[TRANSCRIPTION] Vert, un média “cool” pour prendre au sérieux le réchauffement climatique
C’est “le média qui annonce la couleur”. Vert est un site d’information et une newsletter gratuite rédigée par des journalistes professionnels. Son infolettre est distribuée chaque jour à midi pile dans les boîtes mails d’une communauté de lecteurs qui reçoit une veille qui traite de l’actualité à travers le prisme de l’écologie.
Écouter plus tardC’est Vert et c’est clair !
“Un média engagé pour le droit de savoir des citoyens sur les questions écologiques”
Soluble(s) a ouvert son micro à Juliette Quef, présidente et cofondatrice du média Vert, pour tout savoir sur cette aventure éditoriale qui a rapidement trouvé son premier public et qui aspire à informer le plus grand nombre en se déployant notamment sur Instagram.
Transcription (automatisée)
Article source : Vert, un média “cool” pour prendre au sérieux le réchauffement climatique
Bienvenue dans cet épisode de Soluble(s) pour un nouveau numéros spécial Découverte.
Vous le savez ici, on a à cœur d’explorer les solutions.
Et aujourd’hui, je veux parler d’un média qui annonce la couleur, qui éfeuille l’inaction climatique et propose des réponses.
– Bonjour, Juliette Quef.
– Bonjour, Simon.
Tu es la cofondatrice de Vert.
On va voir ensemble de quoi ce média numérique est la couleur.
On va parler de votre percée dans le paysage médiatique et comment vous entendez faire bouger les lignes dans la presse.
Mais d’abord, on veut en savoir plus sur ton parcours.
Est-ce qu’on peut dire que ta sensibilité à l’écologie remonte quand même à longtemps?
Mais ce n’est que récemment que tu as bifurqué vers le journalisme.
Oui, comme beaucoup de gens, je suis assez sensible depuis un moment, mais ça s’est fait par étapes.
Avant, je travaillais comme experte pour les comités d’entreprise, notamment sur les questions d’égalité entre les femmes et les hommes, pour plein d’entreprises différentes, pour les salariés.
Et j’ai eu envie de bifurquer, parce que défendre l’emploi dans des grosses entreprises polluantes, à un moment, ça a commencé à me poser problème.
Et donc, j’ai arrêté mon travail et je suis revenue à mes premières passions, qui étaient l’écriture.
Et donc, ça m’a amenée au journalisme.
Vert est en effet un média de l’écrit, un média numérique.
Voyons comment il est Vert.
C’est comme souvent sur une histoire humaine, sur la base d’un constat, peut-être?
C’est une histoire humaine, c’est la base d’un constat.
C’est Loup Espargilière qui était pigiste en fin de droits au chômage, qui l’a créé.
Et il trouvait qu’il y avait vraiment une place dans le paysage médiatique à apprendre, qui n’existait pas, qui était un média généraliste sur les questions d’écologie, justement.
Parce que les grands médias à l’époque n’adressaient pas du tout ces questions.
On parlait très peu, à part quand il y avait des catastrophes ou quand il y avait des copes.
Mais sinon, on ne parlait jamais ni de réchauffement climatique, ni des fondements de la biodiversité.
Et on s’est dit, en fait, il faut un grand média indépendant qui soit là, et c’est l’ambition de Vert toujours aujourd’hui.
Depuis 2020, c’est un rendez-vous quotidien d’actualité avec une communauté de lecteurs.
Vous vous distribuez sous la forme d’une newsletter.
Pourquoi avoir fait le choix de ce format?
Une newsletter, c’est un format qui est très pratique, surtout quand on est peu nombreux, parce qu’on peut l’écrire quasiment tout seul.
Loup l’a écrit pendant tout seul, pendant un bon moment.
Moi, je relisais chaque jour ses articles.
Et c’est vrai que ce format-là permet aussi d’avoir une communauté, permet d’agréger beaucoup de gens, que les gens soient fidèles, et aussi de sortir un petit peu de la logique des algorithmes, puisque quand on a une newsletter, c’est envoyé directement dans la boîte mail des gens, donc on peut beaucoup plus les cibler.
Et vous avez un ton particulier.
On peut même dire que vous avez sans doute eu des diplômes en jeu de mots, je pense, parce que vous soignez particulièrement la forme.
On va en parler, mais d’abord, parlons du fond.
Comment décrirais-tu le positionnement éditorial de Vert?
C’est un média généraliste ?
