[TRANSCRIPTION] Comment soutenir les aidants qui travaillent ?
Les salariés aidants ont besoin d’être soutenus et reconnus. On estime que d’ici à 2030, un quart des salariés français seront des aidants d’au moins l’un de leurs proches.
Aujourd’hui, ces femmes et ces hommes sont quatre millions à mener une vie active tout en prenant régulièrement soin d’un membre de leur famille, un parent vieillissant, un conjoint malade ou en situation de handicap.
Dans le milieu professionnel, ces personnes peuvent hésiter à en parler de peur d’être stigmatisées ou mises de côté au travail.
Le management n’est pas toujours à l’écoute ou formé ; pire, les salariés aidants peuvent être perçus comme une charge économique supplémentaire pour l’entreprise ou “à risque d’absentéisme”.
Transcription (automatisée)
Article source : Comment soutenir les aidants qui travaillent ?
Bienvenue dans un nouvel épisode de Soluble(s).
Aujourd’hui, je souhaite médiatiser les solutions pour améliorer une situation qui touche 11 millions de personnes en France et parler plus spécifiquement d’un peu moins de la moitié d’entre eux, ceux qui travaillent.
On les appelle les salariés aidants.
Bonjour, Dr Hélène Rossinot.
Bonjour.
Tu es médecin spécialiste en santé publique et spécialiste du sujet des aidants.
D’ailleurs, tu te présentes volontiers comme médecin des aidants.
Tu nous diras qui sont ces aidants dont une grande partie s’ignorent.
Et nous verrons ensemble comment le monde de l’entreprise s’adapte ou doit s’adapter à ses spécificités.
Tu nous livreras.
J’en suis sûr, des conseils pour savoir prendre soin de soi lorsque l’on prend soin d’un proche tout en conduisant sa vie professionnelle.
Et on le sait et on va le voir tout au long de cet épisode.
Ce n’est pas facile et tu es l’auteur de Ma Famille, Mon Job et Moi paru cet automne 2023 chez Robert Laffont.
Mais d’abord, tu le sais, comme nos auditeurs, je me montre assez curieux sur l’histoire des invités.
Avant qu’il passe à ce micro, tu es un jeune médecin qui a décidé de s’engager sur ce sujet de société.
Raconte-nous comment tu en es arrivé là et ton parcours en quelques mois, s’il te plaît.
Écoute, pour être honnête avec toi, je suis arrivée sur le sujet des aidants assez par hasard.
Quand j’étais encore interne en médecine, je n’avais jamais entendu parler du terme aidant.
C’est-à-dire d’ailleurs à quel point les médecins étaient mal formés.
C’était il n’y a pas si longtemps que ça quand même.
Tu l’as dit, je suis encore jeune.
Et je travaillais en hospitalisation à domicile et mon chef de l’époque, le premier jour, m’a demandé si je maîtrisais le monde du domicile.
Et je ne le maîtrisais tellement pas que je n’ai même pas compris la question, c’est-à-dire.
Mais il a été gentil, il a été intelligent.
Et il m’a dit, écoute, tu vas suivre une infirmière pendant quelques semaines histoire de te familiariser un petit peu avec les prises en charge à domicile.
Donc, j’y suis allée et je me suis rendue compte qu’à côté de la soignante et du patient et de moi, du coup, il y avait quasiment toujours un proche.
Et comme je suis bavarde, j’ai commencé à discuter avec les proches et j’ai réalisé que qu’on parle de patient qui a un cancer en soins palliatifs ou une jambe cassée, un diabète ou tout autre maladie.
En fait, ça avait beau être très différent du côté des patients.
Ce que me disaient les proches était très semblable.
Et donc, quand je suis revenue au bout de quelques semaines, j’ai dit à mon chef, écoute, je trouve ça assez étonnant.
Et il m’a dit, on les appelle les aidants.
Mais c’est vrai qu’en France, en littérature médicale, en particulier, on ne connaît pas très, très bien.
Et je lui ai dit, écoute, je sais que j’étais censée venir pour faire mon mémoire et ma thèse sur les soins palliatifs, mais j’ai un feeling, je voudrais changer de sujet.
Est-ce qu’on peut commencer à travailler là-dessus?
Il m’a dit oui, bon coup.
Et je n’ai plus jamais arrêté.
Tu as donc découvert, creusé et même investigué le côté humain, surtout de ce sujet.
Tu l’as dit, on est proche et aidant.
Mais au juste, être proche, aidant, c’est un mot, mais c’est aussi une situation.
Est-ce qu’il y a une définition particulière pour ce savoir aidant?
Je te pose la question parce qu’en lisant ton livre, on apprend que 53 % des aidants ne savent même pas qu’ils sont des aidants.
Alors, il y a beaucoup de problèmes avec le mot aidant.
Déjà, parce que, soyons très clairs, en français, c’est assez large comme terme.
Qu’est-ce que ça veut dire aider quelqu’un?
Alors, la loi dit que c’est quelqu’un qui, un aidant qui aide de manière régulière un de ses proches, malade, âgé ou porteur d’un handicap.
Mais avec ça, on n’est pas forcément, c’est pas très précis comme définition.
Et puis, pour beaucoup, ça manque d’une notion un peu plus personnelle.
Il y a beaucoup de gens qui confondent ce terme, par exemple, avec être soignant, qui est un terme professionnel.
Donc, pour moi, c’est toute personne qui s’inquiète, qui donne un coup de main, qui va aider à faire les papiers, parfois les courses, qui va peut-être prendre des rendez-vous, en tout cas qui va être là pour prendre soin à sa manière.
Et de près ou de loin, parce qu’on peut tout à fait être aidant à distance, à 2, 3, 400 kilomètres, 1000 kilomètres, être dans un autre pays, on peut en faire des choses par téléphone, par Zoom, etc.
Pour moi, c’est vraiment plus un état d’esprit, cette inquiétude, ce soin pour quelqu’un, que vraiment une liste de tâches qu’on fait.
C’est pour ça d’ailleurs qu’à chaque fois qu’on m’approche, parce que cette question me la pose absolument tout le temps, Docteur, est-ce que vous pensez que je suis aidant?
Si vous vous posez la question, vous y êtes déjà.
C’est sûr, mais chacun a sa manière.
Être aidant, ce n’est pas forcément tout de suite être dans l’épuisement ou être dans des situations qui sont extrêmement compliquées.
Il y a plein de nuances sur 11 millions de cas.
Mais c’est important de connaître le mot, même si on ne l’aime pas et même si on n’a pas forcément envie de se reconnaître directement comme tel, parce que ça donne accès à des outils, à une communauté.
Donc, il est au moins important à connaître.
Être un aidant ou une aidante, mais aussi travailler en même temps, c’est le quotidien de près de 4 millions de personnes en France.
Ces personnes mènent une vie active.
Et c’est à eux et à elles que tu t’adresses, mais aussi à leur manager dans ton livre.
Tu as décidé de t’adresser spécifiquement à eux et de traiter du sujet des aidants salariés, des aidants qui travaillent, même s’ils ne sont pas salariés d’ailleurs.
Alors, voyons d’abord quelles sont les idées reçues sur ces personnes qui travaillent tout en étant des aidants.
Est-ce que le monde de l’entreprise a des a priori?
On peut penser qu’ils vont s’absenter souvent.
C’est mal vu d’être aidant?
Alors, quand c’est su, parce qu’il y a beaucoup, beaucoup d’aidants qui n’en parlent pas, parce qu’ils ont peur d’être mis de côté, mis au placard et honnêtement, pour beaucoup, ils ont raison.
Ils ont raison.
On retrouve en fait les mêmes défis quasiment pour les proches aidants que pour les femmes qui avaient des enfants sur ces 30-40 dernières années.
Parce que dans le monde du travail aujourd’hui, prendre soin de quelqu’un, que ce soit un gamin en bas âge, une personne âgée, un conjoint malade, etc., ça signifie qu’on n’est pas dédié à son travail à 100 %.
Et ça, dans le monde du travail, ça passe très mal.
Et c’est hypocrite au possible.
Parce que je ne connais personne, personne, on peut enlever un aidant-parent, etc., qui soit à 100 % tout le temps, tous les jours, dédié uniquement à son travail.
C’est de la théorie pure, cette idée qu’on puisse à 9 heures du matin, pouf, switcher en mode avion dans sa tête.
