Sur une planète qui franchit des limites écologiques critiques, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour dépasser la logique traditionnelle de « réduction d’impact » et exiger des entreprises qu’elles deviennent de véritables moteurs de régénération du vivant et d’innovation économique.
Pour Soluble(s), Fabrice Bonnifet, président de l’association GenAct et du Collège des Directeurs du Développement Durable (C3D), explore une idée qui tranche avec le discours habituel : transformer les entreprises en forces régénératrices, capables de créer de la richesse tout en restaurant la nature.

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Transcription (automatisée)
>> Lire l’article source : Climat, biodiversité : Les entreprises peuvent-elles vraiment faire partie de la solution ?
L’entreprise, du problème à la solution ?
– Simon Icard : Bienvenue dans un nouvel épisode de Soluble(s). Aujourd’hui, je me demande comment les entreprises peuvent faire partie de la solution et non plus seulement du problème… Je veux parler de leur impact sur le climat et la biodiversité. Et vous allez le voir, mon invité travaille à un changement complet de leur modèle économique.
Bonjour Fabrice Bonnifet.
– Fabrice Bonnifet : Bonjour Simon, bonjour.
– Tu es une voix et un visage familier pour celles et ceux qui s’intéressent depuis des années au développement durable et à la vie des entreprises, souvent abordées en France sous l’acronyme de RSE, trois lettres pour responsabilité sociale des entreprises. Tu es d’ailleurs le président du Collège des Directeurs du Développement Durable.
C’est le nom d’un poste de direction qui figure en bonne place dans les organigrammes de grands groupes et des grandes entreprises. Mais tu as décidé d’aller plus loin et de t’engager, non pas pour limiter leur empreinte, mais pour que les entreprises soient à l’origine d’impacts positifs.
C’est un sujet essentiel. Quand on sait que 84 % des émissions de gaz à effet de serre sont émises en France par la production de biens et de services. Alors, je le dis tout de suite, ça comprend aussi l’agriculture, mais on comprend l’enjeu, et que la moitié, la moitié de la richesse mondiale créée chaque année dépend directement de la nature. Alors, tu nous diras pourquoi tu penses qu’il faut changer la façon que les entreprises et les sociétés ont de produire et créer de la richesse ? On va explorer ton objectif de voir advenir des entreprises qui deviennent régénératives. C’est d’ailleurs la mission de l’association GenAct que tu présides. On va tout savoir, tout comprendre de cette approche qui a déjà séduit de grands noms en France. Le tout avec en toile de fond une notion alarmante, celle des limites planétaires.
Mais d’abord, on veut en savoir plus sur toi, sur ton parcours.
Parle-nous un peu de toi. Comment tu es tombé dans cette marmite verte au cœur des grandes entreprises françaises ?
Un parcours « banal » au cœur des grandes entreprises
– Ça a très peu d’importance en réalité, parce que c’est un parcours ultra-banal. J’ai été, j’ai travaillé très très longtemps dans une grande entreprise industrielle diversifiée et on m’a donné l’opportunité de prendre ce poste à une époque où il n’y avait pas de… où ce profil, cette fonction n’existait pas, tout simplement. C’était à la sortie du Grenelle de l’environnement, qui a initié, en fait, en France, et on peut le dire dans beaucoup de pays dans le monde, cette notion de RSE, avec ce que Nicolas Hulot avait imposé aux candidats de l’élection de 2007, de mettre en place, une fois élu, une concertation avec les parties prenantes pour regarder comment on pourrait mettre, faire, faire émerger une nouvelle économie plus respectueuse de, on n’appelait pas ça les limites planétaires à l’époque, mais plus respectueux de l’environnement et du social.
Ça s’appelait le Grenelle de l’environnement, et c’est à cette époque-là que les grandes entreprises se sont dotées de fonctions développement durable dans un premier temps et RSE dans un deuxième temps, lorsque la norme ISO 26 000 a été formalisée en 2010. Et c’est à cette époque-là, d’ailleurs que le, que le Collège des directeurs Développement Durable a été créé. Donc, juste au moment du Grenelle en 2007, quelque temps avant.
Et c’est donc à ce moment-là que les entreprises ont commencé à initier des feuilles de route, des démarches RSE. Moi, j’étais l’un des premiers nommés à cette fonction par la direction générale de l’entreprise qui m’employait à l’époque. Et j’ai appris en marchant parce qu’il n’y avait pas de formation académique sur ce sur ce sujet. Et comme c’était passionnant, j’y suis.
J’y suis resté parce que ça donne beaucoup de sens à son action du quotidien de travailler sur ces sujets. Donc oui, c’est d’une banalité affligeante. Il n’y a pas, il n’y a pas trop à s’attarder sur, sur la façon dont j’y suis arrivé. J’y suis arrivé en fait un peu par hasard,
– Un peu par hasard, et donc il y a une vingtaine d’années.
Mais ça situe bien l’échelle de temps dans laquelle on va parler, parce qu’il y a eu des évolutions, évidemment, mais on sent une accélération à venir et nécessaire en matière d’écologie, de développement durable. Et c’est bien dans les entreprises aussi que les choses vont se jouer.
Alors, on ne va pas se mentir, on est dans le temps de l’urgence climatique. Le monde et de nombreux États, dont la France et l’Europe, se sont engagés dans le but de contenir le réchauffement climatique sous la barre des plus deux degrés par rapport à l’ère préindustrielle.
Une autre crise existe, on en parle moins, c’est la crise de la biodiversité. 69 % des espèces de vertébrés ont disparu en 50 ans, selon le WWF, entre les années 70 et 2018. Et puis les sols sont dégradés à l’échelle mondiale. Ça, c’est pour le tableau qu’on a tous plus ou moins en tête. Mais pour bien comprendre la suite de cet épisode, je voudrais que tu nous expliques en quelques mots la notion de “limites planétaires” et surtout pourquoi elle est au cœur de ta réflexion pour faire évoluer les modèles économiques des entreprises.