Ça veut dire qu’on traite l’ensemble des sujets d’actualité au regard de l’écologie.
Parce que pour nous, en fait, on ne peut plus parler du monde économique, des entreprises, des questions de société, des questions politiques, sans les corriger aux grands enjeux de ce siècle, que sont le changement climatique et l’effondrement du vivant.
Donc nous, tous nos sujets sont passés à ce prisme-là.
Et du coup, on peut aussi bien faire une interview politique, un décryptage d’une question de société ou un commentaire d’actualité, mais toujours au regard de ces questions-là.
Un média sur l’écologique, il n’y a pas de rubrique écologique ou écolo, mais c’est toute la tonalité du monde que vous décrivez.
Mais alors, c’est quoi un bon sujet à traiter par le média Vert?
Un bon sujet, ça va être un sujet qui prend en compte ces enjeux-là.
Par exemple, les grandes compétitions internationales ou les grands événements culturels.
Le Festival de Cannes, il y a quelques semaines.
En fait, avoir le Festival de Cannes sans parler d’écologie aujourd’hui, c’est un petit peu absurde que ce soit à la fois la manière dont c’est fait, donc sur la forme.
C’est-à-dire que ce sont des grands raouts qui sont quand même très consommateurs en termes par exemple de déplacements avec beaucoup de personnalités qui viennent en jet, des choses comme ça.
Mais aussi sur le fond, c’est-à-dire dans les films qui sont proposés, il y en a très peu qui proposent des récits qui tendent vers une société désirable, vers une société plus sobre, parce que c’est ce dont on a besoin aujourd’hui pour respecter les limites de notre planète.
Et donc nous ce qu’on essaie de raconter, parce qu’en tant que journaliste, on est un peu des écrivains du quotidien, donc ce qu’on essaie de raconter, c’est l’actualité au regard d’un monde qui doit être de plus en plus sobre.
Alors, il faut quand même réussir à intéresser les gens et manifestement vous y parvenez, tu vas nous parler un peu de vos chiffres.
Je voulais parler de la forme parce que vous soignez particulièrement l’accroche, l’enjeu, c’est donc d’intéresser malgré des sujets qui sont quand même un peu complexes, parfois même anxiogènes.
Tu as tout à fait raison, c’est exactement ce qu’on essaye de faire.
Nous ce qu’on veut, c’est rendre cool les sujets écologiques qui sont souvent vus comme étant de la contrainte, de l’écologie punitive, etc.
Et en fait, on peut intéresser les gens.
Nous, on a un compte Instagram qui est aujourd’hui en train de décoller, on a quasiment passé les 75 000 abonnés sur Instagram.
Et en fait ça fait très peu de temps qu’on fait ça, mais parce qu’on essaie de le faire avec des blagues, on essaie de le faire avec des memes et aussi beaucoup de pédagogies, c’est-à-dire à expliquer les ordres de grandeur, expliquer pourquoi c’est important, pas important, donner un petit peu des directions aux gens qui puissent se faire leur propre avis, mais sur la base de chiffres réels.
Donc par exemple, on a lancé une série de posters en infographies.
L’infographie, c’est pratique parce que c’est des images, ça donne les bons ordres de grandeur et on sait tout de suite de quoi ça parle.
Si quelqu’un nous dit que l’avion ne consomme pas beaucoup d’énergie ou de ressources, on va dire que l’énergie, c’est dix fois plus polluant que le train ou, etc.
On va pouvoir remettre dans la tête des gens des ordres de grandeur et c’est super important.
Et c’est 50 fois plus polluant, il me semble, (à vérifier).
On verra, mais on a fait ça assez clair.
Créer un média, c’est une aventure collective.
On entend dire : “on” dans beaucoup de tes phrases.
Parle-nous de la composition de votre équipe.
Vous êtes basée où en France?
On est à Paris.
On a aujourd’hui quatre journalistes qui travaillent à Vert au quotidien, qui sont salariés de l’équipe.
Et puis on a aussi Gaëtan, Gaëtan Gabriel, qui est un peu le visage de Vert sur Instagram et qui fait des vidéos.
Donc beaucoup de blagues, sa spécialité c’est les blagues et l’écologie.
Donc ça tombe bien, c’est aussi ce qu’on aime à Vert.
Donc voilà, on est une petite équipe.
On a vocation à grandir puisqu’en septembre, on va accueillir trois nouvelles personnes normalement.
Alors on le sait, les journalistes n’ont pas toujours bonne presse.