J’oublie toute ma vie, j’oublie mes problèmes de couple, j’oublie mes problèmes de gamin, j’oublie mon régime, j’oublie tout ce que je fais à côté.
Je fais une journée impeccable, concentrée, sans pose, sans rien.
Et hop, à 18 heures quand je finis, j’enlève le mode avion et je reprends toutes mes emmerdes.
Ça n’arrive jamais à personne.
Mais, mais, les aidants et les femmes de manière générale, on les stigmatise plus que de raison.
Donc il y a énormément de choses à faire là-dessus.
Ça commence par éduquer et par en parler.
Ça tombe bien, c’est ce qu’on est en train de faire.
Éduquer, en parler et donc changer les regards.
Les idées reçues, je commence à en parler.
Il y en a une autre que tu évoques dans ton livre, mais qu’il faut aussi savoir désamorcer.
Tu le fais tout en dé…
avec plein de précisions.
C’est aussi que les aidants pourraient coûter cher à l’entreprise par leur absentéisme hypothétique d’ailleurs.
On n’est pas dans ça d’ailleurs, dans la réalité.
Alors non seulement, non seulement on n’est pas dans ça, mais c’est vrai que c’est un argument qui revient assez souvent.
Parce que dans les entreprises, que ce soit les DRH, les dirigeants, etc., on a plus de facilité à compter combien on dépense pour aider que combien on économise en aidant.
Donc on a beaucoup de mal à compter combien on économise en aidant, surtout qu’en France, on est très mauvais pour ça, puisqu’on fait très très peu d’études sur le sujet des aidants.
C’est pour ça qu’il faut aller regarder dans d’autres pays ce qui s’y passe.
Parce que d’autres pays comme les États-Unis, par exemple, se sont amusés à faire le compte de ce que ça coûte de ne pas aider un aidant.
Et on s’en compte par exemple aux États-Unis que ça coûte entre 17 et 33 milliards par an à l’économie de ne pas soutenir les salariés aidants.
Donc à côté de ça, les mesures qu’on peut prendre au quotidien pour les soutenir, c’est assez dérisoire.
Donc en plus, économiquement, ça a du sens de les aider.
D’ailleurs, en Angleterre, il y a une sorte d’association de patrons qui s’est créée, qui s’appelle Employers for Care, donc littéralement les employés pour les aidants.
Ils sont à peu près 200.
Ces patrons se rejoignent pour faire des actions pour leurs salariés aidants.
Ils ont été interrogés à posteriori pour savoir s’il avait eu du sens, s’il avait eu un impact pour leur business, pour leurs entreprises.
Et ils étaient dithyrambiques qu’ils ont tous montré l’impact en termes d’amélioration de l’absentéisme, en termes d’amélioration du moral, en termes d’amélioration du chiffre d’affaires, que ça avait eu justement de soutenir leurs salariés aidants.
Donc que ce soit d’un point de vue humain simple qui, moi, me suffit mais ne suffit pas forcément dans les entreprises ou d’un point de vue économique.
C’est tout bénéfice d’aider les aidants.
Aider les aidants suppose au préalable cette bonne information des managers, mais aussi du dialogue dont tu as commencé à parler justement à propos de dialogue.
Lorsqu’on se retrouve en situation de devenir aidant, alors c’est parfois suite à un accident du jour au lendemain, mais aussi ça peut être plus progressif.
On peut le voir venir quelque part lorsque l’on accompagne un parent en vieillissant, mais lorsqu’on endosse ce rôle, est-ce qu’on doit en parler à son employeur?
Tu me le disais un peu tout à l’heure, ça peut être à double tranchant, mais pour amorcer un dialogue, il faut bien pouvoir en parler.
Exactement, c’est important.
Alors pour moi, il n’y a pas de réponse oui ou non.
C’est-à-dire que c’est aussi d’abord au cas par cas, en fonction de ce qu’on sent, en fonction de ce qu’on sent sur soi, en fonction de ce qu’on sent de la boîte et de l’ambiance dans laquelle on est, et aussi en fonction de la situation.
C’est sûr que si on sait que c’est temporaire et qu’il y en a pour deux ou trois mois qu’on n’a pas envie d’en parler, on n’est pas forcément obligé d’en parler.
Si on sait que ce sont des maladies ou des handicaps qui vont durer longtemps, c’est important de se poser la question.
Parce que si le premier réflexe qu’on a, c’est de se dire, je ne peux pas en parler, ça va mal se passer, et que ce réflexe, on l’a au tout début, quand c’est compliqué, mais que ça va encore, il faut se rendre compte que par exemple dans une pathologie comme Alzheimer, les choses s’aggravent, il faut être honnête sur la situation.
Et si dès le tout début, on se dit qu’on va être mis de côté si on en parle, et bien, c’est peut-être le moment pas forcément d’en parler, mais d’aller regarder ailleurs.
Parce qu’il y a beaucoup de boîtes qui commencent aujourd’hui à ouvrir les yeux sur les salariés et les dents, et que c’est important de se demander si ta boîte sera là pour toi au moment où tu en as besoin, parce que toi, tu es là pour elle au quotidien.
Donc, si tu as envie d’en parler et que tu le sens bien, c’est important d’en parler effectivement dans le livre.
Je donne tout un tas de conseils pour mener les entretiens, pour en discuter avec les collègues, avec qui est-ce qu’on en parle, avec le manager, avec le DRH, comment, etc.
Mais si on ne le sent pas, et ça arrive assez souvent, c’est important de se demander pourquoi et d’essayer de prendre un tout petit peu de recul là-dessus.
Est-ce que c’est parce qu’on a vu, par exemple, une collègue qui avait des enfants et dont d’autres collègues parlaient mal parce qu’elle allait les chercher à la sortie de l’école, disait, mais regarde, elle est encore partie plus tôt et puis elle l’a raté, sa promotion.
Ça, on le voit parfois, ça ne nous impacte pas sur le moment.
Donc, on n’y dit pas forcément grand chose, mais on se rend compte de la culture de son entreprise.
Donc, si spontanément on n’a pas envie d’en parler, parce qu’on pense que ça va mal se passer, c’est important de se demander pourquoi.
On va prendre quelques exemples, mais finalement, c’est ce coup de fil imprévu du médecin qu’on attend depuis plusieurs semaines, le médecin du proche, auquel on doit absolument répondre.
C’est ça, c’est cette incertitude qui peut parfois peser.
Il faut absolument répondre et on ne sait pas si on peut tout simplement s’absenter de son poste de travail.
Alors, ça dépend de son emploi.
Est-ce que tu as d’autres exemples comme ça qui mettent le salarié face à une situation difficile?
Alors, le coup de fil, c’est toujours un très bon exemple parce que ce fameux coup de fil, il tombe toujours quand il ne faut pas.
Toujours.
C’est quand on attend depuis des semaines un coup de fil en particulier d’un médecin.
Je l’ai vu un nombre de fois, je l’ai vécu moi-même à un moment.
On l’attend, on l’attend, on l’attend.
On appelle le secrétariat.
On nous dit, le docteur va vous rappeler, le docteur va vous rappeler.
Et je dis, attends, on t’entend le médecin.
Et puis finalement, on arrive sur une réunion importante.
Et là, on voit son téléphone et c’est le numéro du médecin.
Le temps qu’on se dise, il faut que je trouve une excuse, il faut que je dise ce que je sorte, on quitte la pièce.
Ça a raccroché, bien entendu.
On rappelle immédiatement et la secrétaire vous répond, le docteur est en ligne, il va vous rappeler.
Et c’est reparti.
Vous retournez en réunion, ça re-sonne.
Ça fiche dans l’air votre réunion, votre morale vous réussit.
C’est souvent pas avoir le médecin sur là au téléphone.
Et ça complique les choses.
Et là, très clairement, vos collègues, s’ils sont pas au courant, ils vous regardent bizarrement.
Mais il y a toute la question, effectivement, des départs qui peuvent arriver à l’impromptu quand il y a une urgence et qu’il faut d’un coup aller chez le médecin quand il y a une nuit aux urgences à passer et qu’il y a une réunion à 8 heures le lendemain matin, que vous n’avez pas dormi de la nuit, que vous êtes inquiets, par exemple, que votre parent, votre enfant, votre conjoint est toujours à l’hôpital.
