Quand la galère de transport vous cloue sur place, que faire ? Pour Soluble(s), Sébastien Bailleul, directeur du plaidoyer de l’association Wimoov explique comment ce nouveau métier donne à chacun les clés pour (re)prendre la route de l’autonomie.
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📄 Résumé

Image : Wimoov
Transcription (Automatisée)
Simon Icard : Ravi de vous savoir à l’écoute ! Bienvenue dans un nouvel épisode de Soluble(s). Aujourd’hui, je veux médiatiser une solution à une forme de précarité qui pèse sur les déplacements de quinze millions de Françaises et de Français. Et vous allez l’entendre. Un nouveau métier solidaire émerge. Bonjour Sébastien Bailleul.
– Sébastien Bailleul : Bonjour Simon.
– Simon Icard : Tu te définis comme un « provocateur de mobilité« . Tu es directeur des partenariats, de la communication et du plaidoyer chez Wimoov. C’est une association qui agit pour redonner de la liberté aux gens. Car on va le voir, la mobilité, c’est bien plus que se déplacer. C’est accéder à un boulot, garder du lien social, retrouver de l’autonomie ou parfois juste souffler un petit peu. Et le constat est là, en deux ans, d’après vos chiffres, vous avez évalué dans une étude que les difficultés se sont aggravées.
Il y a 1,7 million de personnes en plus qui galèrent à bouger. Ce sont des étudiants, des actifs, des retraités, en ville ou à la campagne, bref, un peu partout sur le territoire. On va voir ensemble pourquoi c’est important de lever les freins à la mobilité.
Et tu nous expliqueras concrètement ce que font les conseillers mobilité, car c’est un métier que vous avez créé. Ils sont là pour mettre en avant des solutions, car des solutions existent. Mais d’abord, vous le savez, je me montre toujours curieux du parcours de mes invités en début d’épisode. Sébastien, comment tu t’es retrouvé à travailler, à débloquer les déplacements des gens ?
– Sébastien Bailleul : Bonne question ! Alors déjà merci pour l’invitation. Alors moi effectivement, comment je me suis retrouvé chez Wimoov? J’ai presque envie de dire par hasard. Et en même temps, c’est pas complètement vrai. Moi, j’ai travaillé pendant un peu plus de quinze ans dans le milieu de la solidarité internationale et des ONG. J’ai travaillé pour des ONG comme Action contre la faim, pour des collectifs d’associations et beaucoup sur les enjeux d’accès aux droits. Les droits humains. Le droit international. Les enjeux de réchauffement climatique. Les mobilisations autour du climat. Pour ceux qui s’en rappellent, on a été quelques dizaines de milliers de personnes à marcher dans les rues en France pour faire valoir justement cet enjeu-là. Et donc ça, ça a été mon domaine pendant plus de quinze ans. Et j’ai eu besoin, à un moment donné, d’aller vers un projet qui a toujours du sens et peut-être plus concret, avec un impact aussi plus mesurable, dans le sens où quand on fait du plaidoyer à l’international, c’est souvent très macro. Et voilà, j’avais envie de toucher du doigt des choses autour de chez moi et en fait, je suis tombé presque par hasard sur une annonce de Wimoov. D’abord pour être directeur régional Île-de-France et j’ai postulé. Puis ça a été une belle rencontre, notamment avec Florence Gilbert, la directrice générale et. Et finalement, très vite, je me suis rendu compte que la mobilité, comme tu le disais dans ton introduction, ce n’est pas qu’une question de déplacement. Et quand on tire le fil de la mobilité, et ça, ça a fait écho à tout ce que j’ai fait avant sur ces enjeux sociaux d’accès aux droits et enjeu écologique et environnemental.
Qu’est-ce que la précarité mobilité ?
– Un travail qui te permet de continuer à travailler en exprimant du sens et de l’impact. Tu as dit le mot concret. On va plonger justement dans le concret, dans la vie quotidienne. Alors, on connaît la notion de précarité alimentaire, on connaît aussi celle de précarité énergétique par exemple. Mais ton association agit et alerte sur ce qu’elle nomme la précarité mobilité. Alors pour bien comprendre la suite de cet épisode, peux-tu nous dire ce que ça signifie ? Qu’est-ce que vit une personne en situation de précarité Mobilité ? C’est une réalité aux multiples visages, aux multiples conséquences.
