l’an prochain, peut-être à une période de l’année plus propice au niveau de la météo… Je croise les doigts pour qu’il ne fasse pas trop froid qu’il ne pleuve pas trop ce mois de novembre. Mais voilà, pourquoi pas une grande tournée du News Truck, de Lille à Marseille, en passant par la Bretagne ou le centre de la France, pendant deux mois ou trois mois ! Mais ça, c’est un projet à venir.
– Des projets plein la tête ! Alors Lumières sur l’info intervient avec ses journalistes bénévoles, sur plusieurs terrains, on l’a compris. Il y a ce terrain.
– Pardon, Simon. C’est pas complètement exact.
– Ah. – Si je me permets de rectifier.
– C’est important de ne pas donner de mauvaises infos..!
– Non, Lumières sur l’info intervient avec des journalistes. Et donc, certains le font effectivement, à titre bénévole, en prenant sur leur temps. quand ils le peuvent. Et ensuite, l’association rémunère aussi. Les journalistes qui interviennent lors de séances, d’ateliers d’éducation aux médias, lors de l’animation de conférences. Et on estime, en fait, à Lumières sur l’info, que ce temps passé sur le terrain. Et bien, ça doit être un temps qui doit être rémunéré. Alors, on ne devient pas riche en faisant de l’éducation aux médias, mais cela doit être rémunéré parce que c’est un travail. La préparation, ça prend du temps. Et donc, voilà. La mission de l’association, c’est de trouver des financements pour permettre, eh bien, cette rétribution. Et c’est important parce que, sans cela, Lumières sur l’info n’a pas non plus la notoriété d’autres associations comme La Croix Rouge, comme Les restos du Cœur. Et le seul bénévolat ne nous permettrait pas d’assurer des ateliers, comme on le fait aujourd’hui. On a sensibilisé près de 2000 personnes en 2023. Donc, voilà, presque plus de 150 opérations. Donc, le bénévolat est utile, mais loin d’être suffisant pour permettre à une association comme la notre, de mener des actions régulièrement dans le temps et surtout d’augmenter son impact.
– Merci pour cette précision. Il y a un terrain immatériel sur lequel vous intervenez, mais bien réel, là aussi, cela se passe sur le numérique, Internet, les réseaux sociaux, Youtube, qui sont d’ailleurs des plateformes qui comptent beaucoup dans l’accès à l’information du public. Vous avez créé un média sur YouTube, Instagram et TikTok. Cette chaîne s’appelle « Trop Mytho ». Elle est incarnée par deux ados. Une enquêtrice, un enquêteur, qui s’appellent « Maïssa et Scotty ». Comment la chaîne « Trop Mytho » est-elle produite ? Alors en quelques mots, peux-tu nous raconter un peu les coulisses de la fabrique de vos propres contenus ?
– Oui, en fait, cette idée est venue parce qu’il fallait être présent là où sont présents les jeunes. C’est-à-dire présents sur les réseaux sociaux, les jeunes passent du temps sur leurs smartphones pour s’informer notamment, pour jouer, pour échanger, mais aussi pour aller chercher du contenu et il nous semblait pertinent d’être présent là où ils étaient parce que, voilà, on peut les toucher en classe, on peut les toucher dans des centres sociaux, dans des centres de loisirs, mais c’est bien aussi d’être présents sur les réseaux, là où ils sont. Donc une chaîne YouTube, un compte Instagram, une chaîne TikTok, où on crée du contenu avec effectivement nos deux ambassadeurs qu’on va appeler des influenceurs de Lumières sur l’info, Scotty et Maïssa, ce sont deux acteurs que l’on rémunère. On a organisé un casting, ils ne se connaissaient pas. Et en fait, à l’issue de ce processus de sélection, on a trouvé que ce duo fonctionnait parfaitement bien. Alors aujourd’hui, ils sont moins ados, ils sont presque devenus jeunes adultes mais ils continuent de participer avec nous à la création de ce contenu, de vérification, de vidéos, de fact checking, où ils remettent des faits à l’endroit. Voilà, les francs-maçons ne dirigent pas le monde, les juifs n’ont pas le nez crochu, et voilà, les vaccins du Covid ne transmettent pas de maladies. On ne devient pas stérile, en prenant la pilule du lendemain. Toutes ces questions, ce sont des questions que l’on entend dans les cours de récré quand on fait des interventions. Ce que j’aime, il s’agit d’en part, on fait avec eux un travail de vérification, d’enquête, et eux, ils le traduisent dans leur style sur des vidéos que l’on coupe produit avec une société de productions et bras production. Et l’idée, c’est de faire grandir cette communauté. C’est difficile d’exister sur les réseaux, mais c’est une façon d’avoir un impact en plus. Et puis ce sont des ressources que l’on peut utiliser ensuite nous, lors de nos ateliers sur le terrain, quand il y a un sujet qui vient, parce qu’on entend une petite réflexion sur les juifs, sur les formations, hop. On va chercher la vidéo de Scotty et de Maïssa et voilà, elle dure trois, quatre, cinq minutes, ça dépend. et voilà, elle dure trois, quatre, cinq minutes, ça dépend.