Les aidants, ils assurent.
J’en ai vu plein qui le faisaient et qui sont épuisés.
C’est plein de petites situations qui peuvent arriver.
Les dossiers pour la MDPH, pour la CAF, les rendez-vous administratifs.
Est-ce que vous avez déjà vu une administration ouverte à un autre moment que sur les heures de travail?
Non, mais non, malheureusement.
Et puis, alors, c’est des heures de travail très restreintes.
Donc, c’est des choses qui paraissent toutes bêtes quand on les regarde de l’extérieur, mais il ne faut pas oublier que ça s’ajoute à l’inquiétude qu’on a pour notre proche, au stress qu’on peut avoir au travail, parce que la vie professionnelle, ce n’est pas forcément non plus un long fleuve tranquille.
Et par-dessus, il y a toutes ces choses qu’on n’arrive pas forcément à faire facilement parce qu’on manque de fluidité, on manque de temps, parce qu’on se cache d’une personne ou d’une autre pour réussir à la faire.
Donc, c’est assez compliqué.
Alors que soyons très honnêtes, ce fameux coup de fil, par exemple, vous pourriez vous lever et dire, je suis désolée, c’est le médecin, maman, il faut que je le prenne.
Je reviens dans cinq minutes sans que personne vous juge.
Vous prenez le coup de fil, vous revenez, vous n’êtes plus stressé.
La chose est réglée.
Si j’ai réglé pour votre maman, vous êtes concentré, vous repartez dans votre réunion et tout va bien.
Et techniquement, j’ai du mal à comprendre pourquoi aujourd’hui c’est si compliqué à admettre.
Alors, je te remercie de jouer le jeu, de répondre à ces questions très concrètes par des illustrations, justement, parce que ma question suivante, c’est quelles sont les actions que les managers peuvent mettre en œuvre pour une meilleure inclusion des salariés aidants?
Alors, il y a une action qui est extrêmement importante.
Il faut qu’ils se forment, il faut qu’ils apprennent, parce que les pauvres managers, j’en ai beaucoup qui m’ont contacté aussi ces derniers temps, qui entendent le message, mais qui sont bien démunis face à leurs salariés aidants, qui ne savent pas comment le faire, qui ne savent pas quoi leur dire, qui d’ailleurs ne connaissent pas bien la situation, parce que quand on l’a vécu, c’est plus facile d’avoir une idée de ce dont l’autre peut avoir besoin.
Mais quand ça ne nous est jamais arrivé, on a beau être sensible à la question, ce n’est pas forcément simple immédiatement d’avoir plein d’idées.
Donc, se renseigner et apprendre, c’est déjà un premier pas.
Et après, et c’est un conseil que je donne à la fois au manager, au RH et aux dirigeants de manière générale, avant même d’envisager de faire quoi que ce soit comme immense action publique, etc., travailler sur la culture d’entreprise, c’est-à-dire parler et éduquer pour le monde et pas seulement les aidants.
Je vois beaucoup trop dans les entreprises d’action uniquement à destination des salariés aidants.
Moi, j’interviens beaucoup en entreprise.
Mais je dis à chaque fois, ne me faites pas intervenir pour les salariés aidants.
Faites-moi intervenir pour les salariés sous cours.
Parce qu’une grosse partie de la charge mentale de vos employés aidants, elle est sur les regards en coin des autres.
Elle est sur l’ignorance et sur l’incompréhension des collègues et des managers.
Donc, éduquez tout le monde et faites en sorte qu’un aidant n’ait non seulement plus honte d’être aidant, qu’il n’ait pas peur d’en parler, mais en plus qu’il se sente valorisé.
Donc, il est vraiment extrêmement important que même les collègues, qui peuvent avoir parfois ce regard de travers, arrêtent de se dire, Oh là là, sa vie privée nous envahit, etc.
et se disent aussi, Bon, c’est peut-être un peu compliqué en ce moment, mais il apprend des choses et il va être une vraie addition à l’équipe en plus.
Oui, parce que ton livre est résolument positif, concret, justement permet aussi d’éviter de se sentir culpabilisé, parce qu’il y a beaucoup de culpabilité qui pèse parfois sur certains aidants, justement à cause de ce regard dont tu parlais.
Et tu vas même jusqu’à dire concrètement avec des exemples que ces compétences dont tu parles, on peut les valoriser, y compris dans son CV et dans son travail.
C’est quoi ces compétences?
On est un champion ou une championne de l’organisation lorsqu’on a aidant?
Alors l’organisation, je pense que c’est le point commun qu’on retrouve chez tous les aidants.
Mais c’est vrai que j’en ai trouvé peut-être 20 ou 30.
J’ai fait une liste avec des exemples à chaque fois.
En fait, l’idée dans le livre sur ce chapitre en particulier, c’était de donner des exercices, de guider les aidants, ils seraient en train de le lire, pour les aider à en fonction de leur situation à eux, trouver par rapport à ce qu’ils font au quotidien les compétences qui correspondent et qu’ils ont développées.
Parce qu’on ne développe pas les mêmes compétences quand on a un enfant polyhandicapé, quand on a un parent Alzheimer, quand on a un conjoint diabétique, quand on a un enfant avec une endométriose.
Ce sont des pathologies très différentes, avec des nécessités différentes, avec des réalités différentes.
Donc on ne peut pas tous développer la même chose non plus.
Mais c’est vrai que c’est ce que je fais beaucoup en entreprise.
J’ai voulu donner des clés extrêmement pratiques dans ce livre pour que chacun puisse trouver ce qu’il a développé comme compétences, chacun puisse trouver comment le mettre en valeur en fonction de ce qu’il a envie de dire ou pas.
Parce que tout le monde ne se sent pas à l’aise pour raconter absolument toute sa vie non plus.
Donc j’ai proposé plusieurs exercices, plusieurs modèles de CV, même un exercice de fiche de poste, faire la fiche de poste de son poste à soi en tant qu’aidant.
Parce qu’en fait, si on devait trouver quelqu’un qui nous remplace au quotidien, il faudrait, pour le recruter, être extrêmement précis et ça nécessiterait des compétences.
Et je vous promets que les aidants que je rencontre au quotidien, s’ils avaient besoin de se remplacer eux-mêmes, il serait extrêmement difficile.
Et c’est normal en disant, mais mon proche, il a besoin de ça, de ça, de ça, de ça et de ça.
Donc j’ai besoin d’une personne qui s’agirait comme ça, comme ça, comme ça, comme ça.
En fait, on sait le faire.
Simplement, on ne se rend pas forcément compte que nous, on a développé ces compétences-là.
C’est pour ça qu’à chaque fois qu’on m’approche, parce que cette question me la pose absolument tout le temps, Docteur, est-ce que vous pensez que je suis aidant?
Si vous vous posez la question, vous y êtes déjà.
C’est sûr, mais chacun a sa manière.
Être aidant, ce n’est pas forcément tout de suite être dans l’épuisement ou être dans des situations qui sont extrêmement compliquées.
Il y a plein de nuances sur 11 millions de cas.
Mais c’est important de connaître le mot, même si on ne l’aime pas et même si on n’a pas forcément envie de se reconnaître directement comme tel, parce que ça donne accès à des outils, à une communauté.
Donc, il est au moins important à connaître.
Être un aidant ou une aidante, mais aussi travailler en même temps, c’est le quotidien de près de 4 millions de personnes en France.
Ces personnes mènent une vie active.
Et c’est à eux et à elles que tu t’adresses, mais aussi à leur manager dans ton livre.
Tu as décidé de t’adresser spécifiquement à eux et de traiter du sujet des aidants salariés, des aidants qui travaillent, même s’ils ne sont pas salariés d’ailleurs.
Alors, voyons d’abord quelles sont les idées reçues sur ces personnes qui travaillent tout en étant des aidants.
Est-ce que le monde de l’entreprise a des a priori?
On peut penser qu’ils vont s’absenter souvent.
C’est mal vu d’être aidant?
Alors, quand c’est su, parce qu’il y a beaucoup, beaucoup d’aidants qui n’en parlent pas, parce qu’ils ont peur d’être mis de côté, mis au placard et honnêtement, pour beaucoup, ils ont raison.
Ils ont raison.
On retrouve en fait les mêmes défis quasiment pour les proches aidants que pour les femmes qui avaient des enfants sur ces 30-40 dernières années.