– Effectivement, c’est, non mais c’est important de commencer par là. Qu’est ce qu’on met derrière le terme précarité mobilité ? Nous Wimoov ça fait. Ça fait vingt cinq ans qu’on agit sur ces enjeux de mobilité. Au départ, on était plutôt sur les questions de covoiturage entre étudiants, entre jeunes et donc forcément aussi sur les enjeux de sécurité routière liés à cette jeunesse qui malheureusement a une forte accidentalité encore aujourd’hui, quand on parle de la route et et quand on a commencé à à être plus investis sur ces enjeux de mobilité. Très vite, la mobilité, elle a émergé aussi comme étant un frein à l’insertion sociale, l’insertion professionnelle. Et on reviendra, je pense, après sur le métier de conseiller mobilité, ce qu’on fait concrètement. Mais il y a un moment donné, il a fallu qu’on puisse donner à voir quelle est la situation. Et en chiffres. Et c’est comme ça qu’on a créé, début deux mille vingt, un baromètre, un baromètre des mobilités du quotidien qui est effectivement, comme tu disais, une une large enquête où on interroge tous les deux ans plus de douze mille Françaises de plus de dix huit ans sur leur mobilité. Comment ils se déplacent ? avec quoi? Est-ce qu’ils renoncent à se déplacer ? Est-ce qu’ils connaissent les aides à la mobilité pour passer à un véhicule électrique, acheter un vélo, etc etc, etc. Et dans le cadre du baromètre, il nous a semblé important de pouvoir chiffrer et donner à voir finalement le poids que représente cette précarité mobilité. Et on a développé un indicateur, un indicateur de précarité pour l’expliquer rapidement et simplement, c’est un indicateur qui vient regarder, d’une part, toutes les personnes qui disent n’avoir aucune solution de mobilité autour de chez eux ou chez eux, c’est-à-dire en gros, je n’ai pas de vélo, vieux vélo dans mon garage, j’ai pas de bus ou de transport autour de chez moi, je n’ai pas le permis et donc je ne conduis pas. Et ça, ça représente à peu près dix pour cent des Françaises et des Français en France qui qui disent n’avoir aucune solution pour se déplacer, c’est à peu près cinq millions de personnes. Ceux-là, on peut les considérer même en très grande précarité, mobilité puisqu’ils sont en incapacité de bouger. Et puis on a toutes les personnes qui, elles, vont avoir une dépendance à leur voiture individuelle. Les personnes qui sont à faibles revenus et qui ont des fortes dépenses de carburant, qui font des longues distances au quotidien, ou des personnes qui n’ont pas d’autre alternative que d’utiliser leur voiture. Et ça, ça représente près de vingt pour cent de la population française. Vingt pour cent plus dix, c’est très. Trente pour cent, c’est quinze millions de personnes qui sont en précarité. Mobilité, ça ne veut pas dire que ce sont quinze millions de personnes qui aujourd’hui ne se déplacent pas, mais ce sont des personnes qui, si elles sont confrontées à des difficultés, un véhicule qui tombe en panne, une galère, je perds mon emploi et je n’ai plus les moyens de pouvoir assurer mon véhicule ou de me prendre un abonnement de transport. Et bien celles-ci vont être amenées à devoir renoncer à se déplacer. Et dans le baromètre, on sait que c’est quarante pour cent des Français qui ont déjà renoncé à un déplacement ces cinq dernières années du fait d’une problématique de mobilité. Voilà de quoi on parle. Alors effectivement, après, ce sont des situations de vie.
– Oui, et des situations de vie, c’est très clair. Alors, sans être trop naïf de mon côté, je me demande pourquoi autant de gens sont concernés. Pourquoi le problème ne fait qu’augmenter ces dernières années? Selon votre étude. Quand on pense déplacement individuel, on pense immédiatement, et tu le disais à la place de la voiture que l’on possède ou que l’on ne possède pas. Se retrouver en situation de précarité, mobilité, c’est donc aussi devoir parfois renoncer à des déplacements essentiels, perdre des opportunités.
Le rôle et la méthode du conseiller mobilité
Je le disais Wimoov, ton association agit partout en France et notamment a structuré son accompagnement autour du conseil pour rechercher des solutions aux problèmes que rencontrent les gens que vous suivez. Alors pour comprendre, c’est à mi-chemin entre le travailleur social et le coach individuel ? Comment on définit cette activité ?