Les limites planétaires : le cœur du problème économique
– C’est une gageure d’expliquer ça en deux minutes..! Mais pour simplifier, sans dénaturer, on peut dire que l’humanité vit en survitesse par rapport à la capacité des services écosystémiques et au système Terre en général de régénérer les ressources qui sont utilisées par le système économique. Tout simplement parce qu’on est 8 milliards sur cette planète, parce qu’il y a des milliards de machines qui consomment de l’énergie, parce qu’on est sur une approche extractiviste.
Il y a une approche linéaire de l’économie où on a besoin d’utiliser toujours plus de matières premières pour fabriquer des produits, avec bien sûr des conséquences délétères sur, sur l’environnement, parce que il n’y a pas de business qui a.. aucun…
Il y a aucun business aujourd’hui, aucune entreprise qui peut et qui arrivera dans les années qui viennent à produire sans impact du tout.
C’est juste impossible.
Toute activité humaine génère des impacts. Alors, il n’est pas, il n’est pas… On peut générer des impacts positifs et négatifs, positifs forcément, parce que ça crée de la richesse économique négative, parce que c’est les…
C’est la variable d’ajustement de, hélas, de l’économie aujourd’hui. Variable d’ajustement. Pourquoi ? Parce que dans nos systèmes aujourd’hui, on compte ce qu’on gagne par l’exploitation du vivant, par l’exploitation de la nature, mais on compte pas ce qu’on doit pour le restaurer. Parce que dans les systèmes comptables, il y a pas d’obligation de restaurer les ressources qui sont gratuites dans la nature. Et en fait, une entreprise, c’est ni plus ni moins qu’une, qu’une, qu’une, qu’un process, un process pour exploiter des… la nature et des ressources qu’elles n’ont pas payées. Donc c’est ça en fait le cœur du problème.
On utilise, on transforme, on utilise des matières premières et ça, ça génère des externalités négatives, ça génère des externalités qui sont des pollutions dans l’eau, dans l’air, dans, dans, dans le sol qui… Donc, le sujet, c’est bien sûr d’essayer d’en produire le moins possible d’externalités négatives, donc de polluer le moins possible.
De la RSE à l’économie régénérative : « réparer et non plus seulement limiter »
Donc ça, c’est l’approche RSE classique, d’améliorer la, la, la capacité à produire le plus, le moins sale possible, parce que j’allais dire plus propre.
C’est pas le moins sale possible, mais on sait maintenant que ça ne suffira pas.
C’est-à-dire qu’en fait, bien sûr qu’il faut diminuer les pressions sur les ressources, c’est, c’est une évidence, mais il va falloir aussi que dans les process industriels, on mette en place des étages techniques pour restaurer, régénérer, préserver les services écosystémiques dont on dépend pour faire fonctionner la machine économique.
Et ça, ça, c’est nouveau. Par contre, si on veut, pour que, in fine, le bilan net de l’entreprise soit bien sûr positif, c’est-à-dire que l’entreprise devra pouvoir démontrer que la dette environnementale contractée dans le cadre de son activité économique va être remboursée et largement remboursé par le fait qu’elle va mettre en place des tâches techniques qui vont lui permettre d’attester qu’elle régénère le capital naturel, c’est-à-dire quoi régénérer.
Si l’entreprise émet du CO2 (et les entreprises émettent du CO2). Donc bien sûr qu’il faut en émettre moins dans les systèmes techniques pour en émettre le moins possible, mais il y en aura toujours des émissions dites résiduelles. Et donc ces émissions-là, eh bien, il faudra que l’entreprise mette en place des programmes pour restaurer les puits de carbone, par exemple, et que ces puits de carbone capturent plus de carbone que les émissions résiduelles de l’entreprise pour être un carbone positif. Et c’est pareil pour toutes les matières premières de base. Je coupe des arbres pour faire pour mon business. Dont acte. Oui, un charpentier aura toujours besoin de couper des arbres. Est-ce qu’il s’est assuré que l’entreprise, auquel, auprès duquel elle s’approvisionne, a fait en sorte qu’il y ait.. non pas planté un arbre.
Quand j’en coupe un, j’en plante un. Ça, c’est une connerie, évidemment, parce qu’évidemment on coupe un arbre adulte et on en plante un, un jeune arbre. Donc c’est en termes de biomasse, c’est pas du tout équilibré.
Par contre, il faut que la gestion globale du parc dans lequel il va s’approvisionner fasse que la biomasse qui est produite par ce parc de production d’arbres, eh bien, augmente plus vite, bien plus vite qu’autrement, reste à minima stable, en tout cas que la planète est ronde. Il y aura forcément des limites là aussi, mais en tout cas que que le volume en biomasse ne baisse pas et que là, ce qu’on prélève est compensé par l’augmentation naturelle de la biomasse.
C’est pareil pour le cycle de l’eau. C’est pareil pour les métaux. Les métaux, il faut en extraire de moins en moins et donc renvoyer, je dis bien renvoyer et ou recycler si le réemploi n’est pas possible. Mais si le réemploi qui est prioritaire de manière à ce que par différentes, différents moyens techniques, on arrive, et c’est le but du jeu des entreprises à visée régénérative, à restaurer le plus possible le “capital nature” pour que les activités humaines arrêtent donc de spolier, de, d’être “écocidaires” vis-à-vis des écosystèmes et de continuer. Donc dans la destruction, la destruction de la nature. Et donc c’est ça qu’il faut arriver à faire. Donc le but, c’est pas de, de faire toujours un peu mieux hein, le but c’est vraiment d’aller vers cette visée régénérative. Et heureusement, c’est possible. Il y a des modèles économiques aujourd’hui qui permettent de faire ça.