Parce que dans le monde du travail aujourd’hui, prendre soin de quelqu’un, que ce soit un gamin en bas âge, une personne âgée, un conjoint malade, etc., ça signifie qu’on n’est pas dédié à son travail à 100 %.
Et ça, dans le monde du travail, ça passe très mal.
Et c’est hypocrite au possible.
Parce que je ne connais personne, personne, on peut enlever un aidant-parent, etc., qui soit à 100 % tout le temps, tous les jours, dédié uniquement à son travail.
C’est de la théorie pure, cette idée qu’on puisse à 9 heures du matin, pouf, switcher en mode avion dans sa tête.
J’oublie toute ma vie, j’oublie mes problèmes de couple, j’oublie mes problèmes de gamin, j’oublie mon régime, j’oublie tout ce que je fais à côté.
Je fais une journée impeccable, concentrée, sans pose, sans rien.
Et hop, à 18 heures quand je finis, j’enlève le mode avion et je reprends toutes mes emmerdes.
Ça n’arrive jamais à personne.
Mais, mais, les aidants et les femmes de manière générale, on les stigmatise plus que de raison.
Donc il y a énormément de choses à faire là-dessus.
Ça commence par éduquer et par en parler.
Ça tombe bien, c’est ce qu’on est en train de faire.
Éduquer, en parler et donc changer les regards.
Les idées reçues, je commence à en parler.
Il y en a une autre que tu évoques dans ton livre, mais qu’il faut aussi savoir désamorcer.
Tu le fais tout en dé…
avec plein de précisions.
C’est aussi que les aidants pourraient coûter cher à l’entreprise par leur absentéisme hypothétique d’ailleurs.
On n’est pas dans ça d’ailleurs, dans la réalité.
Alors non seulement, non seulement on n’est pas dans ça, mais c’est vrai que c’est un argument qui revient assez souvent.
Parce que dans les entreprises, que ce soit les DRH, les dirigeants, etc., on a plus de facilité à compter combien on dépense pour aider que combien on économise en aidant.
Donc on a beaucoup de mal à compter combien on économise en aidant, surtout qu’en France, on est très mauvais pour ça, puisqu’on fait très très peu d’études sur le sujet des aidants.
C’est pour ça qu’il faut aller regarder dans d’autres pays ce qui s’y passe.
Parce que d’autres pays comme les États-Unis, par exemple, se sont amusés à faire le compte de ce que ça coûte de ne pas aider un aidant.
Et on s’en compte par exemple aux États-Unis que ça coûte entre 17 et 33 milliards par an à l’économie de ne pas soutenir les salariés aidants.
Donc à côté de ça, les mesures qu’on peut prendre au quotidien pour les soutenir, c’est assez dérisoire.
Donc en plus, économiquement, ça a du sens de les aider.
D’ailleurs, en Angleterre, il y a une sorte d’association de patrons qui s’est créée, qui s’appelle Employers for Care, donc littéralement les employés pour les aidants.
Ils sont à peu près 200.
Ces patrons se rejoignent pour faire des actions pour leurs salariés aidants.
Ils ont été interrogés à posteriori pour savoir s’il avait eu du sens, s’il avait eu un impact pour leur business, pour leurs entreprises.
Et ils étaient dithyrambiques qu’ils ont tous montré l’impact en termes d’amélioration de l’absentéisme, en termes d’amélioration du moral, en termes d’amélioration du chiffre d’affaires, que ça avait eu justement de soutenir leurs salariés aidants.
Donc que ce soit d’un point de vue humain simple qui, moi, me suffit mais ne suffit pas forcément dans les entreprises ou d’un point de vue économique.
C’est tout bénéfice d’aider les aidants.
Aider les aidants suppose au préalable cette bonne information des managers, mais aussi du dialogue dont tu as commencé à parler justement à propos de dialogue.
Lorsqu’on se retrouve en situation de devenir aidant, alors c’est parfois suite à un accident du jour au lendemain, mais aussi ça peut être plus progressif.
On peut le voir venir quelque part lorsque l’on accompagne un parent en vieillissant, mais lorsqu’on endosse ce rôle, est-ce qu’on doit en parler à son employeur?
Tu me le disais un peu tout à l’heure, ça peut être à double tranchant, mais pour amorcer un dialogue, il faut bien pouvoir en parler.
Exactement, c’est important.
Alors pour moi, il n’y a pas de réponse oui ou non.
C’est-à-dire que c’est aussi d’abord au cas par cas, en fonction de ce qu’on sent, en fonction de ce qu’on sent sur soi, en fonction de ce qu’on sent de la boîte et de l’ambiance dans laquelle on est, et aussi en fonction de la situation.
C’est sûr que si on sait que c’est temporaire et qu’il y en a pour deux ou trois mois qu’on n’a pas envie d’en parler, on n’est pas forcément obligé d’en parler.
Si on sait que ce sont des maladies ou des handicaps qui vont durer longtemps, c’est important de se poser la question.
Parce que si le premier réflexe qu’on a, c’est de se dire, je ne peux pas en parler, ça va mal se passer, et que ce réflexe, on l’a au tout début, quand c’est compliqué, mais que ça va encore, il faut se rendre compte que par exemple dans une pathologie comme Alzheimer, les choses s’aggravent, il faut être honnête sur la situation.
Et si dès le tout début, on se dit qu’on va être mis de côté si on en parle, et bien, c’est peut-être le moment pas forcément d’en parler, mais d’aller regarder ailleurs.
Parce qu’il y a beaucoup de boîtes qui commencent aujourd’hui à ouvrir les yeux sur les salariés et les dents, et que c’est important de se demander si ta boîte sera là pour toi au moment où tu en as besoin, parce que toi, tu es là pour elle au quotidien.
Donc, si tu as envie d’en parler et que tu le sens bien, c’est important d’en parler effectivement dans le livre.
Je donne tout un tas de conseils pour mener les entretiens, pour en discuter avec les collègues, avec qui est-ce qu’on en parle, avec le manager, avec le DRH, comment, etc.
Mais si on ne le sent pas, et ça arrive assez souvent, c’est important de se demander pourquoi et d’essayer de prendre un tout petit peu de recul là-dessus.
Est-ce que c’est parce qu’on a vu, par exemple, une collègue qui avait des enfants et dont d’autres collègues parlaient mal parce qu’elle allait les chercher à la sortie de l’école, disait, mais regarde, elle est encore partie plus tôt et puis elle l’a raté, sa promotion.
Ça, on le voit parfois, ça ne nous impacte pas sur le moment.
Donc, on n’y dit pas forcément grand chose, mais on se rend compte de la culture de son entreprise.
Donc, si spontanément on n’a pas envie d’en parler, parce qu’on pense que ça va mal se passer, c’est important de se demander pourquoi.
On va prendre quelques exemples, mais finalement, c’est ce coup de fil imprévu du médecin qu’on attend depuis plusieurs semaines, le médecin du proche, auquel on doit absolument répondre.
C’est ça, c’est cette incertitude qui peut parfois peser.
Il faut absolument répondre et on ne sait pas si on peut tout simplement s’absenter de son poste de travail.
Alors, ça dépend de son emploi.
Est-ce que tu as d’autres exemples comme ça qui mettent le salarié face à une situation difficile?
Alors, le coup de fil, c’est toujours un très bon exemple parce que ce fameux coup de fil, il tombe toujours quand il ne faut pas.
Toujours.
C’est quand on attend depuis des semaines un coup de fil en particulier d’un médecin.
Je l’ai vu un nombre de fois, je l’ai vécu moi-même à un moment.
On l’attend, on l’attend, on l’attend.
On appelle le secrétariat.
On nous dit, le docteur va vous rappeler, le docteur va vous rappeler.
Et je dis, attends, on t’entend le médecin.
Et puis finalement, on arrive sur une réunion importante.
Et là, on voit son téléphone et c’est le numéro du médecin.
Le temps qu’on se dise, il faut que je trouve une excuse, il faut que je dise ce que je sorte, on quitte la pièce.
Ça a raccroché, bien entendu.
On rappelle immédiatement et la secrétaire vous répond, le docteur est en ligne, il va vous rappeler.
Et c’est reparti.
Vous retournez en réunion, ça re-sonne.
Ça fiche dans l’air votre réunion, votre morale vous réussit.
