Parentalité numérique : 10 questions-réponses avec François Saltiel pour faire la paix avec les écrans

Cet article résume sous forme de 10 questions-réponses un épisode de Soluble(s) avec François Saltiel, journaliste spécialiste du numérique sur France Culture et co-auteur de « Faire la paix avec nos écrans » (Flammarion). Découvrez ses solutions concrètes pour retrouver un rapport apaisé et joyeux aux écrans en famille.

📝 Article Source

📄 Transcription

1. Quel est le défi inédit de la parentalité numérique ?

« On est la première génération de parents à devoir être confrontés au numérique qui a bouleversé la sphère familiale », explique François Saltiel. Avec 9,4 écrans par foyer en moyenne en France (baromètre du numérique 2025), le défi est sans précédent : inventer un métier de parent numérique, entre bricolage et recherche collective de solutions.

2. Que signifie « société amphinétique » ?

François Saltiel et Virginie Sassoon proposent ce néologisme formé sur « amphi » qui signifie « des deux côtés » et « nétique » en évocation du numérique, pour décrire notre réalité : « on alterne moments connectés, moments déconnectés », sans rupture nette entre vie physique et vie numérique. Le numérique traverse désormais tous les espaces et toutes les émotions du quotidien.

3. Qu’est-ce que la « technoférence » ?

La technoférence désigne l’interférence de la technologie dans les interactions humaines, au-delà du seul cadre familial. « La technoférence, c’est quand le téléphone ou la tablette coupe une interaction : on perd le lien direct avec son enfant, parfois juste pour une notification », précise François Saltiel. Ce phénomène touche toutes les relations sociales : collègues, amis, couples.

4. Quelle est la méthode P.L.A.Y. ?

P.L.A.Y. est la réponse familiale développée par François Saltiel et Virginie Sassoon (directrice adjointe du CLEMI) : Partager (dialoguer, accompagner), Libérer (organiser des moments sans écran), Accueillir (reconnaître les émotions), Yes or No (poser des limites négociables). Une routine vécue au quotidien, pas une théorie.

5. Pourquoi les « contrats familiaux » fonctionnent-ils ?

« On a mis en place des contrats qui engagent tout le monde, parce que ce n’est pas toi contre les écrans, c’est toi et moi contre l’écran », explique François Saltiel. La réciprocité parent-enfant est la clé : chacun s’engage, y compris les adultes.

6. La déconnexion doit-elle être « joyeuse » ?

Absolument. « La déconnexion doit être joyeuse. Si ce n’est pas désiré, ça ne marche pas », insiste François Saltiel. Il faut proposer des alternatives attractives, sinon le « sans écran » devient une punition vouée à l’échec.

7. Qu’est-ce que le JOMO ?

Face au FOMO (peur de manquer), François Saltiel promeut le « Joy Of Missing Out » : cultiver le plaisir de rater l’accessoire pour profiter pleinement du présent. « Si le « sans écran » ressemble à une punition, ça ne tient pas. Il faut y trouver de la joie. »

8. Pourquoi sommes-nous « captifs des GAFAM » ?

« Pour son numéro de téléphone, on a pu le porter d’un opérateur à l’autre. Pour nos amis et nos archives sur les réseaux, tout reste prisonnier de la plateforme. On est captifs des GAFAM ! », cela tient de leur modèle économique historique rappelle François Saltiel. L’interopérabilité — le droit de transférer ses données d’une plateforme à l’autre — reste un combat politique et citoyen.

9. Que change le Digital Markets Act européen ?

Depuis 2025, ce règlement impose aux messageries comme WhatsApp de s’ouvrir aux plateformes concurrentes. Mais la route reste longue pour généraliser ce droit au transfert de toutes les données personnelles et sociales.

10. Pourquoi l’EMI est-elle indispensable ?

L’éducation aux médias et à l’information (EMI) est au cœur du livre co-écrit avec Virginie Sassoon, directrice adjointe du CLEMI. « L’esprit critique, ça se cultive, ça se transmet, ça s’enseigne », rappelle François Saltiel. C’est un levier d’autonomie citoyenne, indispensable pour choisir, trier et dialoguer autour des écrans en famille comme à l’école.

Simon Icard (résumé avec IA)

Portrait posé de François Saltiel et Virginie Sasson assis ensemble. Le texte en surimpression les identifie comme les auteurs du livre « Faire la paix avec nos écrans », paru aux éditions Flammarion.

Photo copyright : DR.

POUR ALLER PLUS LOIN

Lire :

« Faire la paix avec nos écrans », Flammarion https://editions.flammarion.com/faire-la-paix-avec-nos-ecrans/9782080476845

Écouter : François Saltiel à la radio sur France Culture ou dans l’application Radio France :

8h50 : “Un monde connecté” chaque matin
“La Fabrique de l’information”, le vendredi à 14h

Et aussi :

Le site du Centre pour l’éducation aux médias et à l’information (CLEMI)
Le Baromètre du Numérique 2025 (Credoc, en PDF)

TIMECODES

00:00 Introduction : Faire la paix avec nos écrans
01:55 Le parcours de François Saltiel : le numérique comme fenêtre sur le monde
03:39 Le smartphone : l’écran amplificateur qui a tout bouleversé
04:49 La réalité des parents : osciller entre « gendarme » et « dealer »
06:23 La « parentalité numérique » : une génération de pionniers
08:29 Sentiment d’impuissance et fin du mythe du « monde virtuel »
11:37 Une clé du dialogue : « Comment s’est passée ta journée en ligne ?
12:46 La méthode P.L.A.Y. (Partager, Libérer, Accueillir, Yes/No)
16:17 La captivité numérique : comprendre le piège des données
18: 57 L’interopérabilité : pourquoi on ne peut pas emmener ses abonnés avec soi
20:09 L’éducation aux médias : notre seule véritable arme
22:21 « La Fabrique de l’information » sur France Culture
23:23 Merci à François Saltiel
24:48 Fin

Repères officiels et statistiques sur les écrans (novembre 2025)

Enfant 3-5 ans : 1 h 22 par jour de temps d’écran (Santé publique France, 2025)
Enfant 9-11 ans : 2 h 33 par jour (Santé publique France, 2025)
Enfants 6-17 ans : plus de 4 h 11 par jour hors temps scolaire
Adultes français : 4 h 36 par jour devant un écran, tous supports confondus (Baromètre du Numérique 2025)
Nouveau carnet de santé depuis janvier 2025 :
- Pas d’écran avant 3 ans
- Usage exceptionnel et accompagné entre 3-6 ans
- Pas de smartphone connecté avant 13 ans
- Pas d’accès seul aux réseaux sociaux avant 15 ans (inscription supervisée à 13 ans)
Vers un nouvelle loi ? Le 18 novembre 2025, la députée Laure Miller (Renaissance) a déposé une proposition de loi visant à l’interdiction des réseaux sociaux aux moins de 15 ans, un couvre-feu numérique 22h-8h pour les 15-18 ans. Elle fait suite aux conclusions alarmantes d’une commission d’enquête parlementaire sur TikTok concernant l’impact sur la santé mentale des mineurs.