Deux conditions pour une révolution : raison d’être et fin du modèle linéaire
– Alors oui, déjà avec beaucoup de détails que tu nous donnes, on comprend que c’est, c’est une révolution dans l’approche, parce qu’on n’est pas dans des entreprises qui ont.. qui ont spécialement été créées pour ça, même si ça peut être le cas.
On est aussi dans la volonté de transformer des entreprises, des entreprises existantes qui sont sur des modèles classiques. Tu travailles dans l’univers de la RSE, on le disait depuis une vingtaine d’années. Qu’est-ce qui oppose la RSE classique à cette volonté d’aller plus loin ? Donc c’est de l’intégrer dans le juridique, dans l’économique même, dans le droit, de façon opérationnelle ? Comment ça se concrétise ?
– Oui, il y a, il y a plusieurs. Il y a plusieurs conditions pour arriver à mettre en place cette approche, parce que c’est, c’est, c’est complètement orthogonal par rapport à l’approche que l’on connaît aujourd’hui, et c’est pour ça que c’est compliqué, et c’est pour ça qu’il va falloir une force d’âme considérable pour les leaders qui vont accepter de l’utiliser, c’est d’utiliser cette, cette nouvelle façon de créer la valeur économique sans détruire la valeur écologique et sociale. Et donc les conditions sont les suivantes. Première.
La première condition, évidemment, c’est d’interroger la raison d’être de l’entreprise. Donc le but, ce n’est pas de produire mieux des choses qui ne devraient plus exister. Donc, il y a tout un tas de produits aujourd’hui. On ne pourra pas produire l’essentiel, produire mieux, l’essentiel et produire mieux le non-essentiel. Il n’y a pas suffisamment de capacités aujourd’hui en ressources pour pouvoir arriver à faire les.. à faire les deux choses en même temps. Donc l’entreprise doit s’interroger sur son utilité, son utilité sociale et sur le fait que est-ce que les produits qu’elle fabrique, si elle ne les fabriquait pas, qu’est-ce que ça changerait pour l’humanité ?
Voilà, je ne fais pas de dessin, mais il y a tout un tout un tas de trucs aujourd’hui qu’on fait, qu’on fabrique qui, qui, qui n’ont pas une utilité sociale vraiment avérée ou qui ne profitent qu’à une toute petite partie, à une frange de la population. Et, et ça, c’est, c’est c’est le contraire de… le contraire de l’inclusivité. Aujourd’hui, il faut savoir que ce sont les populations les plus riches qui sont aujourd’hui les plus, les plus… qui participent le plus en fait à la, à la pollution atmosphérique et la pollution au carbone et la pollution en matières premières, etc. Et les produits qui sont associés.
Les services qui sont associés à ces modes de vie sont souvent superfétatoires et n’améliorent pas foncièrement la qualité de vie de ces gens-là et au contraire participent à la destruction de la qualité de vie, de, de, de, d’une majorité d’autres.
Donc la raison d’être est vraiment un des, euh, des leviers à activer tout de suite. L’Entreprise doit s’interroger sur la nature, en fait, de ce qu’elle fabrique.
Est-ce que c’est utile ou pas utile pour les parties prenantes, pour les clients bien sûr, mais surtout, est-ce que les parties prenantes non contractuelles ont été consultées par rapport à la fabrication de ces produits ? Et si elles l’ont été, quelles sont les recommandations que ces parties prenantes non contractuelles ont réalisées ? Est-ce que la licence de, de, de ces entreprises-là peut être maintenue ou pas ?
Ça, c’est une première condition. Il y a une deuxième condition, c’est d’arrêter, bien sûr, l’approche linéaire.
Donc l’approche linéaire, c’est celle qui consiste à extraire, produire, vendre, utiliser, jeter. Bon, ça, ça concerne 99 % des entreprises aujourd’hui, et c’est une approche qui est, bien sûr, sur une planète qui est ronde, qui n’est pas durable, parce que, même si on peut admettre que la planète est très grassouillette en ressources et qu’il y a encore énormément de métaux, de pétrole, de gaz et de charbon, etc, les stocks ne sont pas infinis.
Et surtout, comme il n’y a pas de recyclabilité ou quasiment pas par rapport à ce qu’on extrait, par rapport à ce qu’on va récupérer en fin de vie des produits, et même cette recyclabilité tend à baisser au fil du temps, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer ou croire ou penser. Et bien cette approche, cette approche linéaire qui est très dispendieuse en énergie grise pour aller fabriquer des produits et les refabriquer en permanence parce que les industriels ont tout intérêt à ce que les produits ne durent pas très très longtemps.
Donc forcément, c’est à chaque fois une pression exercée sur la terre, sur les ressources pour refabriquer toujours les mêmes générations de produits, avec des, avec des innovations qui sont souvent dérisoires, mais qui servent de prétexte à la re-fabrication. Et donc avec un marketing.
Posséder moins pour jouir de tout : l’économie permacirculaire
– Les exemples. Je t’interromps pour. Pour aller sur le concret, comme tu dis là, sur. Par exemple, pour les produits de mode, les produits, on a tous en tête ces vêtements qu’on consomme beaucoup, peut-être plus que de raison, mais ça concerne tous les produits, toutes les entreprises selon toi ou certains?
– Bien sûr, Mais bien sûr, ça concerne toutes les entreprises sans, il n’y a pas d’exception là-dessus. Et donc cette approche linéaire et donc et donc à bannir et et doit être remplacée par une approche dite “permacirculaire” basée sur l’économie de la fonctionnalité. Donc l’objectif, c’est le, oui.