C’est souvent pas avoir le médecin sur là au téléphone.
Et ça complique les choses.
Et là, très clairement, vos collègues, s’ils sont pas au courant, ils vous regardent bizarrement.
Mais il y a toute la question, effectivement, des départs qui peuvent arriver à l’impromptu quand il y a une urgence et qu’il faut d’un coup aller chez le médecin quand il y a une nuit aux urgences à passer et qu’il y a une réunion à 8 heures le lendemain matin, que vous n’avez pas dormi de la nuit, que vous êtes inquiets, par exemple, que votre parent, votre enfant, votre conjoint est toujours à l’hôpital.
Les aidants, ils assurent.
J’en ai vu plein qui le faisaient et qui sont épuisés.
C’est plein de petites situations qui peuvent arriver.
Les dossiers pour la MDPH, pour la CAF, les rendez-vous administratifs.
Est-ce que vous avez déjà vu une administration ouverte à un autre moment que sur les heures de travail?
Non, mais non, malheureusement.
Et puis, alors, c’est des heures de travail très restreintes.
Donc, c’est des choses qui paraissent toutes bêtes quand on les regarde de l’extérieur, mais il ne faut pas oublier que ça s’ajoute à l’inquiétude qu’on a pour notre proche, au stress qu’on peut avoir au travail, parce que la vie professionnelle, ce n’est pas forcément non plus un long fleuve tranquille.
Et par-dessus, il y a toutes ces choses qu’on n’arrive pas forcément à faire facilement parce qu’on manque de fluidité, on manque de temps, parce qu’on se cache d’une personne ou d’une autre pour réussir à la faire.
Donc, c’est assez compliqué.
Alors que soyons très honnêtes, ce fameux coup de fil, par exemple, vous pourriez vous lever et dire, je suis désolée, c’est le médecin, maman, il faut que je le prenne.
Je reviens dans cinq minutes sans que personne vous juge.
Vous prenez le coup de fil, vous revenez, vous n’êtes plus stressé.
La chose est réglée.
Si j’ai réglé pour votre maman, vous êtes concentré, vous repartez dans votre réunion et tout va bien.
Et techniquement, j’ai du mal à comprendre pourquoi aujourd’hui c’est si compliqué à admettre.
Alors, je te remercie de jouer le jeu, de répondre à ces questions très concrètes par des illustrations, justement, parce que ma question suivante, c’est quelles sont les actions que les managers peuvent mettre en œuvre pour une meilleure inclusion des salariés aidants?
Alors, il y a une action qui est extrêmement importante.
Il faut qu’ils se forment, il faut qu’ils apprennent, parce que les pauvres managers, j’en ai beaucoup qui m’ont contacté aussi ces derniers temps, qui entendent le message, mais qui sont bien démunis face à leurs salariés aidants, qui ne savent pas comment le faire, qui ne savent pas quoi leur dire, qui d’ailleurs ne connaissent pas bien la situation, parce que quand on l’a vécu, c’est plus facile d’avoir une idée de ce dont l’autre peut avoir besoin.
Mais quand ça ne nous est jamais arrivé, on a beau être sensible à la question, ce n’est pas forcément simple immédiatement d’avoir plein d’idées.
Donc, se renseigner et apprendre, c’est déjà un premier pas.
Et après, et c’est un conseil que je donne à la fois au manager, au RH et aux dirigeants de manière générale, avant même d’envisager de faire quoi que ce soit comme immense action publique, etc., travailler sur la culture d’entreprise, c’est-à-dire parler et éduquer pour le monde et pas seulement les aidants.
Je vois beaucoup trop dans les entreprises d’action uniquement à destination des salariés aidants.
Moi, j’interviens beaucoup en entreprise.
Mais je dis à chaque fois, ne me faites pas intervenir pour les salariés aidants.
Faites-moi intervenir pour les salariés sous cours.
Parce qu’une grosse partie de la charge mentale de vos employés aidants, elle est sur les regards en coin des autres.
Elle est sur l’ignorance et sur l’incompréhension des collègues et des managers.
Donc, éduquez tout le monde et faites en sorte qu’un aidant n’ait non seulement plus honte d’être aidant, qu’il n’ait pas peur d’en parler, mais en plus qu’il se sente valorisé.
Donc, il est vraiment extrêmement important que même les collègues, qui peuvent avoir parfois ce regard de travers, arrêtent de se dire, Oh là là, sa vie privée nous envahit, etc.
et se disent aussi, Bon, c’est peut-être un peu compliqué en ce moment, mais il apprend des choses et il va être une vraie addition à l’équipe en plus.
Oui, parce que ton livre est résolument positif, concret, justement permet aussi d’éviter de se sentir culpabilisé, parce qu’il y a beaucoup de culpabilité qui pèse parfois sur certains aidants, justement à cause de ce regard dont tu parlais.
Et tu vas même jusqu’à dire concrètement avec des exemples que ces compétences dont tu parles, on peut les valoriser, y compris dans son CV et dans son travail.
C’est quoi ces compétences?
On est un champion ou une championne de l’organisation lorsqu’on a aidant?
Alors l’organisation, je pense que c’est le point commun qu’on retrouve chez tous les aidants.
Mais c’est vrai que j’en ai trouvé peut-être 20 ou 30.
J’ai fait une liste avec des exemples à chaque fois.
En fait, l’idée dans le livre sur ce chapitre en particulier, c’était de donner des exercices, de guider les aidants, ils seraient en train de le lire, pour les aider à en fonction de leur situation à eux, trouver par rapport à ce qu’ils font au quotidien les compétences qui correspondent et qu’ils ont développées.
Parce qu’on ne développe pas les mêmes compétences quand on a un enfant polyhandicapé, quand on a un parent Alzheimer, quand on a un conjoint diabétique, quand on a un enfant avec une endométriose.
Ce sont des pathologies très différentes, avec des nécessités différentes, avec des réalités différentes.
Donc on ne peut pas tous développer la même chose non plus.
Mais c’est vrai que c’est ce que je fais beaucoup en entreprise.
J’ai voulu donner des clés extrêmement pratiques dans ce livre pour que chacun puisse trouver ce qu’il a développé comme compétences, chacun puisse trouver comment le mettre en valeur en fonction de ce qu’il a envie de dire ou pas.
Parce que tout le monde ne se sent pas à l’aise pour raconter absolument toute sa vie non plus.
Donc j’ai proposé plusieurs exercices, plusieurs modèles de CV, même un exercice de fiche de poste, faire la fiche de poste de son poste à soi en tant qu’aidant.
Parce qu’en fait, si on devait trouver quelqu’un qui nous remplace au quotidien, il faudrait, pour le recruter, être extrêmement précis et ça nécessiterait des compétences.
Et je vous promets que les aidants que je rencontre au quotidien, s’ils avaient besoin de se remplacer eux-mêmes, il serait extrêmement difficile.
Et c’est normal en disant, mais mon proche, il a besoin de ça, de ça, de ça, de ça et de ça.
Donc j’ai besoin d’une personne qui s’agirait comme ça, comme ça, comme ça, comme ça.
En fait, on sait le faire.
Simplement, on ne se rend pas forcément compte que nous, on a développé ces compétences-là.
C’est pour ça d’ailleurs qu’à chaque fois qu’on m’approche, parce que cette question me la pose absolument tout le temps, Docteur, est-ce que vous pensez que je suis aidant?
Si vous vous posez la question, vous y êtes déjà.
C’est sûr, mais chacun a sa manière.
Être aidant, ce n’est pas forcément tout de suite être dans l’épuisement ou être dans des situations qui sont extrêmement compliquées.
Il y a plein de nuances sur 11 millions de cas.
Mais c’est important de connaître le mot, même si on ne l’aime pas et même si on n’a pas forcément envie de se reconnaître directement comme tel, parce que ça donne accès à des outils, à une communauté.
Donc, il est au moins important à connaître.
Être un aidant ou une aidante, mais aussi travailler en même temps, c’est le quotidien de près de 4 millions de personnes en France.
Ces personnes mènent une vie active.
Et c’est à eux et à elles que tu t’adresses, mais aussi à leur manager dans ton livre.
Tu as décidé de t’adresser spécifiquement à eux et de traiter du sujet des aidants salariés, des aidants qui travaillent, même s’ils ne sont pas salariés d’ailleurs.