– Oui, c’est, c’est une bonne définition, effectivement. En fait, le métier de conseiller mobilité, c’est. C’est vraiment la pierre angulaire chez Wimoov. C’est la personne qui d’une part, va accompagner des personnes qui sont en difficulté, mais c’est aussi une personne qui va faire le lien avec un réseau de partenaires sociaux qui vont nous orienter, des personnes en difficulté, des missions locales, des CCAS, France Travail, etc, etc. Et puis c’est aussi la personne qui va être en lien avec les porteurs de solutions, donc les opérateurs de transport, les lignes de transport collectif avec les vélo-école, les garages solidaires, les auto-écoles sociales, etc, etc. Et finalement, effectivement, c’est un métier qui croise le social, mais aussi l’environnemental, parce que de fait, on sait qu’aujourd’hui une voiture, une voiture individuelle, ça coûte cher et pour beaucoup ça n’est pas la solution et ça n’est souvent pas la meilleure solution pour se déplacer. Et donc du coup, on va plutôt aller vers des solutions alternatives à la voiture : transports collectifs, vélo, autopartage, covoiturage, etc, etc. Donc il faut une connaissance fine de son territoire et des solutions qui existent pour pouvoir bien orienter. Partant de la situation de la personne vers les bonnes solutions.
– Je rebondis sur ce que tu dis. Tu dis Pour certaines personnes, la voiture individuelle qu’ils utilisent au quotidien n’est pas la bonne solution. Tu fais référence à son cou, à son cou à quoi précisément ?
– Oui en fait, c’est peut-être que c’est important aussi de donner quelques quelques illustrations de qui on parle en fait. Quand on est en précarité mobilité, nous, on accompagne tout type de personne sur tout type de territoire. Et ça peut être par exemple des demandeurs d’emploi qui vont venir en disant moi, j’ai besoin absolument de la voiture pour pouvoir pouvoir pouvoir accéder à un emploi, une formation. Et quand on regarde, c’est que ce sont des personnes qui, aujourd’hui, ont des revenus insuffisants pour pouvoir s’engager, par exemple dans un projet. Permis de conduire. Souvent, ils ont une urgence à avoir un emploi, un permis de conduire. Aujourd’hui, c’est entre douze et dix-huit mois pour entre le moment de l’inscription et le moment de l’obtention. Une fois qu’on l’a. Il faut aussi envisager l’achat d’un véhicule. On sait que les prix. Que ce soit de l’occasion ou du moins, je ne parle même pas du neuf sont, sont assez exorbitants et pour beaucoup, l’accès à un véhicule personnel est difficile. Et puis après, il y a l’entretien, l’assurance, etc, etc. C’est un budget qui est de cinq à six mille euros par an quand on a un véhicule. Donc quand on est demandeur d’emploi par exemple, la voiture n’est pas toujours la bonne solution. On a beaucoup de jeunes aussi quand on parle de précarité. Mobilité. Tu parlais de perspectives qui se referment quand on est un jeune dans un milieu périurbain ou rural. Effectivement, on va faire le choix de ses études en fonction de l’école la plus proche et et et souvent l’accès à la voiture ou un scooter etc est compliqué, difficile, etc. Et puis la voiture, c’est pour beaucoup de seniors et pour, c’était, c’était le seul et unique moyen de se déplacer. Mais quand on avance en âge, quand on est face, confronté à, à des, à des pathologies, à des maladies, etc, on se retrouve parfois en incapacité de conduire. Et quand on se retrouve du jour au lendemain sans la capacité de prendre le volant, eh bien le risque, c’est clairement une situation d’isolement, un sentiment d’assignation à résidence. Et c’est là où les solutions alternatives, elles sont nécessaires. Et c’est là où la connaissance du conseiller mobilité pour orienter vers ces solutions et est primordiale.
– On va évoquer dans un instant les solutions que vous avez à votre main, dans votre réseau. En t’écoutant, je me dis que si le métier de conseiller mobilité répond à des besoins concrets, c’est que construire sa mobilité personnelle requiert, si j’ose ces mots, des compétences à acquérir. Je pense à l’existence de nombreuses aides publiques, des aides solidaires, citoyennes. Mais il faut le reconnaître, ce n’est pas toujours facile de s’y retrouver parmi elles. Peut-on parler de compétences justement pour bien se déplacer ou d’apprentissage ?
