[TRANSCRIPTION] L’adoption des coraux : une solution pour préserver les écosystèmes marins
Dans un contexte de dégradation accélérée des écosystèmes marins, les récifs coralliens, véritables joyaux de la biodiversité, sont en première ligne. Ces écosystèmes fragiles, pourtant essentiels à la régulation du climat et à la sécurité alimentaire de millions de personnes, sont menacés par les activités humaines.
Écouter plus tardFace à cette urgence, des initiatives innovantes ont émergé, comme celle de Koraï, qui propose une approche novatrice pour restaurer les coraux et préserver les océans.
Pour Soluble(s), Jeimila Donty, fondatrice de cette entreprise basée à Lille, détaille ses solutions pour régénérer les écosystèmes marins des côtes africaines de l’océan Indien, en particulier à Madagascar où son équipe bouture des coraux afin de les “replanter”. Une action qui repose sur l’investissement d’entreprises et de particuliers dans le projet.
Transcription (automatisée)
Article source : L’adoption des coraux : une solution pour préserver les écosystèmes marins
Bienvenue dans un nouvel épisode de Soluble(s). Aujourd’hui, je m’intéresse aux risques qui pèsent sur les coraux et à une solution de terrain qui permet à des entreprises de s’investir pour les protéger et pour qu’ils repoussent.
– Bonjour, Jeimila Donty.
– Bonjour.
– Tu es la fondatrice de Koraï, une entreprise qui se définit comme pro-climat, qui a transformé le modèle économique d’une ancienne ferme corallienne familiale en un producteur de solutions fondées sur la nature. L’objectif est de régénérer les écosystèmes marins des côtes africaines.
On va donc parler de ces solutions, des périls aussi qui pèsent sur ces écosystèmes et tu vas aussi nous faire voyager dans un des plus beaux endroits du monde, l’île de Madagascar.
Un pays, situé au large de la côte sud-est de l’Afrique,
mais d’abord, on a envie d’en savoir plus sur toi, sur ton parcours, tu es une entrepreneuse, tu as lancé ta société en 2022 à Lille dans le nord de la France, mais ce n’est pas un hasard si tu as choisi d’agir à Madagascar et pour le Koraï raconte-nous un petit peu comment tout ça s’est mis en place ?
– Merci pour l’invitation déjà, et pour cette belle introduction, hyper claire. Oui, donc je suis né, j’ai grandi à Madagascar en fait, je suis malgache de naissance et Franco-Malgache maintenant, puisque du coup, je suis venue en France, j’avais 17 ans juste après le bac pour suivre des études de commerce, parce que mes parents à Madagascar étaient entrepreneurs, et j’avais envie, moi aussi, de devenir entrepreneur.
Et donc c’est à ce moment-là que je me suis dit, je vais faire des études de business avec l’idée quand même de monter un jour au moment d’entreprise. Et est-ce que ce serait Madagascar ? Est-ce que ce serait en France ? Je ne savais pas encore à l’époque.
Et après, qu’est-ce qui s’est passé ? Bien en 2020 est arrivé une année qui est dans les esprits de tout le monde, qui pour moi, en tout cas, était difficile parce que j’ai perdu mon père cette année-là.
Et donc, à ce moment-là, deux choses se passent dans ma tête. La première, c’est que j’ai envie de maintenir son souvenir. Donc, je me dis, est-ce qu’il n’y a pas en moyen pour moi de continuer à vivre un peu avec lui ?
Et donc, je me suis dit, ça peut se matérialiser dans un entrepreneurial qui soit en continuité avec ce que lui avait lancé.
Et ensuite, la deuxième chose qui se passe aussi dans ma tête, c’est, en fait, j’ai encore ma mère, elle est à Madagascar. Et donc, il faut aussi que je crée quelque chose qui me permette d’être en lien avec elle. Donc, c’est vraiment l’aspect personnel, la motivation personnelle qui m’a poussée à lancer Koraï.
Et donc, comment ? Et bien, y avait une ferme de Koraï dans les entreprises comme mon père nous a laissé. Et donc, l’objectif, c’était de bouturer rer du Koraï pour l’exporter. Et donc, là, je me dis, voilà, j’ai une chance, je suis quand même en France aussi. Donc, en Europe, donc, un continent qui a un développement économique fort et qui interagit beaucoup avec l’Afrique. Donc, à ce moment-là, je me dis, est-ce que je ne peux pas utiliser cette force ? Et donc, c’est comme ça que j’ai eu l’idée de créer Koraï.