Hélas, il y a parfois des a priori.
Je voudrais te poser une question que les gens se posent souvent.
Est-ce qu’être un média engagé pour l’écologie, c’est être un média partisan?
On n’est pas spécialement engagé pour l’écologie, on est plutôt engagé pour le droit de savoir des citoyens sur les questions écologiques.
Il y a une petite nuance pour nous parce que, effectivement, si tu es engagé directement pour l’écologie, ça peut être considéré comme militant.
Et en fait, nous, on revient tout le temps aux faits.
On revient aux faits scientifiques, on revient à ce que disent, par exemple, les experts du GEC.
Donc, en faisant ce pas de côté, en revenant justement aux faits scientifiques et en décryptant dans l’actualité, en faisant ce pas de côté, on réussit à prendre une distance critique qui est la déontologie du journaliste, qui doit toujours effectivement bien avoir en tête à la fois de croiser ses sources, de vérifier l’information et de pas se jeter n’est dans l’eau comme ça vers quelque chose qui serait trop engagé, trop militant.
Alors, je voudrais parler de votre modèle économique, parce que c’est quand même le nerf de la guerre.
Il faut payer des salariés, il faut faire fonctionner tout ça.
Mais l’accès est gratuit à ce média.
Vous financez comment votre développement, vos activités?
Il faut bien dire qu’on est un média indépendant.
C’est-à-dire qu’on n’a pas de pub, on n’a pas de gros actionnaires, on est financé par aucun parti politique, donc on ne reçoit pas de l’argent extérieur.
On est financé à 70 % par les dons de nos lecteurs.
On produit d’ailleurs un rapport d’impact qu’on a sorti il y a quelques semaines où on explique concrètement quelles sont nos ressources et ce qu’on fait avec l’argent des gens.
C’est très important pour nous d’avoir cette transparence.
Et puis, on fait aussi un peu de formation dans les autres médias.
Donc, on forme nos confrères et consœurs journalistes aux enjeux écologiques et on reçoit un peu de subventions publiques.
Voilà un peu nos ressources.
Et surtout, ce qu’on a fait dernièrement, c’est qu’on a lancé le club de Vert.
Alors, le club, c’est quoi?
C’est aujourd’hui plus de 2500 personnes qui nous soutiennent chaque mois pour que Vert existe et grandisse.
Donc, ce sont des contributeurs mensuels.
Et vu qu’ils font partie du club, on les consulte aussi sur certaines décisions de Vert.
Voilà, tel partenariat, telle idée qu’on a, on va les consulter sur ces grands changements pour Vert.
Parce qu’on veut vraiment construire un média qui prenne en compte les citoyens.
Parce que tu l’as dit, il y a une grande défiance des citoyens à l’égard de la presse.
Donc, nous, on veut vraiment réconcilier citoyens et journalistes autour de ce média, autour de plus généralement des enjeux écologiques.
Alors, poursuivons sur ce thème.
Comment toucher des internautes qui ne se sentent pas a priori ou à premier vue intéressés par l’information et peut-être encore moins par l’écologie?
Ça passe par le ton, tu l’abordais un peu avant, mais vous avez une stratégie en particulier pour faire toucher des nouvelles personnes.
Oui, ça passe beaucoup par l’humour.
Nous, on pense que c’est vraiment un ton qui touche la majorité des gens parce qu’en fait, par l’humour, par le rire, tu peux vraiment commencer à toucher des gens qui sont très éloignés de ces sujets-là.
Ça, c’est notamment sur les réseaux sociaux.
Donc nous, dans la newsletter, on utilise les jeux de mots, ces petites astuces de langage, ces accroches, un style aussi qui va être assez écrit.
Donc voilà, on travaille pas mal le style à Vert.
Et puis, ça passe aussi par l’incarnation.
Chaque journaliste peut poster sur ses réseaux sociaux ses articles et du coup, affirmer aussi son propos.
On essaie d’avoir aussi les visages des journalistes qui sont affichés en bas de la newsletter pour qu’on puisse, voilà, on est facilement accessible.
En fait, nos lecteurs peuvent nous contacter sur les réseaux sociaux.
Ça, ça favorise aussi la confiance.
Comment tu vois les prochaines étapes de ton média?
L’écologie, c’est le sujet du siècle.
On pense que, voilà, on va devenir mainstream demain.