– Oui, c’est, nous, C’est ce qu’on porte depuis plus de vingt ans. C’est de dire que la mobilité, c’est une compétence qui doit se développer dès le plus jeune âge et jusqu’à jusqu’à jusqu’à son plus vieil, son plus vieil âge justement. On parle de continuum éducatif dans la mobilité pour nous. Parce que ce que je viens de dire, par exemple, en prenant l’exemple d’une personne senior, c’est qu’on a des changements, on a des changements de vie, on est rythmés. Dans la vie, il y a des grandes étapes. On est un enfant, un élève, on devient un étudiant, de l’étudiant, on devient un actif, de l’actif, on devient un retraité. Et à chaque étape de la vie, on va changer de situation. Et dans les changements de situation, la mobilité va souvent changer également. Mais elle n’est pas souvent réfléchie et pensée ou anticipée. Donc pour Wimoov, il est important justement de pouvoir développer cette compétence à des âges charnières. Et c’est là où le conseil en mobilité peut être un outil utile pour ça, c’est de mesurer justement la situation du moment et quels sont les meilleurs moyens, les meilleures façons de bouger. Parce qu’on parle beaucoup de l’emploi, mais voilà, quand on est célibataire et qu’on monte une famille et qu’on a des enfants, il va falloir amener les enfants à l’école, aux activités culturelles, se déplacer pour aller vite au boulot derrière, etc, etc. Et là, comment on fait ? Concrètement, comment ça se passe et quels sont les moyens qui sont à ma disposition pour pouvoir le faire ?
– Oui, parce que c’est des questions que tout le monde se pose quand on cherche à se loger par exemple, où sont les lieux essentiels autour de son logement ?
Les solutions alternatives et l’impact social
Mais je le disais, le but de votre côté est de redonner du pouvoir d’agir. C’est-à-dire que parfois, on subit la situation selon le lieu où on habite ou par des changements de vie que tu expliquais. Est-ce qu’on peut parler là aussi parfois de freins très personnels qui peuvent exister parfois, je pense, tu l’évoquais, à l’isolement de certaines personnes qui peuvent nous écouter quand on est sans voiture, dans un quartier peu desservi par les transports, ou alors que tout le monde ne peut pas se mettre justement au vélo par exemple. Dans ces conditions, on le sait, il y a parfois de la solidarité, même beaucoup. Entre les gens, dans les villages, dans les quartiers. Il y a des solutions de type covoiturage informel qui existent entre voisins. Mais qu’en est-il des solutions plus organisées, plus structurées ? Dirais-tu qu’on progresse ces dernières années en France sur ce sujet ? Est-ce que tu peux nous donner des solutions alternatives justement. Alors, on commence par le covoiturage peut-être ?
– Oui, alors c’est vrai que je pense que c’est important de. Alors, il y a deux choses dans ta question. La première, c’est que, effectivement, il y a. Il y a eu, il y a et on espère, il y aura toujours de la solidarité à l’échelle des territoires, au niveau local. Et ça se traduit très concrètement, comme tu le dis, sur du covoiturage informel. Je fais appel à mon voisin, à un proche, à ma famille pour pouvoir m’amener à mon rendez-vous, à mon entretien pour une formation à l’emploi, au rendez-vous médecin, à aller faire mes courses, etc, etc. Ça, c’est important, c’est utile et ça fait partie, ça fait partie de cet écosystème de la mobilité informelle, etc, etc. Mais pour nous, je pense que c’est aussi important d’avoir en tête que tout ça, ça doit et ça peut se professionnaliser. On voit, on voit de part notre, notre activité qu’on a un impact concret sur les gens. Typiquement, les personnes qui sont en insertion professionnelle, c’est un bénéficiaire sur deux de Wimoov. Cinquante-deux pour cent qui retrouvent un emploi ou une formation à l’issue de notre accompagnement, c’est quatre-vingt-seize pour cent des seniors accompagnés qui disent avoir un sentiment d’isolement moindre à l’issue de notre accompagnement. Soixante-deux pour cent d’entre eux qui disent avoir plus de lien social. Et ça, c’est bien un métier qui qui qui permet tout ça. Et effectivement, ce métier s’appuie sur