– Du sens et de l’impact, on va parler concrètement donc de cette nécessité d’agir pour prévenir les risques de disparition à des masques de Koraï, car c’est bien que ça dont on parle. Alors, nombre d’entre nous doit avoir en tête cette image d’un assemblage fin aux allures de petits édifices, quasi-plantes, quasi-pierres qui s’élèvent des fonds marins, mais concrètement, le corail, c’est bien vivant, mais c’est un animal. Il forme des colonies qui sont parmi les écosystèmes les plus incroyables de notre planète. Alors, peux-tu nous parler un peu justement de ces coraux, décris-nous un peu ce qui se passe dans l’océan.
– Alors, les coraux, c’est magnifique, comme tu viens de le dire, et moi, je suis une… enfin, je suis originaire du nord-ouest donc de Nosy Be, qui est un archipel d’îles connues par les plongeurs dans le monde entier, parce qu’il y a des plongeurs qui viennent de partout pour aller justement voir nos coraux, mais pas si connu que ça du grand public, parce que Nosy be et connu plus comme une marque de parfumerie…, ici.
Mais pour en revenir au coraux, pourquoi en fait, c’est autre chose que simplement de beaux animaux. D’ailleurs, très peu de gens savent que ce sont des animaux. C’est pas que des beaux animaux, en fait, c’est aussi un écosystème essentiel à la bonne santé de l’océan. Et donc, à la bonne santé de la planète et au climat. Pour faire court, en fait, le corail, c’est seulement 0,2% de la superficie de l’océan. Et pourtant, ces édifices, comme tu le dis, abritent plus d’un quart de la biodiversité marine.
On va y trouver le poisson-perroquet qui contribue, en fait, à sa régulation. Et donc, en fait, il se nourrit en quelque part du corail. On va trouver aussi d’autres poissons qui vont venir s’abriter dans le corail. Et on va aussi trouver d’autres animaux marins, des crustacés, des mollusques qui viennent vivre dans cet écosystème.
On peut même, enfin, ça se compare à des grandes villes sous-marines. Donc, il y a un rôle d’abri de la biodiversité. Mais il y a aussi un rôle important aussi dans le climat parce que les coraux, c’est aussi ce qui protège nos côtes. Donc, en fait, au quotidien, toutes les personnes qui vivent à moins de 100 km des côtes, bénéficient de ce qu’on appelle le service écosystémique de protection des côtes que font le corail. Il agit comme une barrière qui casse la puissance des vagues.
Donc, c’est un rôle très important. Ils ont aussi un rôle dans la captation carbone, même si aujourd’hui, on ne va pas les comparer à des arbres parce que comparer aux arbres n’ont pas une captation carbone aussi élevée. Mais voilà, ils ont un rôle, en tout cas, extrêmement important. Et enfin, un dernier, celui d’acteurs économiques. Donc, on revient, en fait, à cette idée de beauté du corail, comme je disais tout à l’heure, des centaines, des milliers de gens viennent à Madagascar pour voir ces coraux.
C’est le cas aussi dans d’autres régions. Et donc, aujourd’hui, on arrive à évaluer la valeur économique apportée par le corail. Et en Afrique, par exemple, c’est 814 milliards de dollars de services écosystémiques rendus, et autour du monde aussi, c’est, voilà, c’est des milliers de milliards de dollars.
– Une beauté, c’est important. Alors, pas forcément très préservée. Il n’y a pas d’aires marines protégées partout. Et on a noté le chiffre que tu nous donnes. Une espèce marine sur quatre s’y loge, quelque part, et en dépendent, tu as évoqué le réchauffement climatique.
On le sait, notre planète se réchauffe avec l’effet de serre, qui est lié aux activités humaines. Les perspectives ne sont pas bonnes, c’est pourquoi une transition écologique est nécessaire. Et il faut dire que les océans sont particulièrement concernés par le réchauffement climatique. Et cela s’accélère, le rythme du réchauffement des océans & quasiment doublé depuis 2005. C’est ce qu’indique, un rapport de l’observatoire européen Copernicus, qui a été publié fin septembre 2024. Les canicules marines ont touché ⅛ ème de la surface des océans. Alors, les canicules marines, on connaît bien les canicules atmosphériques, mais quand la mer surchauffe, on peut parler de canicules. Quel est l’effet de ces canicules marines justement sur les coraux ?