On aura toujours besoin de produits, on aura toujours besoin de machines. Et ça, personne ne veut renoncer à ce que, ce qu’on appelle le progrès technologique a apporté à l’humanité. C’est un bienfait et c’est tant mieux.
Mais il y a sans doute une autre façon de produire ces biens manufacturés, avec non plus une, une, une obsolescence programmée dans la conception du produit pour faire en sorte qu’il ait une durée de vie limitée et provoquer le rachat.
Ça, c’est l’approche d’aujourd’hui, dans une approche volumique où il faut fabriquer toujours plus de produits en vente, toujours plus chaque année.
La course au volume avec une base client qui doit augmenter parce que bien sûr, l’efficacité énergétique fait que l’intensité carbone et produit des produits s’améliore. Parce qu’il y a l’ultra-concurrence. Enfin, c’est, c’est là, c’est le système du marché classique tel que les économistes hétérodoxes incompétents continuent de faire perdurer dans, dans la tête des politiques. Mais par contre, ça, c’est très bien dans un monde infini.
Mais c’est juste impossible à maintenir dans la durée dans un monde fini. Et on est déjà, et on souffre aujourd’hui des premiers stigmates de nos actes, de notre inconséquence, notamment avec les premiers effets du changement climatique.
Et encore et encore, beaucoup plus grave, l’érosion de la biodiversité qui et qui a commencé il y a plus de 50 ans avec une vitesse complètement dingue vu qu’on est, comme tu l’as rappelé tout à l’heure, dans des taux de déplétion de la biodiversité qui sont, qui sont juste gigantesques, avec 70 % des vertébrés qui ont disparu en 50 ans.
Donc, pour aller vers une approche hyper bien circulaire, ça veut dire fabriquer beaucoup, beaucoup, beaucoup moins de produits, mais des produits bien plus robustes, évidemment, qui vont durer beaucoup plus longtemps, qui vont être réparables. Et ça, c’est tout à fait possible.
Les industriels savent le faire, il suffit de réguler pour que… Les obliger à faire ce type de produits, ne plus vendre les produits comme ils le font aujourd’hui, mais vendre l’usage des produits, parce que les produits sont structurellement sous-utilisés, là bien sûr, pas tous les produits. Mais une grande partie de ce qu’on fabrique aujourd’hui et si vous utilisez les mètres carrés des bâtiments sont sous-utilisés et les véhicules individuels sont sous-utilisés.
Les machines de tout type de machines. Je pense que je pense aux machines qui sont utilisées ponctuellement pour une tâche ponctuelle, mais elles sont sous-utilisées. Il y a des machines qui tournent 24 h sur 24.
Ces machines ne sont pas concernées par, par ce que je viens de dire. Elles sont minoritaires aujourd’hui dans le système industriel. Et donc ce qu’il faut , c’est d’en fabriquer moins, ultra-robustes et partager ces machines, partager l’utilisation.
Donc ce qu’on appelle intensifier l’usage, intensifier l’usage des mètres carrés, donc partager les mètres carrés, intensifier l’usage des machines, donc partager les machines avec une gestion, une gestion chronotopique finalement de l’utilisation de ces machines de manière à ce qu’on fabrique moins, beaucoup moins, mais qu’on les utilise beaucoup plus.
Parce que l’essentiel de l’empreinte environnementale de tout et n’importe quoi, c’est pas dans l’usage. Bien sûr qu’il y a aussi des, des… Il y a besoin d’énergie pour faire fonctionner ces machines-là, mais beaucoup de machines, la plupart des machines, la majorité des machines, la majorité des produits eh bien l’essentiel de l’empreinte écologique se passe au moment de la production, de la fabrication, de l’extraction des matières premières.
Il faut savoir que dans un smartphone, c’est plusieurs dizaines de tonnes de matières premières pour un, pour un objet qui fait 200 grammes. Mais c’est vrai pour tous les objets électroniques, C’est vrai pour pour… Si vous prenez une voiture qui fait deux tonnes, il faut des centaines de tonnes de matériaux pour arriver à faire une voiture de deux tonnes. Et donc ça montre bien que si on en fabrique moins, mais qu’on partage plus, on va faire baisser la pression d’une façon très importante sur les écosystèmes, ce qui permettra d’utiliser toujours ces machines en tant que de besoin. Donc, il n’y a pas de renoncement à ce qu’apporte le progrès technologique, mais il va falloir que dans la, dans notre, dans nos modes de vie, dans nos, dans nos imaginaires, dans nos, dans nos façons de nous, de nous, dans la façon de, de, de faire société qu’on accepte de ne pas être propriétaire de tout, mais qu’on accepte d’être utilisateur de tout.
Parce que la vraie liberté, demain, ça sera de pouvoir jouir de tout sans forcément tout posséder.
GenAct : du constat à l’action sur le terrain
– Alors, on va voir encore un peu plus loin que c’est à partir de ce diagnostic que tu as décidé de créer donc cette association entourée de partenaires. L’Association GenAct, c’est une toute jeune association qui date du printemps 2025, mais c’est un mouvement qui se veut donc très opérationnel. J’ai envie de dire, peut être, pour aller au-delà du constat, mais aller vers l’action et peut-être prouver que ce n’est pas une utopie.
Parce que c’est vrai qu’on imagine que cette révolution-là, que tu appelles de tes vœux, passe par des besoins très concrets. Justement, sur quels leviers l’association travaille-t-elle ?
Elle propose des outils, des formations. Explique nous en quelques mots.
– C’est exactement ça.