des solutions. On parle du covoiturage, mais on a l’autopartage dans les milieux périurbains et urbains. On pense que la voiture ne sera pas la solution ad vitam aeternam et sur tous les territoires, et qu’il faut peut-être envisager de la partager. L’autopartage le permet. Mais il y a aussi les transports collectifs. Développer les transports collectifs et les adapter à la réalité des territoires, c’est nécessaire, c’est important. Mais pour ça, ce qu’on dit aussi, c’est qu’il faut partir des besoins et de la réalité vécue. On pense beaucoup le transport et la mobilité en grands termes d’infrastructures, de grandes lignes. On parle beaucoup de TGV, du train, du ferroviaire, des autoroutes, etc, etc. Nous, ce qu’on voit, c’est que la précarité mobilité, elle est bien plus forte dans les territoires peu denses que dans les territoires urbains. Quand on est dans une grande métropole, j’ai envie de dire, c’est relativement facile. L’important, c’est d’avoir l’information et c’est ce qu’on va faire, notamment vis-à-vis des seniors, des habitants qui sont plutôt dans les zones périurbaines. C’est donner accès à l’information, savoir quelles sont les lignes de transport, les lignes de bus, à quelle heure, comment est-ce que j’ai le droit à un abonnement, etc, etc. Par contre, dans les territoires peu denses, là on rentre dans une difficulté, c’est que les solutions de l’urbain ne trouvent pas leur modèle économique et donc sont moins développées. Et c’est là où la solidarité rentre en jeu. Donc nous, ce qu’on dit, c’est qu’il faut partir des territoires, travailler avec les collectivités territoriales, les opérateurs, grands opérateurs Transdev, Keolis, SNCF, etc, etc pour avoir des solutions qui soient adaptées et surtout multimodales. Quand on parle de précarité, mobilité, nous, notre objectif, c’est ce que tu disais. En fait, ce qu’on aime dire c’est on veut redonner la possibilité de choix aux personnes. En fait, les personnes devraient être en capacité de choisir. Est-ce que j’ai, je choisis ma voiture parce que je n’ai pas d’autres solutions, mais parce que j’en ai besoin. Là, j’ai trois gamins à transporter, on part en vacances. Effectivement, ce sera peut-être le plus simple. Par contre, pour les amener à l’école à moins de trois kilomètres de chez moi, est-ce que je n’aurais pas à disposition un vélo à assistance électrique qui me permet de les transporter et que je vais louer sur une courte durée ? Développer la multimodalité et l’intermodalité, c’est une clé des mobilités de demain. Et c’est bien cette notion de choix qui est importante.
L’accompagnement concret et le diagnostic de mobilité
– Tu parlais des personnes en recherche d’emploi en insertion professionnelle. Wimoov travaille avec France travail, pour France Travail peut être si je suis plus précis…
– Avec et pour.
– Avec et pour. Et donc si on prend cet exemple d’accompagnement avec un conseiller mobilité, ça se concrétise par une série de rendez vous avec un objectif à la fin?
– Ouais ouais. Concrètement, en fait, le modèle de l’accompagnement, on va travailler avec une structure qui va nous orienter une personne. Donc là, dans l’exemple, ça peut être un conseiller France Travail qui, dans le cadre de son accompagnement pour l’emploi, va identifier une personne qui arrive souvent en retard à son rendez-vous, a des difficultés parce qu’il a une zone de recherche qui est très limitée. Et le conseiller France Travail va se dire tiens, là, il y a peut-être un sujet sur la mobilité. Ils vont orienter la personne vers vers Wimoov. Et nous, notre objectif, c’est de partir de la situation de la personne. Donc, on va faire un diagnostic de mobilité. Pour ça, on a un outil qui est un test mobilité. C’est un questionnaire à choix multiples. Il y a une quarantaine de questions, un peu à l’image des questionnaires qu’on remplit sur les plages quand on s’ennuie à la plage. Et on a les petits carrés, les petits ronds, les petits triangles à la fin qui nous donne un profil. C’est un peu ce même type d’outil, sauf que ça a été fait avec des professionnels de la mobilité, des sociologues, etc. Mais ces quarante