Et voilà, on a fait, par exemple, récemment une vidéo avec eux sur la guerre informationnelle au moment où, à la fois en Ukraine, mais aussi au Proche-Orient, il y avait énormément de messages de propagande, d’autres de fausses images d’attaques, de morts, etc. Et bien, on en a profité pour expliquer ce que c’était, voilà, ce brouillard informationnel en période de conflit, comment on pouvait éviter d’être trompé par des images, etc.
– Je rebondis juste sur le mot acteur. Pour qu’on soit bien clairs, acteurs, c’est parce qu’il vous fallait des interprètes de textes, mais ce sont des informations par définition, très vérifiées par vos journalistes.
– Oui, oui, oui, tout à fait. Tout à fait, c’est vrai qu’on a fait ce choix de solliciter des acteurs, parce qu’ils avaient d’emblée un jeu, ils étaient très à l’aise, face caméra, mais pour autant, ils étaient aussi ultra-engagés, intéressés par le projet. Et on le voit aujourd’hui, de plus en plus, à s’impliquer, à proposer des idées. Et voilà, et le travail de vérification, d’enquête, de documentation, il est fait par des journalistes professionnels, en lien avec Scotty et Maïssa, bien entendu. Mais voilà, ça nous semblait important de pouvoir, de pouvoir avoir cette expertise aussi, cette aisance face caméra dans la façon de dialoguer, etc.
– Ça, ça s’appelle, donc, Trop Mytho. C’est très suivi sur les réseaux sociaux, beaucoup de vues sur TikTok aussi, c’est impressionnant de voir comment, justement, le jeune public est intéressé par ces décryptages, ces vérifications, je vous mets toutes les informations dans la description, Damien Fleurot, journaliste et président de Lumières sur l’info, LumièreS avec un S, l’association qui lutte contre la désinformation. Et on l’a aussi entendu, on vous trouve assez facilement sur les réseaux sociaux à peu près tous ?
– Oui, oui, on essaye, c’est beaucoup de boulot, d’être présents. Donc, à la fois sur TikTok, où on a essayé d’être plus offensifs, ces derniers temps. Sur Instagram, sur YouTube, vous l’avez dit, notamment pour des formats un peu plus longs, avec des vidéos, qu’ensuite, qu’on va séquencer. Voilà, l’association, elle communique aussi sur LinkedIn, sur Twitter, on a un peu délaissé Facebook. On essaye d’être présents sur les différentes plateformes pour parler à notre communauté, au sens large, à la fois jeune, mais aussi moins jeune, à la fois des partenaires, à la fois des journalistes. Et voilà, c’est beaucoup de travail en termes d’organisation, communiquer, bien communiquer.
– Damien, merci d’être passé dans cette émission, merci d’être passé dans Soluble(s)!
– Merci, merci pour toutes ces questions. C’était très agréable comme échange. Et moi, j’aime toujours bien partager au maximum parce que, voilà, ces sujets d’éducation aux médias. La lutte contre la désinformation, elle concerne, bien entendu, des journalistes, parce qu’on a envie, et bien que demain notre travail soit toujours vu, écouté, entendu, lu. Mais parce que ça traverse, bien entendu, toute la société, tous les secteurs de la société et surtout à tous les âges, donc, voilà, pourquoi ‘Lumières’ milite, pour une éducation populaire, aux médias, tout au long de la vie.
– Voilà, c’est la fin de cet épisode, s’il vous a plu, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous. Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site Internet. csoluble.media
À bientôt !
Propos recueillis par Simon Icard.
[Musique]
POUR ALLER PLUS LOIN
Visiter le site : lumieres.info
Suivre “TropMytho” sur YouTube.
TIMECODES
01:10 Le parcours de Damien Fleurot
04:01 Ça sert à quoi de bien s’informer ?
07:15 Information ≠ opinion
12:19 Photos, vidéos : attention aux images
16:55 Intéresser les gens pour les sensibiliser
21:28 L’idée du NewsTruck
28:52 TropMytho, une chaîne pour éduquer aux médias sur les réseaux sociaux
33:09 Merci à Damien !
Fin
_
Ecouter aussi
Comment naviguer dans le chaos de l’info ? Avec Benoît Raphaël
Vous préférez garder le contact avec Soluble(s) grâce à Google Actualités ?
C’est possible >> SUIVRE <<