C’est que GenAct a été créée précisément pour aider les collaborateurs dans les entreprises qui sont dans le désarroi et qui ne savent pas comment faire en sorte de produire d’une manière différente pour, précisément, pas simplement avoir moins d’impact, mais avoir un bilan net positif.
Parce que c’est bien ça le but du jeu, pour faire en sorte de réparer toutes les bêtises qui ont été, qui ont été conduites, racontées, mises en œuvre, hélas, pendant des, pendant des décennies, parce que il va falloir qu’on répare-là, répare tous les dommages, parce qu’il y a quand même beaucoup de dommages à réparer déjà dès à présent. Et donc GenAct vise à accompagner les salariés conscientisés et conscientisés de différentes manières. Parce qu’ils ont fait la Fresque du climat, parce qu’ils ont, ils écoutent les informations, tout simplement.
Même si les informations ne sont pas toujours très bien, l’information environnementale n’est pas toujours très bien traitée parce que nombre de médias d’ailleurs manipulent beaucoup les gens pour qu’ils ne comprennent pas ce qu’il est en train de… ce qui est en train d’arriver, ce qui est, ce qui est absolument dramatique parce que, parce que les médias aujourd’hui, aujourd’hui, ne, soit n’ont pas, les journalistes, n’ont pas les compétences, n’ont pas les connaissances, soit carrément, on ne fait pas de dessin. Mais il y a des médias qui sont notamment aux États-Unis et même en France, hélas, qui sont clairement climatosceptiques, etc. Par, par intérêt de leur de leurs actionnaires, tout simplement. Donc ça, c’est, c’est un, c’est un, c’est un dommage grave d’ailleurs à la liberté d’expression et et et surtout, c’est un, c’est un, c’est inadmissible de, que, que la vérité de la science soit à ce point dévoyée par, par des opinions, alors que, alors que ce dont on parle actuellement, ce sont des faits. Enfin bref, l’objectif de GenAct, c’est de faire monter en compétences les salariés pour qu’ils comprennent les mécanismes à mettre en place pour mettre, pour déployer des modèles économiques.
Et il y a dix commandements. On a parlé la raison d’être, on a parlé du modèle économique, mais il y a plein d’autres leviers à activer, des leviers juridiques, notamment des lieux, même des leviers fiscaux, pour progressivement inciter les entreprises à rompre avec le modèle linéaire.
Donc, j’invite tous les, tous ceux qui écoutent ce podcast à aller sur la plateforme et découvrir les dix commandements. Et une fois que le salarié de l’entreprise publique ou privée a compris la nouvelle mécanique et ça demande du temps, ça demande du temps d’apprentissage.
C’est pour ça qu’on a sélectionné un certain nombre de partenaires qui aident les salariés en fonction de leur métier. Parce que mettre en place un modèle économique régénératif quand tu es comptable, c’est pas les mêmes leviers que quand tu es RH ou quand tu es aux achats, ou quand tu es la production. Donc il est clair qu’il y a un corpus de connaissances à acquérir pour pouvoir bien comprendre la complexité de ces, de ces nouveaux modèles.
Et une fois que c’est compris ou à peu près compris, eh bien, il y a une autre, un autre département dans un bac à sable pour faire en sorte que les projets puissent émerger. Et c’est ça la magie de GenAct !
C’est qu’on passe tout de suite de l’apprentissage à l’action.Et c’est dans l’action finalement, qu’on va apprendre encore plus. Parce que l’objectif, c’est de permettre aux collaborateurs de proposer à leur hiérarchie de déployer un nouveau modèle d’affaires en parallèle de celui qui existe aujourd’hui. Alors pourquoi en parallèle ? Parce qu’il est clair qu’il y a quand même peu d’entreprises qui vont passer d’un modèle linéaire, un modèle permacirculaire, en abandonnant le modèle linéaire tout de suite, parce que sinon ils vont perdre leurs revenus immédiats. Donc personne ne fera ça. Par contre, de le mettre en parallèle, ça, c’est possible.
Donc d’avoir en fait deux types de produits, le produit “salle” et le produit “propre”, et voir comment petit à petit, il y aura un jeu de vases communicants pour que l’entreprise ne produise plus que des produits. avec une approche régénérative. Et ça, ça peut se faire très rapidement, à condition d’avoir les compétences, d’avoir les deux lignes en parallèle qui fonctionnent et d’avoir un discours vis-à-vis des clients qui va les inciter à passer d’une approche linéaire à une approche circulaire, donc à faire de passer d’un marketing de possession, par exemple un marketing d’usage. Et ça, c’est tout, c’est tout ce qu’apporte cette association, qui est une association d’accompagnement de la transformation des modèles économiques pour que les entreprises, demain, puissent produire de la valeur économique sans détruire la valeur écologique.
– Je disais, tu connais bien évidemment la vie des entreprises. Là, on parle des salariés, c’est-à-dire qu’il y aurait un laboratoire et une façon de prouver aux directions des entreprises et à leurs propriétaires qu’un autre modèle est possible ? Ou il faut embarquer aussi les chefs d’entreprise, les actionnaires ?
– Les personnes qui vont adhérer à GenAct, ce sont des salariés de tous niveaux.
Il y a des gens qui sont à la base du système productif, puis d’autres qui peuvent être au comité exécutif de leur entreprise ou des cadres dirigeants.
Donc, chacun doit faire sa part. Et l’objectif, c’est clairement ce que tu viens de dire, c’est-à-dire c’est de transformer.