Alors, voyons d’abord quelles sont les idées reçues sur ces personnes qui travaillent tout en étant des aidants.
Est-ce que le monde de l’entreprise a des a priori?
On peut penser qu’ils vont s’absenter souvent.
C’est mal vu d’être aidant?
Alors, quand c’est su, parce qu’il y a beaucoup, beaucoup d’aidants qui n’en parlent pas, parce qu’ils ont peur d’être mis de côté, mis au placard et honnêtement, pour beaucoup, ils ont raison.
Ils ont raison.
On retrouve en fait les mêmes défis quasiment pour les proches aidants que pour les femmes qui avaient des enfants sur ces 30-40 dernières années.
Parce que dans le monde du travail aujourd’hui, prendre soin de quelqu’un, que ce soit un gamin en bas âge, une personne âgée, un conjoint malade, etc., ça signifie qu’on n’est pas dédié à son travail à 100 %.
Et ça, dans le monde du travail, ça passe très mal.
Et c’est hypocrite au possible.
Parce que je ne connais personne, personne, on peut enlever un aidant-parent, etc., qui soit à 100 % tout le temps, tous les jours, dédié uniquement à son travail.
C’est de la théorie pure, cette idée qu’on puisse à 9 heures du matin, pouf, switcher en mode avion dans sa tête.
J’oublie toute ma vie, j’oublie mes problèmes de couple, j’oublie mes problèmes de gamin, j’oublie mon régime, j’oublie tout ce que je fais à côté.
Je fais une journée impeccable, concentrée, sans pose, sans rien.
Et hop, à 18 heures quand je finis, j’enlève le mode avion et je reprends toutes mes emmerdes.
Ça n’arrive jamais à personne.
Mais, mais, les aidants et les femmes de manière générale, on les stigmatise plus que de raison.
Donc il y a énormément de choses à faire là-dessus.
Ça commence par éduquer et par en parler.
Ça tombe bien, c’est ce qu’on est en train de faire.
Éduquer, en parler et donc changer les regards.
Les idées reçues, je commence à en parler.
Il y en a une autre que tu évoques dans ton livre, mais qu’il faut aussi savoir désamorcer.
Tu le fais tout en dé…
avec plein de précisions.
C’est aussi que les aidants pourraient coûter cher à l’entreprise par leur absentéisme hypothétique d’ailleurs.
On n’est pas dans ça d’ailleurs, dans la réalité.
Alors non seulement, non seulement on n’est pas dans ça, mais c’est vrai que c’est un argument qui revient assez souvent.
Parce que dans les entreprises, que ce soit les DRH, les dirigeants, etc., on a plus de facilité à compter combien on dépense pour aider que combien on économise en aidant.
Donc on a beaucoup de mal à compter combien on économise en aidant, surtout qu’en France, on est très mauvais pour ça, puisqu’on fait très très peu d’études sur le sujet des aidants.
C’est pour ça qu’il faut aller regarder dans d’autres pays ce qui s’y passe.
Parce que d’autres pays comme les États-Unis, par exemple, se sont amusés à faire le compte de ce que ça coûte de ne pas aider un aidant.
Et on s’en compte par exemple aux États-Unis que ça coûte entre 17 et 33 milliards par an à l’économie de ne pas soutenir les salariés aidants.
Donc à côté de ça, les mesures qu’on peut prendre au quotidien pour les soutenir, c’est assez dérisoire.
Donc en plus, économiquement, ça a du sens de les aider.
D’ailleurs, en Angleterre, il y a une sorte d’association de patrons qui s’est créée, qui s’appelle Employers for Care, donc littéralement les employés pour les aidants.
Ils sont à peu près 200.
Ces patrons se rejoignent pour faire des actions pour leurs salariés aidants.
Ils ont été interrogés à posteriori pour savoir s’il avait eu du sens, s’il avait eu un impact pour leur business, pour leurs entreprises.
Et ils étaient dithyrambiques qu’ils ont tous montré l’impact en termes d’amélioration de l’absentéisme, en termes d’amélioration du moral, en termes d’amélioration du chiffre d’affaires, que ça avait eu justement de soutenir leurs salariés aidants.
Donc que ce soit d’un point de vue humain simple qui, moi, me suffit mais ne suffit pas forcément dans les entreprises ou d’un point de vue économique.
C’est tout bénéfice d’aider les aidants.
Aider les aidants suppose au préalable cette bonne information des managers, mais aussi du dialogue dont tu as commencé à parler justement à propos de dialogue.
Lorsqu’on se retrouve en situation de devenir aidant, alors c’est parfois suite à un accident du jour au lendemain, mais aussi ça peut être plus progressif.
On peut le voir venir quelque part lorsque l’on accompagne un parent en vieillissant, mais lorsqu’on endosse ce rôle, est-ce qu’on doit en parler à son employeur?
Tu me le disais un peu tout à l’heure, ça peut être à double tranchant, mais pour amorcer un dialogue, il faut bien pouvoir en parler.
Exactement, c’est important.
Alors pour moi, il n’y a pas de réponse oui ou non.
C’est-à-dire que c’est aussi d’abord au cas par cas, en fonction de ce qu’on sent, en fonction de ce qu’on sent sur soi, en fonction de ce qu’on sent de la boîte et de l’ambiance dans laquelle on est, et aussi en fonction de la situation.
C’est sûr que si on sait que c’est temporaire et qu’il y en a pour deux ou trois mois qu’on n’a pas envie d’en parler, on n’est pas forcément obligé d’en parler.
Si on sait que ce sont des maladies ou des handicaps qui vont durer longtemps, c’est important de se poser la question.
Parce que si le premier réflexe qu’on a, c’est de se dire, je ne peux pas en parler, ça va mal se passer, et que ce réflexe, on l’a au tout début, quand c’est compliqué, mais que ça va encore, il faut se rendre compte que par exemple dans une pathologie comme Alzheimer, les choses s’aggravent, il faut être honnête sur la situation.
Et si dès le tout début, on se dit qu’on va être mis de côté si on en parle, et bien, c’est peut-être le moment pas forcément d’en parler, mais d’aller regarder ailleurs.
Parce qu’il y a beaucoup de boîtes qui commencent aujourd’hui à ouvrir les yeux sur les salariés et les dents, et que c’est important de se demander si ta boîte sera là pour toi au moment où tu en as besoin, parce que toi, tu es là pour elle au quotidien.
Donc, si tu as envie d’en parler et que tu le sens bien, c’est important d’en parler effectivement dans le livre.
Je donne tout un tas de conseils pour mener les entretiens, pour en discuter avec les collègues, avec qui est-ce qu’on en parle, avec le manager, avec le DRH, comment, etc.
Mais si on ne le sent pas, et ça arrive assez souvent, c’est important de se demander pourquoi et d’essayer de prendre un tout petit peu de recul là-dessus.
Est-ce que c’est parce qu’on a vu, par exemple, une collègue qui avait des enfants et dont d’autres collègues parlaient mal parce qu’elle allait les chercher à la sortie de l’école, disait, mais regarde, elle est encore partie plus tôt et puis elle l’a raté, sa promotion.
Ça, on le voit parfois, ça ne nous impacte pas sur le moment.
Donc, on n’y dit pas forcément grand chose, mais on se rend compte de la culture de son entreprise.
Donc, si spontanément on n’a pas envie d’en parler, parce qu’on pense que ça va mal se passer, c’est important de se demander pourquoi.
On va prendre quelques exemples, mais finalement, c’est ce coup de fil imprévu du médecin qu’on attend depuis plusieurs semaines, le médecin du proche, auquel on doit absolument répondre.
C’est ça, c’est cette incertitude qui peut parfois peser.
Il faut absolument répondre et on ne sait pas si on peut tout simplement s’absenter de son poste de travail.
Alors, ça dépend de son emploi.
Est-ce que tu as d’autres exemples comme ça qui mettent le salarié face à une situation difficile?
Alors, le coup de fil, c’est toujours un très bon exemple parce que ce fameux coup de fil, il tombe toujours quand il ne faut pas.
Toujours.
C’est quand on attend depuis des semaines un coup de fil en particulier d’un médecin.
Je l’ai vu un nombre de fois, je l’ai vécu moi-même à un moment.
On l’attend, on l’attend, on l’attend.
On appelle le secrétariat.