– Eh bien, c’est un des principaux dangers qui menacent justement le corail. Quand le corail a trop chaud, donc c’est un animal, comme nous, eh bien quand il a trop chaud, il stresse. Et un corail qui stresse, qu’est-ce qu’il fait, il va expulser des algues qui s’appellent les zooxanthelles qui vivent en symbiose avec lui et qui lui apportent les nutriments dont il a besoin. Et notamment aussi l’oxygène, parce que cette zooxanthelle est une algue et donc, par définition, elle fait de la photosynthèse.
Donc, quand le corail est stressé à cause de la haute température, et bien ce qu’il fait, c’est qu’il va expulser ces algues et donc c’est comme si il s’arrêtait de manger, de se nourrir et qu’il s’asphyxiait un peu.
C’est comme si vous, ou moi, se retenait de respirer parce qu’on a trop chaud. Et ce qu’il passe, c’est que, en fait, comme vous, comme moi, si on se retient de respirer, mais qu’après, on reprend notre souffle, on reste vivant. Mais par contre, si on se retient de respirer trop longtemps, eh bien la mort nous attend…
Et c’est le cas pour le corail, en fait, en expulsant ces algues à cause des canicules marines, il est capable, après à la baisse de la température, de les ré-accueillir. C’est le cas, c’est le cycle de la vie.
Ça arrive en fait en qu’il y ait des rechaussements de l’eau ponctuelle. Ce qui est sans précédent, c’est la durée et l’intensité de ces canicules marines, notamment un phénomène qu’on appelle El Nino, qui a été d’une, d’une intensité et d’une durée sans précédent, justement cette année, notamment à Madagascar, où on a vraiment connu en mai, 2024, un des plus gros épisodes de blanchissement corallien. Donc, quand ils expulsent les algues, ils perdent leurs couleurs, donc ils deviennent blancs. Et donc, on a eu, voilà, des canicules extrêmement fortes qui ont malheureusement tué une partie de ces récifs coralliens.
Donc, aujourd’hui, on a déjà, en moins d’un siècle, perdu la moitié des récifs, dû en partie à ces réchauffements qui sont liés aux réchauffements climatiques globales, donc nos actions tropiques, et aussi, à nos actions directes, comme le jet d’ancre, la pêche dynamite qui se pratique encore en l’Asie du Sud-Est.
– Donc, ce phénomène de disparition, de blanchiment, le corail se développe dans une eau, je crois, dont la température doit être située entre 20 et 28 degrés, c’est la condition de son développement. Tu disais, Madagascar n’est donc pas épargnée, voire même très concernée par ces phénomènes de stress qui pèsent sur les coraux et ce blanchissement, et ces vagues de chaleur marine, on disait les récifs coralliens sont des écosystèmes, c’est-à-dire qu’ils abritent donc une grande diversité de vie marine, la fameuse ou biodiversité, concrètement, ça veut dire que moins de corail, c’est moins de vie dans l’océan, ç’a des impacts pour la vie elle-même, mais aussi pour les communautés locales comme on dit ?
– Tout à fait. Donc, concrètement, en fait, c’est comme si on vous disait demain, pareil, je fais toujours l’analogie avec les humains, parce que c’est important de donner des perspectives et de comprendre ce qui se passe. Donc, effectivement, c’est comme si on disait demain qu’une partie de l’océan n’est plus habitable pour cette biodiversité. Donc, ce qui va se passer, c’est que ces espèces aussi sont mises à mal, c’est pour ça que c’est important. Donc, on s’appelle Koraï, mais notre combat, c’est la biodiversité marine, et donc à travers le corail, on va vraiment soutenir le développement de la biodiversité marine, et pourquoi c’est aussi important pour nous les humains, c’est parce qu’aujourd’hui, dans le monde, il y a 500 millions de personnes qui dépendent directement du corail pour se nourrir quotidiennement. Ce sont ce qu’on appelle aujourd’hui les communautés locales, qui sont des petits pêcheurs, des pêcheurs traditionnels qui ne font pas de la pêche industrielle, donc pas de grande quantité, et qui vivent en fait vraiment d’une pêche de moins de 30 km des côtes, et eux leurs produits de la pêche, ils vivent dans le corail, dans les récifs coralliens.
Donc, c’est aussi leur subsistance qui est mise à mal par la disparition du corail. Alors, il y a plusieurs niveaux d’action pour préserver les coraux.