On sait très bien qu’il y a certains collaborateurs qui vont se sentir démunis parce que, parce qu’ils vont se dire moi, je ne suis pas légitime ou je suis trop bas dans la hiérarchie pour pouvoir avoir du poids, je ne serai pas écouté par la direction qui a pouvoir de décision. Donc ça va servir à rien. Donc moi, je conseille à ses collaborateurs, là, de continuer de se former parce que peut-être qu’un jour il y aura une fenêtre de tir avec un patron qui va dire ben pourquoi on n’essaierait pas ceci ou cela ?
Et si, et si les collaborateurs sont formés, ça, ce serait quand même plus facile d’embrayer sur des actions concrètes et notre, notre vœu au niveau du conseil d’administration de GenAct, c’est de faire en sorte qu’il y ait tellement de projets qui se mettent en place que plus, il y en a qui vont se mettre en place, plus il y en a qui vont réussir, tout simplement. C’est une question de… C’est comme au loto. Si tu joues très souvent, statistiquement, tu as plus de chances de gagner, même si tu n’en as pas beaucoup, hein. Bon ben là, c’est purement mathématique. Donc plus on a, plus on aura de projets viables qui vont se mettre en place. Forcément, il y en a qui vont réussir, ça va donner envie à d’autres de s’y mettre. Et c’est ça qui peut créer la bascule.
Tu n’as pas besoin d’avoir la majorité pour pouvoir basculer.
Ce qu’il faut, c’est qu’il y ait une masse critique de projets crédibles. Et pour qu’on arrête de ressortir toujours les mêmes exemples quand on parle de ces entreprises-là, ça fait 25 ans qu’on dit, qu’on dit, qu’on, qu’on, qu’on parle des mêmes exemples, c’est très bien. Ce sont des entreprises qui ont eu la chance d’avoir des, des leaders qui étaient des pionniers. Mais si on veut maintenant accélérer et on a besoin d’accélérer compte tenu du temps qu’il nous reste par rapport à ce que nous disent les scientifiques sur la capacité de résister des services écosystémiques, on est aujourd’hui dans la limite d’élasticité. Il y a certains, si on arrête certains types de dommages, c’est réversible. Par contre, si on continue nos bêtises, on va être sur des dégâts qui vont être irréversibles et là, on va être dans les prémices de l’effondrement… Donc, on a un problème de.. on a..
– Un problème de temps et de prise de conscience..?
– à la fois de la gravité du temps qu’il nous reste pour agir.
– Alors, l’association se veut accessible, je le précise pour ceux qui sont intéressés, avec une adhésion de 30 €. Elle se veut accessible au plus grand nombre. Tu le disais, on a parlé de son public visé, le profil des membres actuels. Est-ce que. Est-ce que tu as un portrait type des gens qui vous ont déjà rejoint ? Ils sont plusieurs centaines, je crois déjà.
– On a même plus plusieurs milliers parce qu’on vient de dépasser les 2050 “GenActeurs”.
Alors c’est à la fois beaucoup et dérisoire par rapport au nombre de salariés qu’il peut y avoir en France. Mais il n’y a pas eu encore beaucoup de publicité par rapport à l’existence de GenAct. Donc, on est, on est contents, satisfaits déjà de; de ce, de ce premier résultat.
Quelques semaines après l’ouverture du, de l’association, la création de l’association. Et donc on compte bien, bien entendu, faire en sorte qu’on la fasse connaître encore plus évidemment, vis-à-vis des, des entreprises avec, en proposant des packs entreprises pour que les entreprises puissent payer des forfaits à leurs collaborateurs, pour que les collaborateurs qui, qui ont envie d’en savoir plus sur ces modèles-là pour pouvoir mettre en place des nouveaux modèles d’économie dans leur entreprise. Donc des nouvelles approches créatrices de valeur, sans détruire le, sans détruire le climat et sans continuer de l’abîmer plus.
On verra bien si dans les semaines qui viennent, on continue de recruter des “GenActeurs”. Et plus on aura des acteurs, plus on aura de projets. Forcément, plus on aura de projets. Et dans ces projets, il y aura forcément des projets qui seront viables. Et c’est ensuite, par mimétisme qu’on souhaite que l’association puisse se développer en France et à l’international. Je n’ai aucune garantie. Il n’y a pas de, il n’y a pas de business plan. Il y a. On voudrait que ça aille le plus vite possible dans l’intérêt de l’humanité. Mais on est sur, on est sur une approche qu’on ne maîtrise pas. D’ailleurs, ce qu’on souhaiterait d’ailleurs, c’est ne plus rien maîtriser du tout ! C’est que ça, qu’il y en ait tellement qu’on soit complètement, ça veut dire qu’on aura réussi. On n’en est pas là, hélas, mais on y travaille.
Tous les secteurs sont-ils concernés par la bascule ?
– Je dézoome un peu, je me mets à la place de quelqu’un qui nous écoute, c’est un podcast, on peut nous écouter dans la rue, en marchant, dans une rue commerçante de centre-ville par exemple. Cette personne voit défiler des enseignes de prêt-à-porter, des vitrines de magasins, de chaussures, une boutique d’objets déco, des fast-foods, une enseigne de téléphonie…
Bref, concrètement, toutes ces entreprises-là peuvent elles vraiment opérer la bascule contributive dont tu parles ou c’est réservé à quelques pionniers très très motivés ? Est-ce qu’il y a des secteurs privilégiés pour basculer comme tu le dis ?
– Tous les, tous les secteurs sont concernés et tous les secteurs peuvent devenir “regen”.
Alors bien sûr, il y en a qui partent de plus loin que d’autres. Si vous êtes, si tu. Si, si si. Si ton métier, c’est d’extraire du charbon pour devenir “regen”. Il faut juste que tu arrêtes d’extraire du charbon.
Je rappelle quand même que la première chose à se poser, la première question qu’on doit se poser sur ces sujets-là, c’est la raison d’être.