Peut-être pas demain, mais en tout cas, l’ambition, c’est vraiment de devenir un grand média, de rester indépendant et de toucher le plus de monde possible.
Parce qu’aujourd’hui, il y a quand même quatre Français sur dix qui ne sont pas convaincus que le changement climatique est directement lié à nos activités humaines.
Ça, c’est grave.
Il faut qu’on s’attaque frontalement à ce problème.
Il faut qu’on y aille, voilà, avec détermination et sérieux et puis aussi légèreté et humor.
Et ça devrait être en tout cas, c’est ton combat, ta démarche aussi, une démarche de l’ensemble des médias en France notamment.
Parlons de cette démarche que tu as contribué à initier.
Il s’agit d’une charte en 13 points.
Elle est donc proposée à ta profession et aux médias afin de hisser le journalisme à la hauteur de l’urgence écologique.
Les lignes commencent à bouger parmi les confrères.
Il y a plus de 1800 journalistes individuellement qui ont signé cette charte aujourd’hui.
Elle a un gros succès.
Plus de 200 organisations, dont une centaine de médias.
Les 14 écoles de journalistes reconnues par la profession.
C’est vraiment une charte qui, quand elle est sortie en septembre 2022, a eu un impact relativement important.
Ce qui est intéressant, c’est qu’on voit beaucoup de médias aujourd’hui se repositionner sur ces enjeux-là, sortir leurs propres chartes et aussi se poser beaucoup de questions en interne.
Je pense qu’il y a une vraie interrogation de toute notre profession.
J’expliquerai quand même une certaine presse d’extrême droite qui ne se pose pas encore ces enjeux-là, ces questions-là, et qui sort toujours des articles extrêmement problématiques, qui donnent la parole à des climatosceptiques.
Mais sinon, les autres, globalement, sont quand même dans une démarche de se poser des questions.
Parfois, ils ne vont pas du tout assez loin.
Ça va aussi remettre en question les modèles économiques.
Les médias sont très liés à la publicité.
Comment est-ce qu’on fait quand on a un article qui, d’un côté, dénonce l’impact des SUV et de l’autre une publicité pour des SUV?
Il y a quand même une incohérence.
C’est pour ça qu’on demande plus généralement, notamment via notre syndicat, le SPIL, pour une presse indépendante, à avoir des États généraux de la presse pour qu’on se pose collectivement ces questions-là, que ça aille aussi à l’Assemblée nationale et plus généralement, que ce soit pris en main par l’ensemble des citoyens parce que ce sont des questions démocratiques, des journaux libres, des journaux qui ne sont pas sous le joug de milliardaires comme Vincent Bolloré, par exemple, aujourd’hui.
C’est le gage d’une information de qualité sur ces sujets hyper importants qu’on a évoqués aujourd’hui.
Un nouveau prisme donc à généraliser pour les nouvelles générations qu’on entendait un petit peu pendant que tu parlais derrière toi dans l’environnement sonore où tu es.
Juliette Quef, cofondatrice et présidente de Vert, le média qui annonce la couleur.
Je mets dans la description de cet épisode les liens pour vous lire, s’abonner gratuitement, mais c’est facile, on passe par Internet, c’est vert.eco.
Oui, sur le site directement vert.eco, il y a un onglet “Je m’inscris” et c’est en accès libre, tous nos contenus sont gratuits, vous pouvez télécharger les posters et vous inscrire à la newsletter gratuitement.
Merci Juliette d’être passée dans Soluble(s).
Merci beaucoup Simon de ton initiative.
Voilà, c’est la fin de cet épisode.
Si vous l’avez aimé, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous.
Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site Internet csoluble.media A bientôt !
Écoutez l’épisode complet. (Seul le prononcé fait foi)
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La “Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique”
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TIMECODES
00:00 Introduction
00:48 La bifurcation professionnelle de Juliette Quef
01:30 La naissance de Vert, le média
02:04 Un rendez-vous quotidien au moyen d’une newsletter
03:00 Un média généraliste
06:08 Une équipe de journalistes professionnels
06:54 “Un média engagé pour le droit de savoir des citoyens sur les questions écologiques”
07:57 Quelle indépendance économique ?
09:07 L’humour pour toucher les personnes éloignées de l’info et de l’écologie
10:12 La suite de Vert ?
10:54 Avec une charte pour le journalisme à hauteur de l’urgence écologique, les médias se mettent de plus au vert
12:55 Merci à Juliette Quef !
Fin
Propos recueillis par Simon Icard.
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