– On l’a compris, le plus global, c’est l’action pour limiter leur réchauffement climatique. D’ailleurs, les scientifiques du GIEC ont rappelé que dans un monde, à la température qui se rehausse de deux degrés, ce sont quasiment 90% des coraux qui sont menacés de disparition. Donc, il faut agir sur les émissions de CO2, notamment, et limiter l’effet de serre, mais il y a aussi sur le terrain des solutions complémentaires qui permettent d’agir pour tenter de le restaurer, et c’est donc l’objectif de Koraï, ta société, l’entreprise que tu as fondée, parlons donc de ce que tu as mis en place à Madagascar dans un premier temps. Alors, c’est au nord du pays que cela se passe, décris-nous un peu comment tu mets en place des actions de restauration du corail?
– Alors, je vais vous emmener, plonger avec moi, à Madagascar dans ce cas. D’abord, une petite introduction de contexte. Aujourd’hui, l’objectif pour nous, c’est en fait, d’aider la nature. Donc, souvent, on emploie, le mot sauver le corail, il faut sauver le corail, c’est pas vrai. C’est pas nous qui allons sauver le corail, mais nous ce qu’on peut faire, c’est l’aider en fait à se reproduire plus vite, c’est comme un pansement.
Finalement, ce qu’on va faire, on va aider la nature à reprendre son cycle. Et donc, très concrètement, la restauration corallienne commence à fonctionner. Eh bien, le corail est un animal, mais un animal très spécial.
Et en fait, aujourd’hui, on a déjà des techniques qu’on appelle les techniques de bouturage qui fonctionnent un peu comme pour les arbres. C’est-à-dire que quand on a un bout de corail cassé, donc là, on va venir chercher des coraux d’opportunité.
Donc, dans la nature, il arrive qu’avec un courant un peu fort, on va avoir deux, trois branches de corail qui vont casser. Et ce corail, en fait, s’il est emporté par le courant, il va mourir parce qu’il n’est pas fixé, mais par contre, si on le fixe, quelque part, il va re-grandir et devenir lui-même un nouveau corail. Et donc, nous, c’est ce qu’on fait, on va apporter des structures artificielles dans l’eau sur lesquelles on va attacher des boutures de coraux d’opportunité qui eux vont grandir et reconstituer ensemble un nouveau récif. Donc, concrètement, c’est vraiment ce qu’on va faire dans l’eau. Et ça, ça va permettre de retrouver un récif artificiel, mais ça ne suffit pas.
Ça ne suffit pas parce qu’en fait, il va falloir nettoyer régulièrement ces structures. Donc, on a des biologistes marins spécialistes qui viennent identifier les coraux, les poser sur les structures, les mettre dans l’eau, et ensuite nettoyer régulièrement les structures des algues qui peuvent venir étouffer ces coraux. Et ensuite, au bout de trois ans, la bouture de corail est suffisamment grande pour être quasi autonome.
– Et donc, cette autonomie, retrouvée ou trouvée au bout de trois ans. Comment sont identifiés les lieux où c’est possible de donner les meilleures chances de développement à ces coraux ? Parce qu’on imagine que s’il y a un péril, il faut tenir compte des conditions qui ont généré ce phénomène.
– En fait, pour ça, c’est assez simple. Nous, à chaque fois, on va aller sur une île où on répond à deux questions. Est-ce qu’il est nécessaire de restaurer ? Et est-ce qu’il est possible de restaurer ? Pour répondre à la question de est-ce qu’il est nécessaire? On va venir étudier la couverture corallienne de la zone. Et constater, du coup, si on est sur une tendance où on a perdu plus de 30 % des récifs coralliens de la zone, malheureusement, c’est plutôt la moyenne parce que, comme je vous l’ai dit, c’est plutôt 50 % de récifs coralliens qu’on a perdu, mais ça va être différent en fonction des pays et des régions. Donc, on va d’abord évaluer ici la perte de biodiversité, de couverture corallienne sur la zone est importante. Donc là, on répond à la question, c’est nécessaire. Et ensuite, c’est possible. Comment ? Il y a plusieurs éléments qu’on va vérifier.
On doit vérifier d’abord qu’il n’y a pas d’autres pressions climatiques sur la zone qui font que c’est pas possible, notamment une trop grosse exposition lors des cyclones, parce que c’est aussi des zones dans lesquelles on peut avoir des cyclones, notamment aussi la sortie d’une rivière, ou là, en fait, on risque d’avoir trop de ces limitations.