Donc, il y a des choses qu’on peut verdir et par une approche permacirculaire et d’autres qu’on doit arrêter. Voilà, on aura besoin. On n’a pas le temps de tout dire, là, mais on va avoir besoin de régulations fortes parce qu’il y a des choses qui ne sont pas tolérables et, et donc qui ne sont pas tolérables parce que…
Parce que aujourd’hui, la planète ne peut plus supporter ces bêtises-là.
Oui, il faut qu’on arrête la totalité, l’exploitation du charbon si on veut sauver ce qu’on peut encore sauver sur le climat. Et si on veut s’adapter surtout, on doit arrêter de produire du gaz également. Donc ça, c’est clair, net et précis. Donc, on a besoin de mesures d’interdiction et après, derrière, pour le pour, pour chacun des business, c’est au comité, au conseil d’administration, au comité, au comité exécutif de ces entreprises de se poser la question de l’utilité de leur utilité sociale.
Qu’est-ce qui manquerait à l’humanité si leur, si leur entreprise n’existait pas ? Bon, ça, c’est une question qu’il faut se poser. Et qu’est-ce qui irait mieux si elle, si elle n’existait pas ? Et ça, c’est aussi une question qu’il faut se poser. Et quand on arrive à répondre à ces deux questions, on est capable d’évaluer le caractère essentiel ou non essentiel de son business. Alors quand c’est pas essentiel, ben tout l’objet de l’entreprise, ça va être de non seulement de passer d’un modèle linéaire à un modèle permacirculaire, évidemment, mais sur des produits utiles. Donc, il y aura un double changement, il y aura un changement de modèle et il y aura aussi un changement de nature de produit. Parce que oui, les entreprises qui font de l’aviation de masse, qui font des paquebots de croisière, etc. Il y a il n’y a pas de. Il n’y a pas d’autre solution que de, que de ralentir très fortement et de et, à terme, d’arrêter, en tout cas d’arrêter avec les, les volumes et les modalités que l’on connaît aujourd’hui. Donc, on a besoin d’accepter, d’accepter une plus grande régulation si on veut revenir dans les limites planétaires.
Décroissance vs. croissance verte : la fin d’une « chimère »
– Oui, voilà, parce que je te pose cette question, parce que, il faut le dire, au cœur de notre organisation économique et sociale, il y a la notion de croissance.
Alors, pour le meilleur ou pour le pire, chacun jugera.
Mais il y a un débat de fond qui peut inquiéter les salariés, c’est celui qui oppose justement la croissance dite verte à la sobriété ou même à la décroissance.
Alors, on ne va pas aller dans le détail de la théorie économique, hein, je rassure tout le monde, mais où tu te situes avec le mouvement GenAct et l’économie générative sur ce point ?
– Régénérative.
On sait très bien que la croissance verte qui en fait une, une chimère qui consiste à faire croire qu’on va pouvoir continuer d’augmenter le PIB des nations tout en faisant décroître les pressions environnementales et les émissions de gaz à effet de serre : ça ne marche pas.
En tout cas, oui, il y a des découplages qui ont été enregistrés dans nombre de pays, mais en tout cas, ces découplages ne sont pas à la hauteur de ce qu’il faudrait réellement faire pour revenir dans les limites planétaires, et notamment pour respecter l’accord de Paris. Donc ces découplages sont relatifs. Ils sont en aucun cas absolus et, et ils sont in fine, si on continue une logique de croissance, il y aura des rebouclages qui seront, qui seront, qui vont s’opérer et il y aura des couplages par rapport à d’autres, à d’autres types de limites.
En fait, on pourra peut-être découpler par rapport au CO2, mais on va surcoupler par rapport aux matières premières et donc ça sera extrêmement délétère sur la biodiversité. Donc, on ne peut pas s’en sortir avec une approche aussi simpliste que la croissance verte.
C’est, tous ceux qui disent ça, sont, soit incompétents, soit, soit lâches, soit un peu des deux, soit je ne sais pas quoi dire. Non, la seule chose à faire c’est oui, c’est, c’est d’accepter de revoir en fait les métriques de ce qu’on appelle la performance, les métriques de la performance qui doit, et notamment de la création de richesses qui doivent plus être centrées simplement sur l’augmentation des … monétaires qui se mesure en points de PIB.
Parce que dans le PIB, il y a le, il y a le très très bien et puis il y a le très, très mal. Et si vous avez beaucoup de très, très mal, eh bien, vous pouvez faire augmenter votre PIB, ce qui n’a aucun sens, parce que c’est du très, très mal. C’est bien sûr, si vous avez énormément d’accidents de la route, vous allez faire monter le PIB. Est-ce que c’est une bonne chose pour une nation d’avoir des accidents de la route ? C’est là, vous enlevez les, la régulation sur le code de la route, vous allez faire augmenter le PIB de la France parce qu’il y aura plus d’accidents.
C’est quand même un peu con quand même comme approche. Et donc nous, ce qu’on dit, on dit, il faut rompre avec ce type d’indicateurs, il faut en avoir d’autres qui sont des indicateurs de, de qui correspondent à ce qu’on veut vraiment. Donc, on veut respirer un air, un air non pollué, on veut manger sainement, on veut augmenter l’espérance de vie en bonne santé, on veut tout ça. Donc, ça, il faut le définir.
Mais ça, c’est pas compatible avec l’augmentation infinie du PIB. Donc, on est pour une approche d’ultra sobriété dans tout ce qui est essentiel et d’interdiction pour tout ce qui est non essentiel. Et ça aura forcément un effet sur le PIB, évidemment, qui ne doit pas être compris comme étant récessif, parce que la récession, c’est la misère pour tous, mais comme une sorte de décroissance de ce qui n’est pas utile et de croissance de ce qui est utile.