On nous dit, le docteur va vous rappeler, le docteur va vous rappeler.
Et je dis, attends, on t’entend le médecin.
Et puis finalement, on arrive sur une réunion importante.
Et là, on voit son téléphone et c’est le numéro du médecin.
Le temps qu’on se dise, il faut que je trouve une excuse, il faut que je dise ce que je sorte, on quitte la pièce.
Ça a raccroché, bien entendu.
On rappelle immédiatement et la secrétaire vous répond, le docteur est en ligne, il va vous rappeler.
Et c’est reparti.
Vous retournez en réunion, ça re-sonne.
Ça fiche dans l’air votre réunion, votre morale vous réussit.
C’est souvent pas avoir le médecin sur là au téléphone.
Et ça complique les choses.
Et là, très clairement, vos collègues, s’ils sont pas au courant, ils vous regardent bizarrement.
Mais il y a toute la question, effectivement, des départs qui peuvent arriver à l’impromptu quand il y a une urgence et qu’il faut d’un coup aller chez le médecin quand il y a une nuit aux urgences à passer et qu’il y a une réunion à 8 heures le lendemain matin, que vous n’avez pas dormi de la nuit, que vous êtes inquiets, par exemple, que votre parent, votre enfant, votre conjoint est toujours à l’hôpital.
Les aidants, ils assurent.
J’en ai vu plein qui le faisaient et qui sont épuisés.
C’est plein de petites situations qui peuvent arriver.
Les dossiers pour la MDPH, pour la CAF, les rendez-vous administratifs.
Est-ce que vous avez déjà vu une administration ouverte à un autre moment que sur les heures de travail?
Non, mais non, malheureusement.
Et puis, alors, c’est des heures de travail très restreintes.
Et c’est des choses qui paraissent toutes bêtes quand on les regarde de l’extérieur, mais il ne faut pas oublier que ça s’ajoute à l’inquiétude qu’on a pour notre proche, au stress qu’on peut avoir au travail, parce que la vie professionnelle, ce n’est pas forcément non plus un long fleuve tranquille.
Et par-dessus, il y a toutes ces choses qu’on n’arrive pas forcément à faire facilement parce qu’on manque de fluidité, on manque de temps, parce qu’on se cache d’une personne ou d’une autre pour réussir à la faire.
Donc, c’est assez compliqué.
Alors que soyons très honnêtes, ce fameux coup de fil, par exemple, vous pourriez vous lever et dire, je suis désolée, c’est le médecin, maman, il faut que je le prenne.
Je reviens dans cinq minutes sans que personne vous juge.
Vous prenez le coup de fil, vous revenez, vous n’êtes plus stressé.
La chose est réglée.
Si j’ai réglé pour votre maman, vous êtes concentré, vous repartez dans votre réunion et tout va bien.
Et techniquement, j’ai du mal à comprendre pourquoi aujourd’hui c’est si compliqué à admettre.
Alors, je te remercie de jouer le jeu, de répondre à ces questions très concrètes par des illustrations, justement, parce que ma question suivante, c’est quelles sont les actions que les managers peuvent mettre en œuvre pour une meilleure inclusion des salariés aidants?
Alors, il y a une action qui est extrêmement importante.
Il faut qu’ils se forment, il faut qu’ils apprennent, parce que les pauvres managers, j’en ai beaucoup qui m’ont contacté aussi ces derniers temps, qui entendent le message, mais qui sont bien démunis face à leurs salariés aidants, qui ne savent pas comment le faire, qui ne savent pas quoi leur dire, qui d’ailleurs ne connaissent pas bien la situation, parce que quand on l’a vécu, c’est plus facile d’avoir une idée de ce dont l’autre peut avoir besoin.
Mais quand ça ne nous est jamais arrivé, on a beau être sensible à la question, ce n’est pas forcément simple immédiatement d’avoir plein d’idées.
Donc, se renseigner et apprendre, c’est déjà un premier pas.
Et après, et c’est un conseil que je donne à la fois au manager, au RH et aux dirigeants de manière générale, avant même d’envisager de faire quoi que ce soit comme immense action publique, etc., travailler sur la culture d’entreprise, c’est-à-dire parler et éduquer pour le monde et pas seulement les aidants.
Je vois beaucoup trop dans les entreprises d’action uniquement à destination des salariés aidants.
Moi, j’interviens beaucoup en entreprise.
Mais je dis à chaque fois, ne me faites pas intervenir pour les salariés aidants.
Faites-moi intervenir pour les salariés sous cours.
Parce qu’une grosse partie de la charge mentale de vos employés aidants, elle est sur les regards en coin des autres.
Elle est sur l’ignorance et sur l’incompréhension des collègues et des managers.
Donc, éduquez tout le monde et faites en sorte qu’un aidant n’ait non seulement plus honte d’être aidant, qu’il n’ait pas peur d’en parler, mais en plus qu’il se sente valorisé.
Parce que, et c’est très important de le noter, en s’éduquant, ils vont se rendre compte que leurs salariés aidants ne sont non seulement des gens bien, qui font quelque chose de bien, mais qui développent énormément de compétences, en particulier interpersonnelles, qu’on appelle soft skills, qui sont de plus en plus valorisées par les entreprises.
Et non seulement ce sont des atouts en tant que salariés et des gens bien, mais ils développent des choses qui serviront à l’entreprise.
Donc, c’est vraiment extrêmement important que même les collègues, qui peuvent avoir parfois ce regard de travers, arrêtent de se dire, Oh là là, sa vie privée nous envahit, etc.
et se disent aussi, Bon, c’est peut-être un peu compliqué en ce moment, mais il apprend des choses et il va être une vraie addition à l’équipe en plus.
Oui, parce que ton livre est résolument positif, concret, justement permet aussi d’éviter de se sentir culpabilisé, parce qu’il y a beaucoup de culpabilité qui pèse parfois sur certains aidants, justement à cause de ce regard dont tu parlais.
Et tu vas même jusqu’à dire concrètement avec des exemples que ces compétences dont tu parles, on peut les valoriser, y compris dans son CV et dans son travail.
C’est quoi ces compétences?
On est un champion ou une championne de l’organisation lorsqu’on a aidant?
Alors l’organisation, je pense que c’est le point commun qu’on retrouve chez tous les aidants.
Mais c’est vrai que j’en ai trouvé peut-être 20 ou 30.
J’ai fait une liste avec des exemples à chaque fois.
En fait, l’idée dans le livre sur ce chapitre en particulier, c’était de donner des exercices, de guider les aidants, ils seraient en train de le lire, pour les aider à en fonction de leur situation à eux, trouver par rapport à ce qu’ils font au quotidien les compétences qui correspondent et qu’ils ont développées.
Parce qu’on ne développe pas les mêmes compétences quand on a un enfant polyhandicapé, quand on a un parent Alzheimer, quand on a un conjoint diabétique, quand on a un enfant avec une endométriose.
Ce sont des pathologies très différentes, avec des nécessités différentes, avec des réalités différentes.
Donc on ne peut pas tous développer la même chose non plus.
Mais c’est vrai que c’est ce que je fais beaucoup en entreprise.
J’ai voulu donner des clés extrêmement pratiques dans ce livre pour que chacun puisse trouver ce qu’il a développé comme compétences, chacun puisse trouver comment le mettre en valeur en fonction de ce qu’il a envie de dire ou pas.
Parce que tout le monde ne se sent pas à l’aise pour raconter absolument toute sa vie non plus.
Donc j’ai proposé plusieurs exercices, plusieurs modèles de CV, même un exercice de fiche de poste, faire la fiche de poste de son poste à soi en tant qu’aidant.
Parce qu’en fait, si on devait trouver quelqu’un qui nous remplace au quotidien, il faudrait, pour le recruter, être extrêmement précis et ça nécessiterait des compétences.
Et je vous promets que les aidants que je rencontre au quotidien, s’ils avaient besoin de se remplacer eux-mêmes, il serait extrêmement difficile.
Et c’est normal en disant, mais mon proche, il a besoin de ça, de ça, de ça, de ça et de ça.
Donc j’ai besoin d’une personne qui s’agirait comme ça, comme ça, comme ça, comme ça.
En fait, on sait le faire.
Simplement, on ne se rend pas forcément compte que nous, on a développé ces compétences-là.