Et enfin, la dernière qui n’est pas la moindre, c’est en fait, est-ce que c’est possible du fait de la conscience des communautés locales de la présence de ces coraux et donc de leur volonté à eux aussi de les restaurer et de les protéger. Et c’est là que nous, on fait un travail qui est un peu différent de ce qu’on va trouver généralement, c’est qu’on fait d’abord une enquête des communautés locales, on les embarque avec nous en leur offrant du travail, notamment en tant que constructeur de nos structures, en tant que nettoyeur. Et donc en fait, ensuite, on les sensibilise et c’est seulement après ça, une fois qu’on a vraiment évalué que c’est possible avec cette communauté d’y aller, on y va. Là où c’est nécessaire, et là où c’est possible avec les gens sur place…
– Alors, je le disais dans l’introduction, tu n’es pas entrepreneure, tu n’es pas d’une biologiste, mais les équipes locales sont constituées de différents savoir-faire et donc de biologistes ?
– Tout à fait. Oui, alors effectivement, c’est ma grande tristesse, ce que je ne suis pas une grande technicienne, mais une passionnée. Donc, j’adore aller dans l’eau tout le temps, mais je n’ai pas la prétention effectivement de faire moi-même, parce que c’est important d’avoir des scientifiques, des gens qui connaissent, puisque sinon, on risque de faire plein d’erreurs, notamment des erreurs de reproduction génétiques qui vont faire que, finalement, nos structures seront trop fragiles, nos coraux sont trop fragiles.
Donc, à Madagascar, on a trois jeunes scientifiques qui travaillent au quotidien en tant que restaurateurs coralliens, et qui ont été formés par une super scientifique internationale qui a travaillé aux Maldives, en Polynésie française.
Voilà donc, effectivement, l’équipe terrain est scientifique, l’équipe permanente, et ensuite, on fait travailler, effectivement, les communautés locales sur des actions plus simples, comme la construction sur terre, des structures, le fait de les traiter pour qu’elles soient adaptables dans l’eau ensuite.
– Alors, Koraï, le nom de ton entreprise avec un K, c’est une entreprise, donc pas une association, et donc il y a la nécessité d’avoir un modèle économique, et c’est là où ton parcours entrepreneurial, les études, et donc ton envie, ont nourri ce projet autour d’un modèle économique, particulier, il vise à mobiliser les entreprises, françaises et européennes, vers ces actions de conservation, mobiliser leurs interventions et donc leurs fonds aussi. Concrètement, qu’elle est ton intervention au service de ces entreprises, parce qu’elles ne font pas du mécénat, c’est quelque chose de différent ?
– Oui, justement, l’objectif, c’est de sortir de cette logique de mécénat. D’abord, un chiffre très important que j’aime remettre en lumière, c’est que la moitié du PIB mondial aujourd’hui est généré grâce à la nature, grâce aux services écosystémiques rendus, notamment par certains écosystèmes comme le corail, et pourtant cette nature n’est pas payée pour ce service.
Et donc l’objectif que j’ai, en tout cas, c’est de venir entrer dans cette nouvelle vague où on prend en conscience de cette valeur de la nature, puisque nos ressources sont limitées et que, en plus, on fait face à la crise de la biodiversité et du climat.
On prend en conscience que les entreprises ont un rôle à jouer et une rétribution nécessaire à cette nature qui a participé à leur développement économique. Et du coup, aujourd’hui, mon objectif, c’est d’utiliser les leviers existants.
Pour l’instant, le levier qui existe, c’est la responsabilité sociale et environnementale des entreprises (RSE). Il y a une nouvelle législation qui s’appelle la CSRD en Europe, qui oblige les entreprises à regarder au-delà du carbone et à regarder aussi la biodiversité. Donc nous, on les accompagne à répondre à cette obligation, en les aidant, en fait, à valoriser l’investissement qu’ils devront faire, chez nous en restaurant du corail, face à leur impact par rapport à la biodiversité marine.
Et ensuite, le deuxième levier qui existe, ça va être les crédits carbone, c’est ce qu’il y a dans le monde de la restauration forestière. Donc, ce qui est replantant des arbres, ils vont avoir des crédits carbone en échange, donc un modèle financier pour les entreprises. Malheureusement, pour le corail, ça n’existe pas encore. Et donc, l’idée pour nous, ce serait à terme d’être capables de délivrer des certificats biodiversité qui auront ce même rôle, en fait, de contribution à la nature. Donc, c’est comme ça qu’on veut embarquer le secteur privé. On a lancé récemment aussi la possibilité pour les particuliers d’adopter un corail, donc en fait, d’acheter un certificat qui leur permet de participer, eux aussi, à cet effort de restauration du corail.