questions nous donnent un profil de mobilité de la personne. Donc en gros, ça va nous permettre de voir quelles sont ses compétences et quels sont ses freins dans les freins. En gros, on a trois grandes catégories de freins. On a des freins qui paraissent assez évidents. On en a déjà parlé, les freins financiers. J’ai pas de budget, j’ai pas d’argent, etc. Les freins matériels, j’ai pas les moyens matériels de pouvoir me déplacer. Il y a beaucoup de freins qui relèvent plutôt de freins cognitifs ou psychosociaux, que l’on va travailler plutôt de façon pédagogique. Donc on a ces catégories-là. On va avoir le profil de la personne et à partir de là, on va construire avec elle un parcours d’accompagnement pour l’orienter vers la solution qui la ou les solutions qui lui correspondent le mieux. Typiquement, je suis demandeur d’emploi, il y a un réseau de transport autour de chez moi. On va travailler à la connaissance du réseau de transport. Quelles sont les lignes de bus ? Quelles sont les lignes de trains ? À quelle heure depuis chez moi ? Combien de temps ? Quels outils numériques, je vais pouvoir utiliser pour préparer mon déplacement ? Ça, c’est La petite parenthèse, on intervient beaucoup auprès de jeunes et autant les outils type TikTok, Snapchat, etc. C’est super connu de tous les jeunes et ils utilisent peut-être un peu trop au quotidien, autant quand on leur parle d’applications. Bon je parle pour l’Île-de-France parce que j’ai été directeur Île-de-France pour Wimoov d’Île-de-France Mobilités par exemple, ou RATP. Ils n’ont pas sur le téléphone, ils n’ont jamais ouvert et ils connaissent à peine l’existence de ce truc-là. Et donc du coup, on va travailler la connaissance des lignes, la connaissance des outils et puis on va accompagner à pouvoir monter des dossiers, par exemple pour avoir une tarification solidaire ou sociale. On prend souvent un exemple. On avait rencontré un jeune qui multipliait les amendes dans le bus et il se faisait, il se faisait souvent contrôler et il se prenait des amendes et et il a fallu juste discuter avec lui pour lui dire, mais en fait, est-ce que tu sais que, au vu de ton âge et ta situation, tu as le droit à un abonnement gratuit, des transports et ce genre de situation ? C’est ça que permet le parcours d’accompagnement ? Donc ça, c’est un exemple sur les transports, mais par exemple ça peut être le vélo aussi pour des personnes qui bossent en horaires décalés, qui doivent partir très tôt le matin. Il n’y a pas de bus pour aller à la gare la plus proche avec le vélo. La solution pour juste faire le dix kilomètres qui les séparent de la gare. Mais une personne qui n’est pas en sereine à l’idée de prendre un vélo, on va l’orienter vers la vélo-école du coin pour faire un stage de remise en selle et avoir les bons, les bons réflexes et la bonne pratique du vélo dans son quotidien. Voilà, c’est ce genre de petites solutions, mais qui mises bout à bout, in fine. Au bout de ça, entre trois et cinq rendez-vous, c’est deux à trois mois d’accompagnement en moyenne. Ça nous permet d’avoir des personnes qui, in fine, sont autonomes dans leurs déplacements et vont pouvoir du coup accéder à des choses essentielles de leur quotidien.
– Dans ce cadre-là, l’accompagnement est gratuit et sans conditions particulières, sauf d’être adressé par son conseiller.
– Oui tout à fait. En fait, nous, on est une association et on prône la gratuité. Quand on a la capacité de pouvoir avoir les financements en face qui nous permettent d’accompagner gratuitement nos publics. Effectivement.
Mobilité durable et formation des conseillers
– Le podcast Soluble(s) évoque régulièrement le défi climatique, la transition écologique qui est indispensable face au réchauffement de la planète. Mais entre cette urgence sociale parfois, et cette urgence écologique, comment aider les personnes ? Qui sont donc face à ce dilemme alors qu’elles sont en situation de précarité mobilité et qui souhaitent se déplacer vers une mobilité plus durable. Car parfois, ce n’est évidemment pas faute de volonté, mais peut-être d’informations ou de moyens. Comment vous travaillez sur ce point ?