C’est pour ça que c’est important de les accompagner là-dessus aussi, parce que ça aide en entretien, parce que ça aide quand on change de job, parce que ça aide pour l’estime de soi et que mine de rien, en particulier quand on est vulnérable et qu’on est épuisé, reprendre un peu d’estime de soi, c’est important aussi.
C’est ce que j’aime voir quand je travaille en entreprise et que je parle aux aidants, qui me revient souvent ce moment où on vient me voir et on me dit merci parce que j’ai changé de regard sur moi et je me sens bien maintenant.
Je n’ai pas honte d’en parler.
Et c’était ça que je voulais aussi amener avec ce livre.
Quand on lit ce chiffre aussi dans ton livre, on se dit que la société a intérêt à mieux prendre en compte ce sujet, parce que ce chiffre, c’est que d’ici à 2030, un quart des salariés français seront des aidants de l’un de leurs proches.
Donc c’est un sujet absolument central.
Ça fait plus de 7 millions de personnes.
Je rappelle qu’actuellement, c’est autour de 4 millions de personnes.
Alors, tu prononçais le mot d’épuisement.
Être aidant, c’est aussi être face à un risque accru d’épuisement.
Alors dans le monde du travail, on parle de plus en plus du fameux burn-out.
Tu as parlé de charge mentale.
Donc je voudrais aborder ce point un peu, évidemment, annexe aux soins apportés à la personne, mais à la personne proche, mais des aidants eux-mêmes sur leur santé mentale.
Tu parles d’un grand huit émotionnel.
Quelles sont les choses les plus importantes à mettre en place sur le plan personnel pour éviter cette surchauffe et de laisser sa santé?
C’est effectivement souvent un marathon.
Je pense que le plus important, et c’est pour ça que c’est le tout premier chapitre de mon livre, c’est de réfléchir au sentiment de culpabilité.
Et ça paraît parfois bizarre venant d’un médecin parce qu’on s’attendrait à des conseils santé immédiat.
Mais je me suis rendu compte à force d’écrire et de travailler avec des aidants que je pouvais donner tous les conseils que je voulais dans tous les sens.
Tant qu’un aidant se sentira coupable de prendre un peu de temps pour lui, il ne pourra pas suivre les conseils, il n’y arrivera pas, il se sentira trop mal.
Donc c’est important de réussir à comprendre pourquoi on se sent coupable.
Et ça paraît parfois bizarre venant d’un médecin parce qu’on s’attendrait à des conseils santé immédiat.
Mais je me suis rendu compte à force d’écrire et de travailler avec des aidants que je pouvais donner tous les conseils que je voulais dans tous les sens.
Tant qu’un aidant se sentira coupable de prendre un peu de temps pour lui, il ne pourra pas suivre les conseils, il n’y arrivera pas, il se sentira trop mal.
Donc c’est important de réussir à comprendre pourquoi on se sent coupable.
Et ça paraît parfois bizarre venant d’un médecin parce qu’on s’attendrait à des conseils santé immédiat.
Mais je me suis rendu compte à force d’écrire et de travailler avec des aidants que je pouvais donner tous les conseils que je voulais dans tous les sens.
Tant qu’un aidant se sentira coupable de prendre un peu de temps pour lui, il ne pourra pas suivre les conseils, il n’y arrivera pas, il se sentira trop mal.
Donc c’est important de réussir à comprendre pourquoi on se sent coupable.
Et je pense que je peux compter sur les doigts, des deux mains maximum, le nombre d’aidants que j’ai rencontrés qui m’ont dit très clairement ah non, moi je ne me sens pas coupable.
Jamais.
Pas sur ce sujet.
Jamais.
Et c’est extrêmement redondant, extrêmement fréquent et tout à fait normal et humain.
Donc c’est vrai que pour avoir le déclic d’accepter de prendre un peu de temps pour soi, il faut réussir à sortir de ce cercle vicieux et ça c’est très important.
Ensuite, il y a toute la question gestion des émotions, gestion du stress.
Il faudrait plusieurs podcasts pour rentrer en détail là-dedans.
Mais c’est vrai qu’en parler à son médecin, c’est important aussi.
C’est pour ça que j’ai mis un carnet d’évaluation au milieu du livre.
Parce que le livre est construit en deux parties.
Je me suis rendu compte qu’un aidant ne pouvait pas non plus sentir bien au travail s’il était complètement épuisé.
Donc j’ai commencé par une partie santé.
Parce que le but, c’est d’abord d’essayer de les aider à traverser ça, de les remettre sur pied un peu, d’améliorer leur quotidien et leur santé physique et mentale.
Et ensuite, à partir de là, ils pourront se mettre en valeur.
Mais si déjà, on se sent vulnérable et qu’en plus, on est épuisé, c’est pas à ce moment-là qu’on va aller parler à son manager correctement que les choses vont bien se passer.
Donc c’est important de commencer par l’aspect santé et ensuite de travailler l’aspect travail.
Mais je me suis rendu compte que le carnet d’évaluation était utile parce que, et certes tous les médecins connaissent ce moment, quand on demande à quelqu’un comment il va, souvent il vous répond qu’il va bien, sauf s’il vient vous consulter pour une chose en particulier.
Et le moment où il franchit la porte, souvent, il se retourne et il dit, ah non, sinon docteur, j’ai ça, je … ou sinon ça fait trois semaines que j’ai mal à la tête.
Et en fait, c’est les motifs de toutes les dernières minutes de consultation qui sont souvent les plus importants et qui font faire revenir le patient.
Et c’est pareil, quand on demande à quelqu’un, est-ce que vous prenez des médicaments?
Parfois il va vous répondre non, mais si vous lui égrainez une liste de médicaments, vous vous rendez compte qu’il en prend trois, quatre, cinq sur la liste.
Donc j’ai fait un carnet avec tout un tas de symptômes et de situations pour que les aidants puissent se rendre compte parfois s’ils ont certains de ces symptômes-là et qu’ils puissent l’emmener chez leur médecin après pour commencer à être accompagnés petit pas par petit pas.
Parce qu’on dit à tout le monde, prenez soin de vous, on ne leur dit jamais comment.
Et c’est une injonction énorme de prendre soin de soi.
Moi, je pars du principe que si on veut faire les choses bien, il faut y aller petit bout par petit bout, que ça va bien se passer, ça va prendre du temps, ça sera pas parfait.
Mais au moins, on commence.
Et on l’a bien compris, les aidants ont besoin d’être soutenus par leur manager, Dr Hélène Rossinot, donc de ma famille, mon job et moi.
Je rappelle que c’est aux éditions Robert Laffont, c’est très concret, positif, déculpabilisant.
J’ai noté qu’on pouvait aussi le transmettre à son manager quand c’est possible, c’est ton souhait.
On peut aussi te suivre sur les réseaux sociaux.
Et d’ailleurs, puisqu’on est dans un podcast, tu donnes plein d’adresses et même des conseils d’écoute de podcast pour les aidants.
Je trouvais ça super.
Merci Hélène d’être passée dans Soluble(s).
Merci beaucoup.
Voilà, c’est la fin de cet épisode.
Si vous l’avez aimé, notez-le, partagez-le et parlez-en autour de vous.
Vous pouvez aussi nous retrouver sur notre site internet csoluble.media
À bientôt !
Écoutez l’épisode complet. (Seul le prononcé fait foi)
POUR ALLER PLUS LOIN
- Lire le livre : “Ma famille, mon job et moi – Les clés pratiques d’un médecin à ceux qui aident un proche” – Dr Hélène Rossinot – Éd. Robert Laffont.
En précommande, sortie le 5 octobre 2023 - Voir aussi : La fiche sur le congé proche aidant sur le site du service public français.
TIMECODES
00:00 Introduction
01:29 Le parcours du docteur Hélène Rossinot
03:26 Un aidant, c’est quoi au juste ?
05:25 Les idées reçues sur les salariés aidants.
07:50 Aider les salariés aidants a aussi un sens économique pour les entreprises
09:33 Faut-il en parler au travail, à son employeur ?
11:58 Des exemples concrets
14:31 Quelles actions les manageurs mettre en place pour les collaborateurs qui sont des aidants ?
17:08 Les compétences développées par des aidants dans ce rôle
20:25 La santé mentale des aidants
24:07 Merci au Dr Hélène Rossinot !
Fin
Propos recueillis par Simon Icard.
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