– Oui, parce que tu souhaite donc mobiliser et capter des fonds avec cette notion aussi d’éducation, cette adoption d’un corail permet de suivre la progression de sa réinstallation à Madagascar, par exemple.
– Oui, en fait, finalement, c’est la même chose que ce que nous vendons aux entreprises, mais à l’échelle individuelle. Donc, en fait, c’est quoi, quand on investit dans la restauration corallienne, on investit pour un retour non pas financier, mais un retour en biodiversité et en impact social. Donc, aujourd’hui, si vous financez, que ce soit une entreprise crise un individu, la restauration du corail, vous allez voir la progression sur les trois ans jusqu’à son autonomie, en fait, à travers un rapport d’impact annuel.
Et ensuite, vous allez aussi pouvoir découvrir l’impact social que ç’a généré, à travers les emplois qu’on aura créés, à travers les événements de sensibilisation, à destination des communautés locales que l’on fait.
– Tu parlais aussi de touristes sur place. Il est possible d’être sensibilisé à travers des aquariums, c’est bien compris, des visiteurs peuvent se rendre sur place ?
– C’était le cas au tout début, mais en fait, on a arrêté les aquariums parce que c’était sur une zone un peu trop éloignée et donc on a fait une petite pause par rapport à ça. Aujourd’hui, il existe des modèles, d’écotourisme autour du récif corallien, et forcément les gens ont envie de voir à quoi ça ressemble la restauration, donc on réfléchit à offrir la possibilité aux personnes, principalement plutôt à nos clients, donc les entreprises opérateurs touristiques qui financent la restauration corallienne, on réfléchit à l’opportunité de les amener sur sites, mais voilà, ça reste encore une réflexion.
– On a beaucoup parlé de Madagascar, car c’est là où tout a commencé et de corail, mais je souligne que tes projets de développement dépassent, le cadre de ce pays, et du Koraï lui-même..
– En fait, on veut devenir les spécialistes de la Réunion, est océan Indien, c’est-à-dire les pays d’Afrique de l’Est et les îles qu’on appelait avant les Mascareignes, donc la Réunion, Mayotte, Maurice, voilà, c’est cette zone qu’on a envie de développer parce qu’on veut être spécialistes régionaux et donc on est capable de passer rapidement à l’échelle et répliquer notre modèle dans la zone.
Et ensuite, effectivement, le récit de corail, c’est l’écosystème majeur que nous, on veut restaurer, mais il y a des écosystèmes associés, que sont la Mangrove et les herbiers marins, qu’on a aussi envie de restaurer, pourquoi, parce que comme ils sont interconnectés, c’est important que la Mangrove soit aussi en bonne santé, là où le corail sera en bonne santé. Donc ce sont nos projets de développement, tout à fait.
– Je mets aussi dans la description le lien d’un précédent épisode de Soluble(s) qui parle précisément de la Mangrove et de comment les protéger, alors avec d’autres solutions, avec une biologiste.
Jamila, tu es la fondatrice de l’entreprise Koraï, cela s’épelle K-O-R-A-I, trait d’union. Je mets le lien de ton site dans la description de cet épisode, donc on peut aussi te suivre sur les réseaux sociaux et bientôt en podcast !?
– Tout à fait, on lance bientôt un podcast qui va s’appeler ReGenko et dont l’objectif est de donner les clés aux décideurs pour agir en faveur de l’océan. Donc des clés complètement concrètes, et quand je dis décideurs, en fait, je parle des décideurs économiques, mais aussi politiques et aussi ceux de la société civile.
– Des solutions sont là avec des modèles qui peuvent varier, des modèles économiques, singuliers et qui fonctionnent. Donc depuis 2022, Jamila, merci d’être passée dans cette émission, merci d’être passé dans Soluble(s)!
– Merci pour l’invitation.
– Voilà, c’est la fin de cet épisode. Si vous l’avez aimé, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous. Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site Internet, csoluble.media.
À bientôt
[Musique]
POUR ALLER PLUS LOIN
- Voir : le site de Koraï
TIMECODES
00:00 Introduction
01:03 Le parcours de Jeimila Donty
04:04 Les coraux sont essentiels
08:08 Les canicules marines
11:14 Moins de corail = moins de vie
13:18 Focus sur Madagascar et Koraï
19:24 Son modèle économique
25:36 Merci à Jeimila Donty!
Fin
Propos recueillis par Simon Icard.
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Ecouter aussi
ETRE: le réseau d’écoles des métiers de la transition écologique
Tortues marines menacées : les soigner et les préserver avec Florence Dell’Amico
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