La soumission chimique : un phénomène criminel à combattre
Le procès des viols de Mazan, qui se tient jusqu’en décembre 2024, met en lumière une méthode criminelle particulièrement vicieuse : la soumission chimique.
Cinquante-et-une personnes, dont Dominique Pélicot, l’ex-mari de Gisèle Pélicot, sont accusées d’avoir utilisé cette méthode pour endormir puis violer.
Gisèle Pélicot dont le corps a été livré à au moins 83 violeurs sur une période de près de 10 ans.
Pour Soluble(s), Arnaud Gallais, anthropologue et activiste des droits de l’enfant, cofondateur de l’association « M’endors pas : stop à la soumission chimique« , livre ses pistes de solutions pour “qu’il n’y ait plus de Gisèle”, pour faire échec à ce procédé qui transforme les médicaments en armes de viols.
La soumission chimique : une arme criminelle
La soumission chimique consiste à utiliser des substances chimiques pour endormir une personne et la rendre vulnérable à des agressions sexuelles. Dominique Pélicot, par exemple, a systématiquement augmenté les dosages de médicaments pour endormir sa femme et la livrer à d’autres hommes recrutés par Internet. Les médicaments utilisés peuvent inclure des somnifères, des antidépresseurs, et d’autres substances facilement accessibles en pharmacie. Contrairement à certaines idées reçues, la soumission chimique ne se limite pas à l’usage de GHB, plus connu sous le nom de « drogue du violeur ».
Un problème de santé publique
Arnaud Gallais souligne que la soumission chimique est un problème de santé publique majeur, “souvent passé sous les radars”. Les victimes peuvent présenter des symptômes tels que des pertes de mémoire, des maux de tête ou des affections gynécologiques. Il est crucial que les médecins soient formés à repérer ces signes, car les victimes sont souvent en état de sidération ou d’amnésie et ne comprennent pas ce qui leur arrive.
Selon une enquête nationale sur la soumission chimique menée par l’ANSM, 721 signalements suspects ont été recensés en 2021, dont près de 85 % après des dépôts de plainte. Parmi eux, 82 sont qualifiés de soumissions « vraisemblables ».
Profil des agressions
Il n’y a pas de profil type pour les agresseurs ou les victimes de soumission chimique. Cependant, les violences sexuelles sont majoritairement commises par des hommes contre des femmes et des enfants. Le procès Pélicot qui se tient devant la cour criminelle de Vaucluse illustre cette réalité, avec 51 hommes accusés face à une femme victime.
En 2021, 57 des 82 cas de soumission chimique vraisemblable concernaient des femmes, et 25 des hommes. 22 cas d’emprise concernaient aussi des mineurs, dont 15 de moins de 15 ans.
La lutte contre la soumission chimique
Pour lutter contre ce phénomène, Arnaud Gallais et l’association “M’endors pas” proposent plusieurs pistes :
- Formation des médecins : Les professionnels de santé doivent être formés à repérer les signes de soumission chimique et à réagir de manière appropriée. Comme le souligne Ghada Hatem-Gantzer, docteure et fondatrice de la Maison des Femmes du 93, « ni les médecins traitants ni les spécialistes ne sont familiers des conséquences de la soumission chimique sur leurs patients ».
- Ordonnances sécurisées : Utiliser des ordonnances sécurisées pour limiter l’accès aux médicaments détournés. Par exemple, le Rivotril, un antiépileptique identifié comme un agent de soumission chimique puissant, est aujourd’hui prescrit via une ordonnance sécurisée.
- Évolution de la loi : La députée Sandrine Josso, droguée à son insu par un sénateur en novembre dernier, s’est d’ailleurs vue confier une mission gouvernementale sur la soumission chimique.
De plus, la Fondation des Femmes, dans une tribune publiée par Libération, demande une « loi intégrale contre les violences sexuelles » face à une société et une justice engluées dans « la culture du viol ». Cette loi prévoirait notamment des enquêtes systématiques sur les mis en cause, interdirait celles sur le passé sexuel de la victime, et systématiserait la récolte et la conservation des preuves de la soumission chimique.
- Prévention et éducation : L’éducation nationale doit jouer son rôle clé dans la prévention, en abordant ces sujets de façon adaptée à chaque âge dès la maternelle.
La culture du viol et la victimisation secondaire
Le procès Pélicot met également en lumière la « culture du viol », où les agresseurs minimisent leurs actes et où la société tend à excuser ces comportements. La victimisation secondaire, où la victime est replongée dans ses souffrances par le processus judiciaire, est aussi un problème majeur à résoudre. Arnaud Gallais appelle à une prise de conscience collective et à une meilleure protection des victimes pendant les audiences judiciaires.
« M’endors pas » appelle à une mobilisation citoyenne et politique, écoutez.
POUR ALLER PLUS LOIN
- Site de l’association : mendorspas.org
- Lire aussi le livre : « J’étais un enfant » par Arnaud Gallais et Ixchel Delaporte, chez Flammarion.
Des dispositifs d’écoute anonymes et gratuits existent : (France)
- France Victime : 116 006 (7j/7 ; 24h/24) www.france-victimes.fr
- Violences Femmes Info : 3919 (7j/7 ; 24h/24) + accès sourds et malentendants
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