Mais bien sûr, cette croissance de ce qui est utile, toujours dans le respect des limites planétaires. Donc l’objectif, c’est bien sûr d’avoir un œil rivé en permanence sur les limites planétaires pour savoir si l’économie que l’on veut demain, reste dans ses limites. Et donc c’est ce qu’on appelle, nous, la post-croissance, on le sait, c’est de décroître sur ce qui est inutile le plus vite possible.
Ça, ça s’appelle la transition.
Et ensuite rentrer dès qu’on sera revenu dans les limites planétaires. Parce que quelqu’un qui perd 30 kilos, parce qu’il a 30 kilos de trop, une fois qu’il a perdu ses 30 kilos de trop, il revient d’ailleurs à son poids de forme. D’ailleurs, il est en bien meilleure santé quand il a son poids de forme. Et là, son obsession, ça va être d’y rester, donc d’y rester, donc de rentrer dans cette post-croissance des flux, des flux économiques.
Ça ne veut pas dire que tout ce qui est immatériel ne peut pas être amélioré à l’infini parce que précisément, quand c’est immatériel, on ne peut pas le mesurer en tant que tel. Mais l’économie de l’immatériel, ça, c’est des choses qu’on doit pouvoir faire croître, même si c’est bien sûr beaucoup plus difficile à mesurer que des points de PIB.
Donc, le débat croissance-décroissance, ça n’a pas de sens parce que de toute manière, cette décroissance des flux physiques carbonés que l’on va avoir tôt ou tard, du fait qu’il y a des limites dans les stocks d’énergies fossiles, même s’il y en a encore beaucoup trop par rapport à ce que le climat peut supporter.
Cette décroissance des flux physiques, on l’aura. Donc il y aura forcément décroissance du PIB. Tôt ou tard.
Donc ça ne sert à rien de tergiverser par rapport à ça. Ce qu’il faudrait plutôt, c’est d’organiser en fait cette, cette réorganisation économique avec des nouveaux indicateurs pour faire émerger cette société de la post-croissance qui est la seule, qui est, qui est viable sur une planète qui est ronde, avec 8 milliards d’habitants, qui, qui prétendent et qui veulent avoir un niveau de vie digne. Donc, tout ça, ces débats-là qui sont des débats politiques, politiques par des gens qui sont, qui n’ont rien compris à la gravité du problème, à sa complexité et au peu de temps qui nous reste pour agir. Ce sont des gens médiocres, ce sont des gens incompétents qu’il faut laisser dans leur médiocrité et travailler avec les gens qui ont envie d’avancer.
Pour aller plus loin
– On entend donc ton ton appel et ton alarme, mais aussi cette réflexion très opérationnelle dans les entreprises. Je renvoie les auditrices, les auditeurs aux détails de tout ce programme sur le site internet que je mets dans la description. Fabrice Bonnifet, président de GenAct et donc du C3D, le Collège des Directeurs du Développement Durable qui était donc Soluble(s).
Je mets tous les liens dans la description.
J’indique qu’on peut te suivre sur LinkedIn et qu’il y a une dimension communautaire, au sens réseaux sociaux du terme, du projet GenAct sur LinkedIn aussi.
Donc, allez faire un tour là-bas aussi, si ça vous intéresse et on peut te retrouver aussi en librairie avec : “L’entreprise contributive. Concilier monde des affaires et limites planétaires”.
Un ouvrage écrit avec Céline Puff Ardichvili, qui est paru aux éditions Dunod.
Voilà, j’ai été complet !
J’ajoute quand même que, parce qu’on a le goût des podcasts, évidemment, qu’on peut écouter “Le sens et l’action”. C’est un programme audio qui fait témoigner “celles et ceux qui donnent du sens à leurs actions”.
Fabrice Bonnifet, merci d’être passé dans Soluble(s) !
– Merci beaucoup et à bientôt. Au revoir.
– Voilà, c’est la fin de cet épisode. Si vous l’avez aimé, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous. Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site internet, csoluble.media.
À bientôt !

Crédit photo : Claire Grandnom.
POUR ALLER PLUS LOIN
- Voir : le site de l’association GenAct.
- Lire : “L’entreprise contributive – Concilier monde des affaires et limites planétaires” par Fabrice Bonnifet et Céline Puff Ardichvili aux éditions Dunod.
- Écouter aussi, le podcast “Le sens et l’action” proposé par le C3D.
TIMECODES
00:00 Introduction
02:09 Le parcours de Fabrice Bonnifet
04:23 Comprendre les limites planétaires
11:14 De la RSE à la régénération
15:08 Le modèle permacirculaire
20:02 L’association GenAct, du discours à l’action
25:43 Les “GenActeurs”
31:03 Tous les secteurs sont concernés
33:48 Croissance verte: une fausse promesse ?
38:56 Conclusion et ressources
40:33 Fin, merci à Fabrice Bonnifet !
Propos recueillis par Simon Icard.
CITATIONS
En direct de Fabrice Bonnifet, président de GenAct et du Collège des Directeurs du Développement Durable (C3D)
– Sur le dépassement de l’approche RSE, Fabrice Bonnifet estime qu’« il faut réparer, régénérer, et pas uniquement limiter les dégâts. »
– Sur le modèle économique actuel, il dénonce le fait qu’« on compte pas ce qu’on doit pour le restaurer. »
– Sur l’impératif pour certains secteurs, Fabrice Bonnifet affirme qu’« il n’y a pas d’autre solution que de, que de ralentir très fortement et à terme, d’arrêter » certaines activités.
– Sur le concept de « croissance verte », pour Fabrice Bonnifet : « c’est une chimère ».
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