– En fait, assez naturellement, parce que quand on parle de mobilité aujourd’hui, les transports, c’est un tiers des émissions de gaz à effet de serre en France. C’est pour la plupart justement via la voiture individuelle. Pour une grande partie. Souvent, l’utilisation de la voiture est contrainte, c’est-à-dire qu’on ne va pas avoir d’autre choix que de le faire. Et on sait que typiquement, le premier poste budgétaire aujourd’hui pour pour un foyer, pour une personne, c’est ses déplacements, c’est son transport. Un des postes qui est rogné par les dépenses de transport, le poste principal, c’est l’alimentation. Donc, quand on vient travailler la question de la mobilité et des transports en disant on vous propose des alternatives à la voiture individuelle qui, de fait, auront un impact positif sur votre portefeuille et sur votre budget. Et en plus, vous jouerez un rôle in fine sur ces enjeux de transition écologique. Les arguments sont assez faciles, entendables, entendus et portés. On a. Je pense que là, pour le coup, on a. On a un métier, le métier de conseiller mobilité qui met clairement, concrètement, les deux pieds dans cette notion de transition écologique, juste socialement. On arrive de fait, avec soixante dix pour cent des solutions qu’on propose sont des solutions existantes. Donc on n’invente rien en fait. C’est juste en mettant à disposition l’information, en formant, en accompagnant vers l’usage que on a cet impact là. Et aujourd’hui, on est en capacité parce qu’on travaille notamment avec l’ADEME. On est en train, on est en capacité de mesurer l’impact de notre accompagnement entre une personne qui a une courbe de mobilité non accompagnée par Wimoov et une personne qui est accompagnée. On permet de générer une tonne de CO2 d’économies par an et par bénéficiaire. Donc, très concrètement, ce qu’on fait, c’est de la transition écologique dans mais à dimension sociale et, et et c’est là où ça, ça, ça nous permet de dire qu’on est sur, comme tu le disais au départ, un métier de conseiller mobilité qui est au croisement entre social et environnemental.
– Oui. Alors sur cet impact, une tonne de CO2, c’est très important dans. Si on a en tête qu’un Français moyen a un budget d’émission carbone autour de dix tonnes et que nos objectifs pour deux mille cinquante sont d’arriver tous ensemble à deux tonnes par an et par et par personne. Alors aujourd’hui, Wimoov accompagne au global plus de cinquante mille personnes en France par an. Mais je le disais dans l’introduction, il y en a quinze millions de ces Françaises et Françaises qui sont concernés de près ou de loin par des sujets auxquels un conseiller mobilité peut répondre. On se dit que c’est un métier qui a de l’avenir et que dans ce cadre, vous souhaitez changer d’échelle. Wimoov a créé son école de la mobilité inclusive. En pratique, vous êtes aussi un organisme de formation. On peut donc apprendre le métier de conseiller mobilité. Quelles sont les conditions requises pour devenir conseiller mobilité ? Il faut des diplômes préalables. Le bac, comment on fait ? En fait, pour aller vers ce métier ?
– ça fait écho à ce que ce que je disais avant sur le côté professionnalisation. C’est vrai que on a. on a créé ce métier, on a développé les outils d’accompagnement qui qui nous permettent de mesurer tout ce qu’on fait aujourd’hui. Et on parle de quinze millions de personnes en précarité, mobilité. Toutes n’ont pas besoin d’un accompagnement tel que tel que je le propose, mais entre quinze millions et cinquante mille. Si je mets bout à bout tous les acteurs de la mobilité inclusive en France, qui font pour certains aussi du conseil en mobilité, on va, on va accompagner cent à cent cinquante mille personnes par an. On voit que le gap, il est grand, même s’il ne faut pas atteindre les quinze millions. Et c’est là où on s’est dit que, effectivement, mettons à disposition notre expérience, notre expertise pour aller former. Donc, la formation, on en faisait déjà. Toute personne qui arrive chez Wimoov sur un poste de conseiller mobilité est formé en interne. Mais là, depuis janvier deux mille vingt cinq, on propose une formation professionnalisante qui est une formation deux cents heures pour devenir conseiller mobilité, avec l’objectif ensuite de pouvoir faire reconnaître de façon plus officielle ce métier-là. Un des critères pour pouvoir être conseiller mobilité, c’est une formation équivalent bac plus trois. Donc il faut, il faut déjà avoir effectivement un bagage, un bagage pour pouvoir y rentrer. Puis après, j’ai envie de dire, c’est la motivation, l’envie d’être un acteur. Tu disais que je me définissais comme provocateur de mobilité. En fait, on se définit tous chez Wimoov comme étant provocatrice et provocateur de mobilité. C’est aussi, c’est aussi ça qui fait, qui fait la différence entre guillemets, c’est de se dire bah là j’ai un rôle à jouer sur un métier qui a du sens, tu l’as dit, sur un métier qui a de l’avenir, parce que très concrètement, on sait que la mobilité aujourd’hui, elle crée des fractures territoriales, elle crée des fractures sociales et que si demain on est en capacité d’avoir un conseiller, d’ailleurs on devient conseiller depuis le début. Mais je tiens à dire qu’on a beaucoup de conseillères en mobilité majoritairement. Et c’est vrai que dans le langage, c’est souvent masculin. Mais voilà. Et si demain on avait un conseiller ou une conseillère mobilité à l’échelle, à l’échelle de chacun des bassins de vie ou des bassins de mobilité en France, je pense que ça changerait la donne pour beaucoup, beaucoup de personnes, puisqu’on voit toutes les conséquences positives que ça peut avoir sur la vie des gens.
Mobilisation locale et élections municipales 2026
– Alors, je renvoie à nos auditrices, nos auditeurs, au lien qui est dans la description, avec tous les détails pour pour prolonger sur ce sujet. Il nous reste peut-être une minute. C’est très court. On n’est pas dans un podcast politique, mais j’élargis un peu la focale pour terminer cet épisode. Alors que la France va voter pour ses maires et ses conseillers municipaux, les 15 et 22 mars 2026. Ton association Wimoov va-t-elle être particulièrement attentive à l’occasion de ce grand rendez-vous démocratique ? Je te pose la question parce que l’échelon local est un échelon important pour la mobilité.
– Oui, complètement. Mais nous, notre travail au quotidien, il se fait avec les collectivités déjà, et depuis depuis longtemps. Donc, forcément, on est attentif à ce qui va se passer dans le cadre des élections, même si on voit que la mobilité, elle, dépasse les couleurs politiques. On voit que pour une collectivité locale territoriale, investir dans la mobilité inclusive, c’est un enjeu aussi parce que finalement, in fine, ça permet de faire des économies à d’autres endroits. Ça a un impact sur l’emploi et l’attractivité économique, ça a un impact sur la santé de sa population, ça a un impact sur la vie culturelle, etc, etc. Et quand on fait le rapport de l’euro investi dans le conseil en mobilité, slash (/) les euros économisés, on est sur un rapport de quasiment un sur six. Donc moi j’ai même envie de dire aux collectivités, dans ce cadre-là, faites en sorte d’en faire un message fort de vos campagnes aux candidates et aux candidats. Parce que. Parce que ça ne peut être que bénéfique pour votre territoire.
– Le message est passé. Sébastien Bailleul, porte-parole de l’association Wimoov. Cela s’écrit W I M deux O V, Wimoov. Retrouvez toutes les informations pratiques dans la description de cet épisode. Sébastien. Merci beaucoup pour ton témoignage, tes éclairages. Merci d’être passé dans Soluble(s) !
– Merci beaucoup Simon. C’était un moment très agréable et assez rare donc merci beaucoup !
– Avec plaisir ! Voilà, c’est la fin de cet épisode. Si vous l’avez aimé, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous. Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site internet, csoluble.media, à bientôt 😉
POUR ALLER PLUS LOIN
- Visiter le site web de l’association Wimoov
- Consulter le site du Baromètre des mobilités du quotidien
Et aussi : Les offres d’emploi pour le poste de Conseiller Mobilité (H/F) chez Wimoov
TIMESCODES
00:00 Introduction
01:42 Le parcours de Sébastien Bailleul
03:45 C’est quoi la précarité mobilité ?
08:16 Qu’est-ce qu’un conseiller mobilité ? Diagnostic, méthode
10:33 Les personnes accompagnées
13:22 La mobilité est une compétence
16:23 Une solidarité locale importante
17:00 Les solutions
20:38 Les voies d’accès à l’accompagnement Wimoov : France Travail, missions locales, CCAS, associations
25:21 Peut-on concilier urgence sociale et écologique pour la mobilité ?
29:40 Formation, recrutement des conseillers mobilité
32:45 Appel à l’action des collectivités locales (Municipales 2026)
33:52 Merci à Sébastien Bailleul !
34:37 Fin
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